À la une
Les cadeaux de Parpignol pour les fêtes de Noël
CD – Lucia di Lammermoor : la confirmation de Lisette...
Un Américain à Paris : Genève succombe au charme de la...
Se préparer à La Passagère, Opéra national Capitole de Toulouse,...
Se préparer à Un ballo in maschera, Opéra de Paris...
Le Petit Faust, jeu télévisé déjanté à l’Athénée
Le 36e Festival Présences rend hommage à Georges Aperghis
Bruxelles, NormaVoyage immobile et bel canto sous tension, ou « En...
LA CHAUVE-SOURIS  à l’Opéra Royal de Wallonie-Liège –Entre opéra et Moulin...
Ça s’est passé il y a 100 ans : création...
TCE : le triomphe des Tenebrae dans un Messie de belle...
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs
Première Loge

Pour ne rien manquer de l'actualité lyrique, restons en contact !

Compte renduVu pour vousConcert

Radamisto de Haendel à l’Opéra de Montpellier

par Sabine Teulon Lardic 6 octobre 2021
par Sabine Teulon Lardic 6 octobre 2021
0 commentaires 5FacebookTwitterPinterestEmail
1,7K

Crédit photos : © Marc Ginot

Radamisto, opera seria handelien brille de tous ses feux à l’Opéra de Montpellier en version concertante. Première étape d’une tournée européenne (de Barcelone à Essen) qui sera probablement triomphante. Nous retrouvons Philippe Jaroussky, interprète du rôle-titre, aux côtés de Marie-Nicole Lemieux et de l’orchestre Il Pomo d’Oro. Le méli-mélo genré est une des particularités de cette version originale de l’œuvre : lorsque le héros est incarné par un contre-ténor soprano, les princes par d’époustouflantes mezzo et soprano, les amoureuses le sont par des voix féminines.

Un opera seria made in London

G.F. Haendel, portrait de Thomas Hudson (1756)

Dans l’Europe du XVIIIe siècle, la culture musicale est largement européenne. L’opera seria, dont Naples est le berceau, devient hégémonique dans toute capitale, en langue italienne, mais avec des compositeurs et librettistes de toute nationalité. Ayant séjourné dans la péninsule italienne, le saxon G.-F. Haendel (1685-1759) en devient le passeur pour la scène londonienne, sa terre d’adoption, en créant la Royal Academy of Music avec deux confrères italiens (G. B. Bononcini et A. Ariosti) et le soutien d’aristocrates londoniens. Au King’s Theatre d’Haymarket, en neuf saisons, 34 opéras sur plus de 460 représentations seront donnés ! Haendel en est non seulement l’un des compositeurs attitrés, mais également l’impresario qui constitue une troupe fameuse de chanteurs, rompus à la vocalité du genre italien qu’il s’agit d’imposer aux anglais.

En conséquence, ce sont respectivement la soprano Margherita Durastanti (avril 1720, version HWV 12a), puis le castrat contralto Senesino[1] (décembre 1720) qui créent successivement le rôle-titre de son premier opus londonien, Radamisto, livret de N. Haym. La seconde production oblige Haendel à remanier sa partition dans l’hiver (version HWV 12b) … et la Durastanti à récupérer le rôle de Zenobia !

——————————

[1] Nom d’artiste qui provient de sa ville natale, Sienne. Senesino créé également le rôle-titre de Giulio Cesare d’Haendel.

La Durastanti (dessin ca1730)

L’intrigue en trois actes oppose le clan de Thrace (le roi Farasmane, son fils Radamisto et Zenobia son épouse) au clan du roi d’Arménie (Tiridate), qui n’est autre que l’époux de la sœur de Radamisto (Polissena). L’enjeu autour de la capture de la belle Zenobia, butin de bataille mais fidèle à son époux, déclenche la fureur et la douleur des Thraces. Le revirement inespéré des princes et généraux arméniens (Tigrane, Fraarte), sous l’influence de Polissena, renverse la situation. Fin dans l’allégresse générale.

Chanter et suonare Radamisto

Après ses débuts à l’Opéra de Montpellier en tant que chef d’orchestre de l’oratorio Il Primo omicidio de Scarlatti , Philippe Jaroussky paraît ici en interprète du rôle-titre de Radamisto. C’est un beau lever de rideau pour la résidence montpelliéraine de l’artiste et de son ensemble Artaserse, résidence de trois saisons. Le contre-ténor français s’est imposé sur les scènes européennes dans le revival de sa typologie vocale, qui accompagne l’exhumation du « continent » lyrique baroque. Sa place prééminente a été confirmée par les Victoires de la Musique (Révélation Artiste lyrique en 2004, Artiste Lyrique en 2007 et 2010) et Echo Klassik Awards (2016, Berlin). Dans le rôle de Radamisto, sa maîtrise de chaque tenue et de l’ornementation (au da capo), son expressivité douloureuse dans l’aria « Ombra cara » (I) en font une digne successeur du créateur londonien Senesino. En Zenobia, la contralto Marie-Nicole Lemieux retrouve son répertoire des débuts, tout en cultivant l’expressivité du recitativo secco ou celle de l’aria qu’elle « joue » face à ses partenaires. L’usage des graves poitrinés est-il nécessaire à son interprétation ?

Stupéfiante d’émotion et de technique vocale, la soprano hongroise Emöke Baràth (Polissena) poursuit sa fulgurante ascension depuis le rôle-titre d’Elena de Cavalli au festival d’Aix (2013). Ici, elle se distingue par la conduite du phrasé éminemment musicale et l’émission aiguë (aria du III) : stupende ! Incarner la tyrannie belliqueuse, c’est l’affetto du roi Tiridate : le ténor Zachary Wilder en offre la touche de folie nécessaire à la crédibilité de l’intrigue. Cependant, les sons trop ouverts dans les vocalises d’aria di furore ne rajoutent rien à sa vaillance. Confier le rôle du prince Tigrane à la mezzo Anna Bonitatibus (lauréate d’International Opera Awardds 2015) est un atout : virtuosité, flexibilité, expressivité de la tendre aria de son revirement (III) sont remarquables. Avec une juvénile maîtrise, la soprano espagnole Alicia Amo incarne Fraarte. Quant au roi de Thrace, la basse italienne Renato Dolcini l’incarne avec une sobre assurance, rappelant son Prométhée de Titon et l’Aurore de Mondonville (Opéra-Comique, 2021).

La dramaturgie musicale de Radamisto

Depuis plusieurs décennies, le renouveau haendelien s’est surtout concentré sur ses oratorios et quelques opéras devenus cultes (Giulio Cesare, Rinaldo). Grâce à cette production non scénique, on mesure combien Radamisto est déjà abouti, tant par sa dramaturgie musicale que par l’assimilation d’influences franco-italiennes. Du côté français, l’ouverture à la française, le ballet de chaconne (sur basse obstinée) et quelques tempi d’élégants menuets (dont un avec trio d’anche … à la Lully) saupoudrent la partition. L’écriture vocale déclinant les affetti les plus contrastés, l’absence de chœur infusent, elles, l’influence italienne dominante.

Quant à la dramaturgie, elle émerge du cadre parfois contraignant et répétitif du couple recitativo /aria da capo. D’une part, la variété du récitatif – accompagnato notamment – restitue les tensions des clans ennemis, notamment par ses dialogues (Tiridate et Zenobia, III). D’autre part, le volet central de l’aria da capo creuse l’expressivité de chaque rôle par des artifices musicaux (modulation, orchestration) pour mieux cerner la fidélité de l’épouse, la sensibilité amoureuse de Radamisto, ou de Polissena trahie.  À cet égard, le récitatif de Zenobia lors de sa capture (II) magnifie l’art de la rupture : soit de vives répliques, fortissimo soutenues par l’orchestre, soit de suaves phrases amoureuses à son époux dissimulé, piano. De ce fait, l’unique duo des époux fidèles (II), puis le seul chœur des 7 solistes (III), célébrant la résolution des tensions, forment des pics de cette dramaturgie.

Dirigé par le jeune concertiste Francesco Corti (depuis son clavecin !), l’ensemble Il Pomo d’oro, fondé en 2012, est l’artisan constant du succès du concert. Relevons la virtuosité des trompettes et cors naturels, la réactivité du continuo (violoncelle, théorbe, contrebasse, 2 clavecins) que l’on souhaiterait néanmoins plus diversifié au cours des actes. Leur prestation s’inscrit d’emblée dans la lignée d’enregistrements de Radamisto : N. McGegan chez Harmonia Mundi (1994), Alan Curtis chez Virgin Veritas (2005).

Sans l’attrait d’une version scénique – celle de Radamisto à Vienne en 2013 avec les costumes de C. Lacroix, celle du Festival Haendel de Karlsruhe en 2009 – cette version de concert captive et intrigue. Le méli-mélo genré de sa distribution – un héros chanté par un registre soprano de contre-ténor, une héroïne contralto, convoitée par un ténor (Tiridate) et une soprano (le général Fraarte) – paraît un bel exercice de déconstruction de genre.

Les artistes

Radamisto : Philippe Jaroussky
Zenobia : Marie-Nicole Lemieux 
Polissena : Emóke Baráth 
Tiridate : Zachary Wilder
Farasmane : Renato Dolcini
Tigrane : Anna Bonitatibus
Fraarte : Alicia Amo

Ensemble Il Pomo d’Oro, direction Francesco Corti

Le programme

Radamisto

Opera seria en trois actes de Georg Friedrich Haendel, livret de Nicola Francesco Haym, d’après L’amor tirannico o Zenobia de Domenico Lalli. Créé à la Royal Academy of Music de Londres le 27 avril 1720.

Représentation du 4 octobre 2021, Opéra Berlioz / Le Corum (Montpellier)

 

image_printImprimer
Marie-Nicole LemieuxAnna BonitatibusEmóke Baráthphilippe jarousskyHaendel
0 commentaires 5 FacebookTwitterPinterestEmail
Sabine Teulon Lardic

Sabine Teulon Lardic est chercheure à l'université de Montpellier 3. Spécialiste de l'opéra-comique du XIXe siècle et des spectacles lyriques dans les Théâtres de plein air (XIXe-XXIe siècles), elle a collaboré aux volumes collectifs de Carmen Abroad (Cambridge Press), The Oxford Handbook of the Operatic Canon (Oxford Press), Histoire de l'opéra français, t.3 (Fayard, 2022). Elle signe également des articles pour les programmes de salle (Opéra-Comique, Opéra de Montpellier) ou la collection CD du Palazzetto Bru Zane.

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Sauvegarder mes informations pour la prochaine fois.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

post précédent
La Voix humaine/Point d’orgue : REQUIEM POUR UNE SCIE À PAIN – Tornade sur l’Opéra de Bordeaux !
prochain post
Ilya Répine au cœur de la Russie musicale

Vous allez aussi aimer...

Un Américain à Paris : Genève succombe au charme...

17 décembre 2025

Le Petit Faust, jeu télévisé déjanté à l’Athénée

16 décembre 2025

Le 36e Festival Présences rend hommage à Georges...

15 décembre 2025

Bruxelles, NormaVoyage immobile et bel canto sous tension,...

14 décembre 2025

TCE : le triomphe des Tenebrae dans un Messie...

14 décembre 2025

Crémone, I puritani  : la jeunesse à l’assaut...

10 décembre 2025

Les cadeaux de Parpignol pour les fêtes de...

10 décembre 2025

« Gala lyrique à la française » salle Gaveau –...

9 décembre 2025

Au Maggio Musicale Fiorentino, la Passion selon saint...

8 décembre 2025

Al Maggio Musicale Fiorentino la Matthäus-Passion di Bach...

8 décembre 2025

En bref

  • Les brèves de décembre –

    11 décembre 2025
  • Les brèves de novembre –

    20 novembre 2025

Humeurs

  • Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

La vidéo du mois

Édito


  • Édito d’octobre –
    « O, mia musica, si bella e perduta… » : quand le cas Venezi révèle un malaise plus profond concernant les arts et la musique en Italie

    2 octobre 2025

PODCASTS

PREMIÈRE LOGE, l’art lyrique dans un fauteuil · Adriana Gonzàlez & Iñaki Encina Oyón – Mélodies Dussaut & Covatti

Suivez-nous…

Suivez-nous…

Commentaires récents

  • Jean Leprince dans CD –  Tenebris d’Alexandre de Villeneuve. Un passionnant programme d’un compositeur sorti des ténèbres
  • meyer frederic dans Aux confins du sublime et de l’abject : le « Requiem de Terezin » (Grand Amphithéâtre de la Sorbonne)
  • meyer frederic dans Ça s’est passé il y a 100 ans : création de Wozzeck
  • Don Giovanni, de Mozart – À Dom e-mots dans KOSTAS SMORIGINAS
  • Josy Santos dans L’Opéra de Liège inscrit le CHAPEAU DE PAILLE DE FLORENCE à son répertoire

Première loge

Facebook Twitter Linkedin Youtube Email Soundcloud

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Login/Register

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Rechercher

Archives

  • Facebook
  • Twitter
  • Youtube
  • Email
Première Loge
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs

A découvrirx

Un Américain à Paris : Genève succombe...

17 décembre 2025

Le Petit Faust, jeu télévisé déjanté...

16 décembre 2025

Le 36e Festival Présences rend hommage...

15 décembre 2025