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Les festivals de l’été – Beaune  
Le Tartare et le Turc : Tamerlano de Vivaldi

par Nicolas Darbon 16 juillet 2024
par Nicolas Darbon 16 juillet 2024

©Ars Essentia

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@ Lucie Bolzan

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Il Tamerlano ovvero Il Bajazet d’Antonio Vivaldi en version de concert au 42e Festival international d’opéra baroque et romantique de Beaune, le samedi 13 juillet 2024, cour des Hospices. 

Il faut prendre plaid, pull, chandail pour passer une belle soirée dans la cour pavée de l’Hôtel Dieu. On vient aussi pour y admirer les tuiles vernissées sous les étoiles d’été… Les nombreux bénévoles vous accueillent avec gentillesse. L’acoustique est satisfaisante même si les toiles (en plastique)  de fond de scène du plateau n’amplifient pas le son. Il vaut mieux ne pas être trop loin si les chanteurs, notamment les contreténors, n’ont pas une puissance suffisante…

Ce soir, on y donne Tamerlano. L’opéra de Vivaldi évoque aussitôt aux aficionados de musique baroque le Tarmelano (1724) de Haendel, qui est, il faut bien l’avouer, plus subtil. L’opéra de Vivaldi est une succession réjouissante mais systématique de récitatifs, parfois accompagnés, suivis d’arie sans surprise, toutes rapides, avec de très rares ensembles vocaux. L’œuvre donnée à Vérone en 1735 répond à la mode de l’opéra napolitain faisant briller les castrats tels que Farinelli, qui demandaient des airs de bravoure, style concurrent que Vivaldi n’approuvait que modérément.

Le livret s’inspire d’une tragédie représentée à l’Hôtel de Bourgogne – à Paris – quatre ans après le Bajazet (1672), tragédie de Racine d’après un récit datant de 1412. La Sérénissime République du Prêtre Roux était alors en conflit avec les Turcs. De ce fait, la tendance est aux turqueries sur scène.

La situation précaire de Bajazet, ce sultan ottoman prisonnier des Tartares (dont l’empereur cruel est Tamerlan), a donc inspiré le compositeur exilé à Vérone. L’intrigue, bien entendu, emmêle les situations amoureuses suscitant des airs d’amour contrarié, de jalousie, de colère, des stratagèmes et autres poisons.

Irène aime Tamerlano, qui aime Asteria, qui aime Andronico (qui l’aime en retour). Mais Asteria a décidé d’accepter la demande en mariage de Tamerlano pour venger sa patrie et son père. Bajazet et Andronico ne sont pas au courant de cette ruse et croient à une trahison. Asteria finit par la révéler à son père. Ce dernier lui donne un poison pour échapper à Tamerlano, si nécessaire. Bajazet est condamné. Furieuse, Asteria use du poison contre Tamerlano… mais Irène prévient son fiancé, et le sauve. Le Tartare porte alors sur Irène un autre regard et se tourne à nouveau vers elle. Apprenant la mort de Bajazet, magnanime, le Tartare se montre clément en cédant Astéria à Andronico.

Sur le plan formel, l’œuvre est un pasticcio, autrement dit un patchwork d’airs déjà composés par Vivaldi pour d’autres opéras (acte I, scène 1 : L’Olimpiade ; I, 2 : Farnace ; I, 4 : L’Atenaide ; I, 8, II, 2, II, 5, II, 6 : Semiramide ; II, 8 : Motezuma ; II, 9, III, 1, III, 11: Farnace ; III, 8 : Rosmira fedele). Vivaldi utilise également des airs empruntés à des confrères de son époque, napolitains ou autres (I, 3, I, 10 : Giacomelli, Alessandro Severo et II, 7 : Merope ; I, 6, II, 4, III, 4 : Hasse, Siroe (magnifique) ; I, 9 : Broschi, Idaspe).

Musicalement, Vivaldi semble prendre plaisir à confier aux méchants (Tamerlano, Irène) le style lyrique napolitain ; aux gentils (Bajazet, Asteria) son style propre ; et aux autres (Andronico, Idaspe) un mélange des deux.

Le premier air (I, 1) « Del destin non dee lagnarsi » est confié à Bajazet, prince incarné par Bruno Taddia, baryton ténorisant aux jolis graves et à la voix agile. Sa présence scénique sera émouvante dans l’air de la furie qui précède son suicide, à la fin de l’opéra (III, 1, « Veder parmi, or che nel fondo »).

Le rôle d’Idaspe, confident d’Andronico, est tenu par Benedetta Mazzuccato, mezzo-soprano montrant dans « Nasce rosa lusinghiera » (I, 2) une technique sûre ; ce sont de belles vocalises, des « cocottes » (sur « nasce »), de grands intervalles (sur « cosi »). Même impression dans l’acte II (2), lorsqu’Idaspe compare les périls de l’amour à la mer démontée.

La première prestation de Tamerlano (I, 3, « In se torbida procella ») est un air de passion tempétueuse et virtuose, dans lequel le contreténor Filippo Mineccia montre beaucoup de présence ; sa voix bien timbrée et assez puissante use parfois de graves poitrinés qui ne sont pas dans la même ligne, cela sans nécessité sémantique.

C’est alors que survient l’air d’Andronico désespéré (I, 4, « Quel ciglio vezzosetto »), plutôt calme et syllabique… Ce n’est pas un rôle majeur, mais il faut avouer que la mezzo-soprano Marina de Liso surprend par sa voix pleine, ample, égale, aux couleurs vocales variées. Une voix somptueuse qui gagne directement les oreilles et le cœur.

La contralto Delphine Galou campe une Asteria agitée : comment aimer une âme qui vous angoisse ? Sur « crudel », ce sont de larges intervalles qui s’opposent à des vocalises étales sur « pace », révélant les beaux graves, le timbre chaleureux, la voix très douce et agile de Galou (« Amare un’alma ingrata, I, 9). Asteria est le personnage omniprésent – très habitée tout au long de l’œuvre, Galou passe habilement de la colère (II, 3) à la douceur (II, 6) ou encore à la fureur devant la mort (III, 6).

C’est le contraire d’Irène, aux apparitions assez rares mais marquantes. Ainsi son premier air (I, 11, « Qual guerriero in campo armato ») est-il d’une virtuosité époustouflante lorsqu’éclate sa fureur devant l’affront que lui fait Tamerlano. Ce rôle est dévolu à la soprano colorature Shaked Bar, à la technique sans défaut, d’une grande homogénéité vocale, au timbre clair et pur avec des graves assurés, et une voix assez puissante qui soulève les applaudissements du public.

L’Accademia Bizantina dirigée par Ottavio Dantone assume pleinement son rôle d’accompagnement souvent agité et figuraliste ; à retenir la sinfonia d’ouverture ou les très beaux passages sur l’air de Tamerlano (III, 4).

Ottavio Dantone, qui est un habitué du Festival, puisqu’il s’agit de sa 23e participation, tient à saluer une nouvelle fois son cofondateur, Kader Hassissi, qui nous a quittés en 2022, ainsi qu’Anne Blanchard, qui quittera ses fonctions de directrice cette année.

Cette longue soirée égrenant ses 22 airs pleins d’une vitalité toute vivaldienne… aura pleinement rassasié les amateurs de chant baroque grâce à une distribution cohérente et de qualité.

Les artistes

Bajazet : Bruno Taddia, baryton
Tamerlano : Filippo Mineccia, contre-tenor
Asteria : Delphine Galou, contralto
Irène : Shaked Bar, soprano
Andronico : Marina de Liso, mezzo-soprano
Idaspe : Benedetta Mazzuccato, soprano

Accademia Bizantina, dir. Ottavio Dantone

Le programme

Il Tamerlano, ovvero la morte di Bajazet [RV703]

Tragedia per musica en trois actes d’Antonio Vivaldi, livret d’ Agostino Piovene d’après Nicolas Pradon, Tamerlan ou la Mort de Bajazet, créé en 1735 au Teatro Filarmonico de Vérone durant le carnaval de 1735.

Festival de Beaune, concert du samedi 13 juillet 2024.

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Delphine GalouOttavio Dantonefilippo minecciaBruno Taddia
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Nicolas Darbon

Nicolas Darbon est maître de conférences (HDR) à Aix-Marseille Université. Avant sa carrière universitaire, il a été , il a été pendant plus de vingt ans professeur de musique en collèges-lycées. Spécialiste de la musique des XXe-XXIe siècles, il a organisé de nombreux colloques. Il coordonne le Groupe de recherche sur la musique (GRiiiM), encadre le Journal du GRiiiM et les journées d'études organisées aux Antilles. Parmi ses derniers livres Musique et Littérature en Guyane : explorer la transdiction, publié en 2018 chez Garnier Classiques ; ainsi que Les Musiques du chaos ; Dutilleux... du cristal à la nuée, Messiaen... les sons impalpables du rêve, Musica y Complejidad. Il contribue à l'Histoire de l'opéra français publié chez Fayard, à L'Avant-scène opéra, et rédige de nombreux articles sur l'opéra. Il est compositeur et président de Millénaire III éditions.

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