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Ilya Répine au cœur de la Russie musicale

par Marc Dumont 6 octobre 2021
par Marc Dumont 6 octobre 2021
Ilya Répine, Portrait de Youri Répine enfant, 1882 Huile sur toile © Galerie nationale Trétiakov, Moscou
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Exposition Ilya Répine, « Peindre l’âme russe »
Petit Palais, du 5 octobre au 23 janvier

Ce mardi 5 octobre s’ouvrait une fabuleuse exposition entièrement consacrée au peintre russe Ilya Répine. Ses tableaux – qui accordent une large place à la musique et aux musiciens – sont une plongée colorée, intense, multiple dans une Russie d’entre deux mondes. Entre l’abolition du servage en 1861 et les bouleversements engendrés par les révolutions de 1917.

Portraitiste, peintre des cosaques comme de la Russie profonde, artiste en cour au Palais Impérial de l’Hermitage et dans la plus haute société tsariste, il est en même temps capable d’exalter la révolution de 1905, de compatir à la dénonciation d’un révolutionnaire par des paysans tsaristes, de nous bouleverser avec le retour de prisonniers politiques en leur famille après la prison ou l’exil… Répine est un personnage aux multiples facettes, aimant la France et la Normandie où il apprit à poser son chevalet en extérieur, francophile au point perfectionner son français à plus de 70 ans.

Répine aimait la musique et il croisa de nombreux musiciens sur sa route. Engagé dans les cercles intellectuels en effervescence dans les années 1880-1910, proche de Tolstoï, il croise mécènes, aristocrates rouges et musiciens. Les musiciens du Groupe des cinq[1] n’ont pas de secret pour lui. Et il s’est employé à certains de leurs portraits avec un regard très personnel, nous les rendant particulièrement proches.
La salle qui leur est consacrée se trouve au cœur de l’exposition. On y trouve d’abord le regard dur, perçant, provoquant de Sophie Menter (1846-1918), pianiste allemande de quarante ans en 1887. Répine composa deux portraits de cette élève de Liszt, alors très connue dans l’Empire tsariste. Elle enseigna au Conservatoire de Saint-Pétersbourg et participait régulièrement aux fameux concerts que Balakirev organisait dans son « école de musique non payante » fondée au début des années 1860.

Puis, c’est le rédacteur du manifeste du Groupe des cinq en personne qui nous regarde à travers ses lunettes rondes. César Cui (1835-1918) pose, nonchalant, rêveur, introverti, dans son costume de Général de l’armée impériale. Tradition familiale puisque son père, français, avait servi dans l’armée napoléonienne, avant de s’installer à Vilnius.

En se retournant, on trouve le bouleversant portrait d’une amie, mécène et biographe de César Cui, Louise de Riquet, Comtesse de Mercy-Argenteau, née Princesse de Caraman-Chimay (1837-1890). Pianiste elle-même, cette riche aristocrate belge, ancienne maîtresse de Napoléon III, œuvra beaucoup à la diffusion des musiques russes en Europe de l’ouest. Le tableau de Répine est sans doute le plus bouleversant de toute l’exposition. Il saisit en effet la Comtesse quelques jours avant sa mort, moment qu’elle sait proche. Répine traduit sa résignation au travers d’un regard insondable, d’une profondeur mélancolique qui semble pourtant demander silencieusement un secours.

Face à elle, un autre mourant, l’immense Modeste Moussorgsky (1839-1881) ! C’est à l’hôpital, dans la chambre du compositeur, que Répine dressa quatre fois son chevalet, nous laissant le témoignage d’un homme hirsute, hagard, se sachant condamné par l’alcool, la dépression. Quelques jours plus tard, juste avant son quarante deuxième anniversaire, Moussorgsky décédait, laissant inachevée sa grande œuvre, La Khovanchtchina.

 Le tableau suivant nous fait entrer dans l’intimité de Mikhail Glinka (1804-1857). Rêveur, cherchant l’inspiration, le compositeur emblématique de la musique russe, souvent appelé son « père », est croqué allongé, en train de penser la suite de son célèbre opéra Rousslan et Ludmilla. Le jeu sur les contrastes de blancs éclaire le tableau d’une lumière que Glinka semble regarder en face.

Quel contraste avec le jeune Alexandre Glazounov (1865-1936), à peine vingt-deux ans, qui parait nous fixer, nous défier. Répine et lui se connaissaient et l’estime, l’admiration même, furent réciproques. Avec son premier poème symphonique, Stenka Razine, composé à vingt ans, il s’était inspiré de la célèbre toile des Bateliers de la Volga de Répine.

À la droite de Glazounov, c’est l’imposant pianiste et compositeur Anton Rubinstein (1829-1894), cinquante deux ans en 1881. Répine était fasciné par son visage : « Il ressemble à un lion » disait-il. Rubinstein devait effectivement impressionner plus d’un musicien d’orchestre lorsqu’il dirigeait. Son air beethovénien traduit l’énergie d’un Démon musical, pour reprendre le titre de son opéra le plus célèbre composé dix années avant la réalisation de ce tableau. Répine est bien le peintre des regards. 

 Le tableau du mécène Savva Mamontov (1841-1918), habillé d’une blouse blanche simple, à la russe, nous présente un homme dans une position fort peu académique, qui semble nous toiser.

Mamontov avait suffisemment de fortune pour installer une colonie d’artistes sur ses terres ou bien créer son opéra privé, où un certain Chaliapine fit ses premières armes.

S’il ne faut pas chercher de portrait de Rimsky-Korsakov (1844-1908), une de ses œuvres s’y trouve par l’esprit : Sadko. Bien que l’opéra de Rimsky date de 1896, soit… vingt années après le vaste tableau peint par Répine. L’univers féérique de Sadko y est représenté par une toile qui demanda trois années de travail à l’artiste, puisant là aux sources du folklore russe avec cette histoire merveilleuse du marchand de Novgorod.

Je ne sais pas ce qui se cache derrière l’expression trop rebattue de « l’âme russe », mais une chose est sûre : cette exposition donne à voir les multiples facettes d’un grand peintre au miroir de son temps.

Précipitez-vous !

[1] Composé de Borodine, Cui, Balakirev, Moussorgsky et Rimsky-Korsakov, le groupe se forma sur la base d’une promotion d’une musique enracinée dans les traditions russes, rompant avec les modèles occidentaux.

Sauf indication contraire, photographies signées Marc Dumont, tous droits réservés.

 

INFORMATIONS PRATIQUES

DATES ET HORAIRES
Du 5 octobre 2021 au 23 janvier 2022

LIEU
Le Petit Palais
Avenue Winston Churchill
75008 Paris 8

TARIFS
– de 18 ans : Gratuit
tarif réduit : 11€
plein tarif : 13€

SITE OFFICIEL
www.petitpalais.paris.fr

 

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Ilya RépineGroupe des cinqSophie MenterCésar CuiLouise de RiquetMoussorgskyGlinkaGlazounovRubinsteinSavva Mamontov
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Marc Dumont

Passionné par l’Histoire et la Musique, Marc Dumont a présenté des centaines de concerts et animé de multiples émissions à Radio France de 1985 à 2014. Il se consacre à des conférences et animations, rédige actuellement un livre où Musiques et Histoire se croisent sans cesse, et propose des « Invitations aux Voyages », qui sont des rencontres autour de deux invités, en vidéo.

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