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La Côte-Saint-André : un RIGOLETTO « coup de poing »

par Stéphane Lelièvre 27 août 2022
par Stéphane Lelièvre 27 août 2022

©Bruno Moussier/AIDA

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Porté par la direction haletante de Jérémie Rhorer, Rigoletto triomphe à la Côte-Saint-André

Débarrassée de certaines (mauvaises) habitudes interprétatives, la partition de Verdi retrouve une noirceur et une tension dramatique étonnantes. Le public adhère et fait un triomphe aux interprètes !

Retour aux sources… et à la noirceur originelle du mélodrame

Ce vendredi 26 octobre, c’est une salle debout qui, après quelque deux heures trente de musique écoutée avec une attention quasi religieuse,  salue par une immense ovation le  Rigoletto proposé par le Festival de la Côte Saint-André.

© Caro

Les principaux artisans de ce triomphe ? Le Cercle de l’Harmonie, le Jeune Orchestre Européen Hector Berlioz-Isère et leur chef Jérémie Rhorer, qui ont proposé du chef-d’œuvre verdien une lecture en tout point étonnante. Leur premier mérite consiste tout simplement à rappeler que Rigoletto est un pur chef-d’œuvre d’efficacité dramatique et musicale, empreint d’une noirceur et d’une violence qui en font le très digne héritier du Roi s’amuse, l’un des drames les plus sombres de Hugo.

Nous connaissons (ou croyons connaître) tellement bien ce premier opéra de la fameuse trilogie verdienne… que nous avions presque fini par l’oublier ! Sans compter des décennies d’interprétations superficielles réduisant l’œuvre à une succession de ritournelles faciles servant de faire-valoir à des interprètes en quête d’exploits vocaux…
Rien de tel ici. Dès le prélude, sombre, menaçant, hautement tragique, le drame vous empoigne et ne vous lâche plus, jusqu’à l’implacable catastrophe finale : un trio de la tempête qui scotche littéralement les spectateurs sur leur siège, le meurtre sordide de Gilda, le cri déchirant d’un père anéanti… Ce voyage à travers les méandres les plus noirs de l’âme humaine aura à peine été éclairé, très fugacement, par deux ou trois trouées lumineuses : le « Veglia, o donna », le « Caro nome »… Même le premier tableau, celui de la fête à la cour du duc, met mal à l’aise : rarement la musique dévolue à la banda aura à ce point exprimé la futilité et l’inquiétante décadence qui règnent chez les courtisans.
Si toutes les reprises, quasi toujours coupées – y compris sur les plus grandes scènes lyriques du monde -, sont enfin rétablies, l’œuvre se trouve débarrassée de diverses fioritures qui la défigurent trop souvent. Ainsi n’entendra-t-on aucun aigu extrapolé, aucun rallentando, aucun des points d’orgue habituels dans le « Questa o quella » du duc. Seules concessions accordées aux chanteurs, quelques aigus imposés par la tradition (à la fin du duo de la vengeance par exemple, ou de « La donna è mobile »), mais ils sont tenus sans ostentation et s’intègrent naturellement à la ligne musicale : à l’hédonisme vocal fait place la rigueur musicale et, partant, la vérité dramatique. Rappelons enfin que, comme pour la Traviata donnée au Théâtre des Champs-Élysées en 2018, Jérémie Rhorer a choisi de revenir au diapason original souhaité par Verdi (voyez ici l’interview qu’il nous a récemment accordée).

Une tension dramatique haletante

Jérémie Rohrer, pour autant, ne livre pas une lecture uniformément noire et brutale de l’œuvre, loin de là : il laisse s’épancher librement le lyrisme des pages amoureuses, ou le pathétisme des plaintes de Gilda (« Tutte le feste ») ou de son père (« Miei signori, perdono »…), assurant par de saisissants effets de contraste la tension dramatique de l’œuvre. Un exemple parmi tant d’autres : le chant douloureux de Rigoletto (« Non morire, mio tesoro, pietade ! ») soutenu par la ligne intensément lyrique des cordes, succédant à l’accompagnement éthéré, irréel, quasi désincarné des violons alors que Gilda expire (« Lassù in cielo, vicina alla madre »). Mille autre détails seraient à souligner (les lignes du violoncelle, inhabituellement sèches et nerveuses pendant le « Miei signori, perdono, pietate ! », traduisant l’angoisse et la nervosité du bouffon, le lyrisme de sa plainte étant quant à lui souligné par le cor anglais ; l’accompagnement à la fois grinçant et inquiétant du duo entre Sparafucile et Rigoletto au premier acte, … ). La richesse de cette interprétation ne saurait pour autant se réduire à une simple succession de détails intéressants : encore une fois, elle réside principalement dans la grande cohérence qui la sous-tend, qui redonne au chef-d’œuvre verdien toute son urgence dramatique… et qui nous fait regretter qu’une captation audio du concert n’ait pas été prévue !

Un plateau… au diapason !

D’autant que le plateau, dans sa parfaite adhésion au projet esthétique et dramatique du chef, est des plus satisfaisants. Commençons par souligner l’excellent niveau des petits rôles : les courtisans (Dominic Sedwick, Leon Košavić et Yu Shao) parviennent à donner aux silhouettes croquées par Verdi une vraie épaisseur ; Ema Nikolovska se montre parfaitement efficace en Giovanna et en page du duc ; Nicolas Legoux possède toute l’autorité de Monterone ; et surtout, Julie Robard-Gendre confère aux quelques répliques de la Comtesse de Ceprano (quel luxe !) une noblesse d’accent tout à fait inhabituelle. Sparafucile et sa sœur sont incarnés respectivement par Alexander Tsymbalyuk et Adriana di Paola. Le premier, récemment entendu en Commandeur de Don Giovanni à l’Opéra Bastille, est un spadassin étonnamment digne, au chant sobre, assez loin de la brute épaisse qu’on nous donne généralement à voir. Adriana di Paola attire l’œil et l’oreille avec une Maddalena aguicheuse mais sans vulgarité.

Quant au trio incarnant les premiers rôles, il a été particulièrement applaudi par le public.

Le ténor Liparit Avetisyan est une belle découverte : la voix est souple, le timbre clair, la ligne de chant soignée. Il se montre particulièrement brillant dans son premier air et surtout dans une « Donna » chantée tout en délicatesse et, une fois n’est pas coutume, dénuée de toute vulgarité. Il se montre en revanche un peu plus tendu dans sa longue et difficile scène du second acte… 

© D. R.

Un ténor à suivre quoi qu’il en soit, plus que prometteur (il s’est déjà produit à Covent Garden), possédant des moyens particulièrement bien adaptés au bel canto : sans doute le chanteur doit-il encore éviter certains emplois trop lyriques, le rôle du duc constituant sans doute une limite à ne pas dépasser… pour le moment en tout cas !

Olga Peretyatko arrache Gilda aux sopranos suraigus à l’expressivité parfois limitée qui s’emparent quelquefois du rôle  – ce que n’était pas la créatrice, Teresa Brambilla, laquelle chanta Abigaïlle à Paris au Théâtre Italien en 1845, et possédait également à son répertoire les rôles d’Odabella ou de Luisa Miller… La voix de la soprano russe a acquis une belle rondeur dans le grave ces dernières années et la projection vocale est toujours aussi  efficace. La ligne de chant est quant à elle particulièrement soignée, notamment dans les passages cantabile, ce qui nous vaut un duo du deuxième acte ou encore une mort de Gilda particulèrement émouvants.

© Marcimarc
© D.R.

Le baryton slovaque Dalibor Jenis a parcouru un très beau chemin depuis son Conrad des Fées du Rhin à Montpellier en 2002. Il s’est depuis produit sur les principales scènes internationales, notamment à l’Opéra de Paris où nous l’avons entendu en Valentin, Marcello ou Figaro. 

Il incarne ici un très digne Rigoletto, sobre, sans cabotinage, dont le timbre aux couleurs tendres et légèrement plaintives permet l’expression d’un lyrisme mesuré et touchant.  

Ajoutons pour conclure que le chœur (exclusivement masculin) de la Musikfest Bremen a apporté au concert une contribution de qualité, et que les différents chanteurs ont également interprété leur rôle scéniquement, avec conviction, dans une mise en espace efficace et parfaitement en phase avec la musique.

Un concert passionnant, qui sera de nouveau donné à Brême le 28 août.

Les artistes

Rigoletto : Dalibor Jenis
Duc de Mantoue : Liparit Avetisyan
Sparafucile : Alexander Tsymbalyuk
Comte Monterone : Nicolas Legoux
Matteo Borsa : Yu Shao
Marullo : Dominic Sedgwick
Le Comte de Ceprano : Leon Kosavic
Un Huissier : Friedo Henken
Gilda : Olga Peretyatko
Maddalena : Adriana di Paola
Giovanna, Un page de la Duchesse : Ema Nikolovska, 
La Comtesse de Ceprano : Julie Robard-Gendre

Jeune Orchestre Européen Hector Berlioz – Isère ; Le Cercle de l’Harmonie ; Chœur de la Musikfest Bremen, dir. Jérémie Rhorer.

Le programme

Rigoletto

Opéra en trois actes  de Giuseppe Verdi, livret de Francesco Maria Piave d’après Le Roi s’amuse de Victor Hugo, créé le 11 mars 1851 à Venise (La Fenice). 

Concert du vendredi 26 Août 2022 – Cour du château Louis XI – La Côte-Saint-André

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Jérémie RhorerLe Cercle de l’HarmonieAdriana Di PaolaAlexander TsymbalyukOlga PeretyatkoDalibor JenisLiparit Avetisyan
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

4 commentaires

Schippers 5 septembre 2022 - 13 h 49 min

MERVEILLEUX CONCERT

Répondre
Holenstein 5 septembre 2022 - 20 h 51 min

Super ! Marieke !

Répondre
Holenstein Sonja 5 septembre 2022 - 21 h 01 min

Oui …vraiment fantastique

Répondre
Terrazzoni camillle 24 octobre 2022 - 8 h 03 min

Super beau on se dirait dans un autre monde

Répondre

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