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Production

Red Waters à Rennes – Un opéra entre deux eaux

par Romaric HUBERT 31 janvier 2022
par Romaric HUBERT 31 janvier 2022

Red Waters © Philippe Chancel, 2022 - TNB, Opéra de Rennes, ONB

Red Waters © Philippe Chancel, 2022 - TNB, Opéra de Rennes, ONB

Red Waters © Philippe Chancel, 2022 - TNB, Opéra de Rennes, ONB

Red Waters © Philippe Chancel, 2022 - TNB, Opéra de Rennes, ONB

Red Waters © Philippe Chancel, 2022 - TNB, Opéra de Rennes, ONB

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Lorsque le spectateur mène ses pas vers l’Opéra de Rennes, ses yeux et ses oreilles ont souvent la chance d’être grandement surpris comme en atteste un récent Rinaldo d’heureuse mémoire. Il en ira de même cette fois-ci encore avec Red Waters, une étrange histoire de fontaine de vin rouge mise en musique par Keren Ann Zeidel et Bardi Johannsson.

Red Waters est un conte de fées gothique. Une histoire d’amour entre un frère et une sœur – où il est question de gémellité et d’inceste, de poison et d’envoûtement, de magie et de rituel – née de l’imagination de Keren Ann Zeidel et Bardi Johannsson avec la complicité de l’écrivaine Marie Darrieussecq.
Quel étrange récit et quel angoissant lieu que Red Waters. Dans ce village, le vin a remplacé l’eau des rivières et les secrets et les non-dits les plus étouffants règnent sur le destin de ses habitants. L’alcool étourdit les sens et attise les esprits jusqu’au bain de sang final. Un jeune homme devenu célèbre grâce à ses recherches sur la télépathie des jumeaux revient dans son village natal pour y recevoir les clefs de la ville. L’amour, sa sœur, sa famille, la communauté locale vont changer sa vie et surtout la lui prendre. Sur scène, le rouge coule à flot et domine le plateau. Les décors de Riccardo Hernàndez – sublimés par les lumières de Scott Zielinski – sont impressionnants de solennité et de puissance. L’ espace scénique se joue de la fosse d’orchestre pour s’étendre jusque dans la salle et écraser le public d’un carmin éclatant.

La mise en scène d’Arthur Nauzyciel réussit à donner de la lisibilité à un livret qui en manque parfois. Il nous dessine une galerie de personnages oniriques d’une force évocatrice étonnante et conduit le spectateur dans une narration poétique et troublante. Le travail d’acteur inventif d’Arthur Nauzyciel associé aux chorégraphies millimétrées de Damien Jalet – artiste associé au Théâtre National de Bretagne, également co-producteur de ce spectacle – apporte également une vraie cohérence à ce Red Waters. Pas d’effets de danse décoratifs inutiles mais de vraies individualités marquées qui jouent, chantent et dansent dans un grand ensemble esthétique et signifiant. Le monde des habitants de Red Waters, c’est celui d’une communauté qui a ses propres codes pour s’exprimer et pour vivre. Arthur Nauzyciel et Damien Jalet réussissent avec talent à lui donner vie sous nos yeux.

Pour mettre en musique ce conte fantastique à la Tim Burton, Keren Ann Zeidel et Bardi Johannsson ont délaissé leurs domaines habituels du folk et de l’électro et se sont emparés du genre de l’opéra en teintant la forme et sa musique de leur lyrisme mélancolique. Red Waters version 2022 est une recréation de l’œuvre et du spectacle donné en 2011 à l’Opéra de Rouen. L’écriture vocale chorale a été adaptée aux membres d’un Chœur de Chambre Mélisme(s) toujours aussi impressionnant de précision technique et d’implication scénique. Le chœur est un personnage plus que présent dans cet opéra et la qualité de la prestation de l’ensemble dirigé par Gildas Pungier en est d’autant plus remarquable.

Soulignons également la richesse et l’inventivité de la révision, signée Jehan Stefan, des orchestrations originales. Il réussit, à l’instar d’Arthur Nauzyciel et Damien Jalet pour la mise en scène et la danse, à donner une grande cohésion musicale et orchestrale à l’ensemble de l’œuvre et à créer une ambiance sonore unique et personnel à ce monde hors du monde qu’est Red Waters.

Pour Keren Ann Zeidel, l’avenir de l’opéra semble plus à chercher dans la comédie musicale que dans l’opéra contemporain. On ne saurait la contredire puisque, très souvent ce soir, nous avons eu l’impression d’assister à une suite de pièces musicales au format chanson. Nul jugement de valeur ici, la chanson est un art de la narration et de la concision qui n’est pas accessible à tout le monde et il nous faut reconnaître l’incroyable talent mélodique et rythmique du duo qu’elle compose avec Bardi Johannsson. Red Waters est un opéra à numéros, un format effectivement souvent délaissé par le compositeur d’opéra actuel et qui permet respirations, variations, répétitions et modulations. Plus qu’un opéra contemporain, Red Waters est comme un retour aux sources musicales et formelles de l’opéra, un drame en musique à l’ancienne ancré dans l’air du temps.

Mais l’opéra, peu importe son époque, c’est aussi et surtout la voix. Si l’écriture vocale et la sonorisation du chœur forment un tout, un univers sonore puissant et expressif, l’écriture et l’amplification des solistes interrogent. Vouloir gommer l’aspect sportif de la voix lyrique, rechercher un chant plus simple et retenu, pourquoi pas, mais reconnaissons l’inconfort que cela peut être pour des interprètes rompus à une pratique vocale différente. Jérôme Billy, Olivier Lagarde, Pauline Sikirdji, Mathilde Pajot et Nicholas Isherwood s’en sortent pourtant avec talent et réussissent à se plier à cette forme nouvelle d’opéra et d’interprétation avec une souplesse et un charisme indéniables.

Dans la fosse, l’Orchestre National de Bretagne, sous la direction précise et attentive de Nicolas Agullo, est un partenaire de jeu convaincant à l’homogénéité sans faille et aux couleurs instrumentales subtiles et qui se fond avec facilité dans une écriture orchestrale brillante et savamment contrastée.

Aux saluts finals, le succès est au rendez-vous. Le public, souvent jeune, réserve un triomphe aux artisans de ce spectacle curieux, surprenant et inventif. Red Waters ? Un opéra entre deux eaux, peut-être mais une œuvre de maintenant, sûrement.

Les artistes

Avec
Pauline Sikirdji, Olivier Lagarde, Jérôme Billy, Nicholas Isherwood, Mathilde Pajot : chanteurs et chanteuses
Sandy Den Hartog, Maëva Berthelot, Gabriela Ceceña : danseuses

Chœur de chambre Mélisme(s)
Orchestre National de Bretagne

Nicolas Agullo : Direction musicale

Arthur Nauzyciel : Mise en scène
Nicolas Agullo : Direction musicale
Damien Jalet : Chorégraphie
Marie Darrieussecq : Livret en français
Raphaël Haberberg : Assistanat à la mise en scène
Astrid Sweeney : Assistanat à la chorégraphie
Riccardo Hernandez : Décor
Scott Zielinski : Lumières
Gaspard Yurkievich : Costumes
Bertram Lerche : Masques
Pascal Doudemont : Conception et réalisation de «It»
Réalisation des décors : atelier de l’Opéra de Rennes

Opéra de Rennes
Représentation du vendredi 28 janvier 2022, 20h

Le programme

Red Waters
Musique et livret : Keren Ann Zeidel & Barði Jóhannsson (Lady & Bird)
D’après une idée originale de Keren Ann Zeidel, Barði Jóhannsson, Sjón

Nouvelle création 2022
Coproduction : Opéra de Rennes, Théâtre National de Bretagne, Orchestre National de Bretagne

Opéra de Rennes, représentation du vendredi 28 janvier 2022, 20h

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Keren Ann ZeidelMarie DarrieussecqArthur NauzycielNicolas AgulloDamien Jalet
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Romaric HUBERT

Licencié en musicologie, Romaric Hubert a suivi des études d’orgue, de piano, de saxophone et de chant. Il a chanté dans plusieurs chœurs réputés, ou encore en tant que soliste. Il est titulaire d’une certification qualifiante professionnelle d’animateur radio délivrée par l’Institut National de l’Audiovisuel, et a fait ses premiers pas au micro sur France Musique. Il a fondé la compagnie Les Papillons Electriques avec sa complice Jeanne-Sarah Deledicq et est co-créateur du site Première loge.

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