À la une
Une pléiade de stars pour le Concert des Ambassadeurs Rolex...
Brèves de mai –
Samson et Dalila à Saint-Étienne, la bande-son de Gaza
Nouvelle distribution d’exception pour le Rigoletto de l’Opéra Bastille
Lyon, Peter Grimes : Chronique de l’homophobie ordinaire
CD- Rebelle : hommage à Célestine Galli-Marié
Le retour de Riccardo Muti à Turin pour la saison...
Faust version 1859 à Lille : plus intense, plus dramatique...
Ça s’est passé il y a 200 ANS : mort d’ANTONIO...
Milan : IL NOME DELLA ROSA – Le Moyen Âge d’Umberto...
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs
Première Loge

Pour ne rien manquer de l'actualité lyrique, restons en contact !

ProductionCompte rendu

Mozart & La Flûte enfrançais : Avignon avant Versailles

par Tom Mébarki 27 décembre 2019
par Tom Mébarki 27 décembre 2019
0 commentaires 1FacebookTwitterPinterestEmail
1,K

C’est au sein d’une salle d’opéra éphémère, l’« opéra confluence » en périphérie d’Avignon (accueillant son public alors que son aïeul du centre-ville se refait une beauté), que s’est jouée ce vendredi 27 Décembre une œuvre de circonstance : La Flûte enchantée de Mozart. De circonstance, car la période de Noël est en effet propice pour assister à cet opéra-féérie, laissant au vestiaire notre corps d’adulte avec son manteau, pour réentendre et revoir le singspiel du compositeur autrichien avec l’innocence d’une première fois.

C’était aussi, pour une grande part du public, l’occasion d’assister pour une première fois à une Flûte enchantée dans une version intégralement traduite en français. Pas d’emprunts à l’œuvre méconnue Les mystères d’Isis, qui au début du XIXe siècle avait proposé sur la scène française une traduction du singspiel mozartien, tout en se permettant de rajouter çà et là des extraits de La Clemenza di Tito ou Don Giovanni. C’était, en Avignon, une flûte intégrale : une Flûte en français. D’après le chef d’orchestre Hervé Niquet, le texte provient de plusieurs traductions du XIXe siècle (peut-être Castil-Blaze ?), pour des résultats tantôt heureux (« l’amour est un oiseau volage », « autant en emporte le vent »), tantôt moins (« Papageno joyeux et hop la la », « la belle Pamine n’a guère bonne mine », et, notre favori : « mourir de trépas »). La traduction est du reste très classique et respecte souvent littéralement son hypotexte. Les dialogues parlés propres au genre du singspiel ont été également traduits, quelquefois réadaptés sans doute à notre monde moderne.

C’est donc une prosodie inédite que les chanteurs ont dû apprendre pour camper leur rôles qui, musicalement, sont jalonnés des airs les plus célèbres de l’histoire de l’opéra. Ainsi, la grande maîtrise de la prononciation de Mathias Vidal (habitué au répertoire de Rameau) a servi une voix toute en finesse et sans aucune faute de goût. Il a pu donner la réplique à une Pamina tout aussi accomplie, Florie Valiquette sachant moduler sa tessiture haute pour faire convenir sa voix à la typologie de « soprano désincarnée » qu’exige le rôle. Marc Scoffoni incarne quant à lui un Papageno convaincant et attachant, son jeu d’acteur ayant cerné le superbe trublion qu’est le personnage. Sur ce point, les choix de jeu d’acteur des deux rôles principaux peuvent parfois interroger, tant leur emphase et leur infantilisation dans le ton choisi ont tendance à dénoter avec leurs interventions chantées. La Reine de la nuit de Chantal Santon-Jeffery a eu ce soir-là certains problèmes de technique et de tessiture, alors même que son premier air a été baissé d’un demi-ton, et d’un ton entier pour le second. Seul bémol de la soirée. Sarastro (Tomislav Lavoie) et Monostatos (Olivier Trommenschlager) ont solidement assuré leur rôle. De même pour les Trois Dames (mention spéciale à la soprano Suzanne Jerosme) et les Trois Enfants (dont au moins un, voire deux, n’était cependant pas un enfant). La direction d’Hervé Niquet est comme à son habitude très dynamique et très précise dans les choix de couleurs et de timbres qu’il a voulu extraire de l’Orchestre Régional Avignon Provence. Les chœurs de l’Opéra Grand Avignon ont réalisé leur intervention de part et d’autre de la fosse d’orchestre, choix intéressant dans la spatialisation du son. Dans la même idée, deux grandes colonnes d’enceintes ont été installées pour faire entendre les quelques sound effects qui parcourent l’œuvre (un bruit de serpent et au moins 22 coups de tonnerre – toujours le même d’ailleurs), synchronisés avec les jeux de lumière qui servaient la mise en scène.

La scénographie de Cécile Roussat et Julien Lubek était à ce propos vraiment remarquable, et nécessite que l’on s’y attarde. On note de nombreuses influences hétéroclites qui enrichissent significativement l’expérience sonore. Nous avons d’abord l’impression d’assister à un dessin animé, où des personnages en modèles réduits par rapport aux décors se meuvent le plus souvent en synchronisation avec la musique : c’est du mickeymousing. Mais la plus grande inspiration pioche des éléments propres au cirque, avec une troupe d’acrobates qui réalise en parallèle de l’histoire une deuxième trame. Ainsi, nous les voyons emprunter tout autant d’accessoires au cirque qu’il est possible : monocycle, quille de jonglage, colombes (vraies!), corde de funambule, et claquettes (ce numéro étant réalisé sur le glockenspiel – association aussi insolite qu’intéressante) et même… pole dance ! Les épreuves de Tamino sont donc assurées par une doublure dont les acrobaties témoignent de la difficulté du personnage à triompher. Sur ce point, les « chanteurs modèles-réduits » sont parfois réduits au rôle de fond sonore accompagnant le visuel très riche de la scène – mais la mise en scène l’avait annoncé dès le départ, lorsque l’orchestre commence l’ouverture après qu’un acrobate a allumé un phonographe. Nous avons ainsi l’impression d’assister à ces célèbres spectacles viennois de marionnettes qui se servent des musiques de Mozart pour donner vie à leurs pantins. D’autres éléments subtils gagent de la qualité de lecture des metteurs en scène : ombres chinoises, arbre mobile tout en acrobates lorsque Papageno veut se pendre, traditionnelle grande robe de la reine de la nuit réservée pour le final. Mais ce qui dépasse l’ensemble est probablement, au-delà de la forme, le fond de ce qui est raconté. Nous sommes au premier acte dans une chambre où Tamino est endormi. Tous les personnages vont sortir d’un endroit du décor (Papageno du lit, Monostatos de la cheminée, la Reine de la nuit d’un portrait…). Le temple de Sarastro est quant à lui symbolisé par une immense bibliothèque, gage du savoir et de la connaissance. Le deuxième acte se passe, précisément, à l’intérieur de cette bibliothèque, où des livres immenses servent de points d’entrée et de sortie aux personnages. La traduction française se permet même une mise en abyme lorsque Pamina et les trois enfants chantent devant une page du livret original. Les successions de scènes se font ainsi au gré des successions de pages. À la fin, tout s’éclaire : l’histoire était en fait racontée par Sarastro, père d’un tout petit Tamino endormi, avec autour, un exemplaire de chaque personnage. La chambre, les livres : tout cela n’était qu’une féérie, un conte animé de Noël.

C’est donc plein de ces histoires d’enfant que la traduction française de Die Zauberflöte s’est conclue. Un spectacle qui sera porté à Versailles où une captation DVD est prévue. Par chance, le DVD ne pourra montrer ce que nous avons pu voir dans la fosse d’orchestre en sortant : les musiciens jouaient depuis le début sur l’édition Bärenreiter de la version originale allemande… les gredins !

Les artistes

Direction musicale Hervé Niquet
Mise en scène, scénographie et lumières Cécile Roussat et Julien Lubek
Costumes Sylvie Skinazi
Assistante décors Elodie Monet
Assistants lumières Marc Gingold

Pamina Florie Valiquette
La Reine de la Nuit Chantal Santon-Jeffery
Papagena Pauline Feracci
Première Dame Suzanne Jerosme
Deuxième Dame Marie Gautrot
Troisième Dame Mélodie Ruvio
Tamino Mathias Vidal
Papageno Marc Scoffoni
Sarastro Tomislav Lavoie
Monostatos Olivier Trommenschlager
L’Orateur Matthieu Lécroart
Premier Prêtre, Homme en armure Matthieu Chapuis
Deuxième Prêtre, Homme en armure Jean-Christophe Lanièce

Chœur de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre Régional Avignon-Provence

Le programme

Opéra Grand Avignon, 27 décembre 2019

image_printImprimer
Mathias VidalChantal Santon-JefferyHervé NiquetFlorie Valiquette
0 commentaires 1 FacebookTwitterPinterestEmail
Tom Mébarki

Actuellement doctorant et ATER dans le secteur Musicologie de l’Université d’Aix-Marseille, Tom Mébarki poursuit une thèse sur la “Folie organisée” stendhalienne dans l’opera buffa rossinien. Parallèlement à ses activités universitaires, il cultive un registre de contre-ténor qui l’amène à se produire en France et à l’étranger et est par ailleurs organisateur de plusieurs festivals dans le Sud de la France. Tom Mébarki est lauréat 2019 du concours international « Ma thèse en 180 secondes ».

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Sauvegarder mes informations pour la prochaine fois.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

post précédent
La vie n’est pas un long fleuve tranquille pour Les P’tites Michu de Messager !
prochain post
D’Almaviva à Ory : Patrick KABONGO, jamais loin du comte !

Vous allez aussi aimer...

Une pléiade de stars pour le Concert des...

12 mai 2025

Samson et Dalila à Saint-Étienne, la bande-son de Gaza

12 mai 2025

Nouvelle distribution d’exception pour le Rigoletto de l’Opéra Bastille

11 mai 2025

Lyon, Peter Grimes : Chronique de l’homophobie ordinaire

11 mai 2025

Faust version 1859 à Lille : plus intense,...

7 mai 2025

Milan : IL NOME DELLA ROSA – Le Moyen...

5 mai 2025

Florence, 87e Festival del Maggio Musicale Fiorentino :...

5 mai 2025

Firenze, 87° Festival del Maggio Musicale Fiorentino: un...

5 mai 2025

Le Freischütz en version de concert au TCE :...

5 mai 2025

Naples : Attila de chair et de feu !

3 mai 2025

En bref

  • Brèves de mai –

    12 mai 2025
  • Les brèves de mars –

    14 mars 2025
  • Les brèves de février

    25 février 2025
  • Sauvons l’Avant-Scène Opéra !

    18 février 2025
  • L’Avant-Scène Opéra, c’est fini…

    7 février 2025

Humeurs

  • Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

Édito

  • Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

La vidéo du mois

PODCASTS

PREMIÈRE LOGE, l’art lyrique dans un fauteuil · Adriana Gonzàlez & Iñaki Encina Oyón – Mélodies Dussaut & Covatti

Suivez-nous…

Suivez-nous…

Commentaires récents

  • Norbert RIVIERE dans GIOVANNI PACINI : un musicien dont l’œuvre reste encore à redécouvrir…
  • Hervé Casini dans Asmik Grigorian, Carlo Rizzi, Christof Loy : triple triomphe pour le TRITTICO de l’Opéra Bastille
  • Hervé Casini dans Berliner Philharmoniker: memorabile Madama Butterfly di Kirill Petrenko, Eleonora Buratto e Jonathan Tetelman
  • Stéphane Lelièvre dans Asmik Grigorian, Carlo Rizzi, Christof Loy : triple triomphe pour le TRITTICO de l’Opéra Bastille
  • Bernet Yannick dans Asmik Grigorian, Carlo Rizzi, Christof Loy : triple triomphe pour le TRITTICO de l’Opéra Bastille

Première loge

Facebook Twitter Linkedin Youtube Email Soundcloud

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Login/Register

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Rechercher

Archives

  • Facebook
  • Twitter
  • Youtube
  • Email
Première Loge
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs

A découvrirx

Une pléiade de stars pour le...

12 mai 2025

Samson et Dalila à Saint-Étienne, la bande-son...

12 mai 2025

Nouvelle distribution d’exception pour le Rigoletto de...

11 mai 2025