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CD : Johannes Brahms, Lieder & Duette (Harnisch, Viotti, Debus, Schultsz)

par Stéphane Lelièvre 8 novembre 2020
par Stéphane Lelièvre 8 novembre 2020
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Aimez-vous (les lieder de ) Brahms ? - Rachel Harnisch, Marina Viotti et Yannick Debus chantent des lieder et des duos de "Johannes Kreisler Junior"

 

 

 

 

 

 

Un superbe programme brahmsien, servi par quatre interprètes d’exception…

Est-ce parce qu’ils ne possèdent peut-être pas la spontanéité séduisante du premier, ou l’élan irrésistible du second ? Toujours est-il que les lieder de Brahms ne jouissent pas vraiment, auprès du grand public, de la même notoriété que ceux de Schubert ou de Schumann. Leur grande beauté est cependant depuis longtemps reconnue, et nombreux sont les enregistrements qui ont contribué à la révéler : entre autres nombreux artistes, Hans Hotter, Dietrich Fischer-Dieskau autrefois, ou, plus près de nous, Margaret Price, Jessye Norman, Anne Sofie von Otter, Bernarda Fink, Mathias Goerne ou Marie-Nicole Lemieux en ont proposé des gravures toutes séduisantes à divers égards.

Pourtant, le présent double CD retient l’intérêt et s’impose dans la discographie pour au moins trois raisons.

Le choix du programme, tout d’abord. Les artistes ont choisi de respecter l’ordre des opus, et les pièces proposées s’étendent de l’opus 3 n°1 (Liebestreu) à l’opus 107 n° 5 (« Mädchenlied »), offrant ainsi un panorama très complet de l’art du musicien dans le domaine vocal, permettant de mesurer l’évolution et la variété de son langage musical (les Kunstlieder, lieder cultivés et raffinés, de forme durchkomponierte – sans césures ni répétitions – y côtoient d’autres pages plus simples, d’inspiration populaire – les Volkslieder – construits selon une progression strophique), en mêlant certains incontournables (le Wiegenlied, les Zigeunerlieder, « Der Tod das ist die kühle Nacht », « Immer leise wird meine Schlummer »,…) à d’autres pièces plus rarement gravées ou moins souvent entendues au concert. Ainsi, si le Brahms à la densité et à la mélancolie souvent assez sombre, qui nous est familier, est bien présent, on (re)découvre également avec bonheur une veine plus légère, heureuse, juvénile, parfois même humoristique du musicien qui, comme le dit plaisamment Jan Schultsz dans la notice de présentation, n’a pas toujours été « le vieil homme sérieux à la barbe fournie » que nous donnent à voir ses derniers portraits.

 

 

Second motif de satisfaction : le choix du piano. À la fin de sa vie (de 1870 à 1897), Brahms jouait sur un superbe piano à queue construit par Johann Baptist Streicher en 1868. L’instrument (portant le numéro de série 6713) fut détruit pendant la seconde guerre mondiale. Récemment cependant, une réplique de cet instrument a été réalisée par le restaurateur et facteur de pianos américain Paul McNulty, lequel possède deux Streicher originaux.

 Ce n’est pas sur cette réplique que joue Jan Schultsz, mais sur un instrument d’époque, conçu par Streicher en 1871 et comparable à celui que possédait Brahms. Brahms était extrêmement attaché à cet instrument. En témoigne ce qu’il écrivait dans une lettre adressée à Clara Schumann : « C’est tout autre chose d’écrire pour des instruments dont on a vaguement en tête les caractéristiques et le son, que l’on ne peut se représenter que mentalement, et d’écrire pour un instrument que l’on connaît à fond comme je connais ce piano. Alors je sais exactement ce que j’écris et pourquoi je l’écris de telle ou telle façon. » Selon Jan Schultsz, la sonorité spéciale de ce piano mais aussi la technique interprétative très particulière du musicien (telle qu’on peut l’entendre, malgré un son très fantomatique, dans un enregistrement de 1899 – sur un cylindre Edison – où Brahms joue lui-même au piano la première des Danses hongroises) permettaient d’assurer au chanteur une parfaite intelligibilité.

Première Danse hongroise par Johannes Brahms (piano) – Cylindre Edison, 1889

De fait, la troisième raison rendant ce CD précieux est précisément l’extrême talent des interprètes, chanteurs et pianiste. La soprano Rachel Harnisch (qui a tout juste eu l’occasion, tout récemment, de faire applaudir son Emilia Marty de L’Affaire Makropoulos à Genève avant le Grand Théâtre ne soit contraint de fermer ses portes), la mezzo Marina Viotti (qui vient de nous accorder une interview) et le baryton Yannick Debus manifestent une attention au texte particulièrement remarquable : leur articulation très claire et idiomatique, leur diction naturelle et sans afféterie font qu’on ne perd pas une syllabe des poèmes, et que la fusion et la complémentarité de la poésie et de la musique, qui constituent le cœur même de ce genre artistique, sont constamment à l’œuvre.

Rachel Harnisch, Yannick Debus, Jan Schultsz, Marina Viotti

Yannick Debus (qui interprète les Lieder und Gesänge op. 32) est une très belle découverte : ce jeune baryton d’origine allemande possède une voix parfaitement saine et à la projection facile. Son timbre très clair ne l’empêche nullement de conférer aux pages interprétées toute la profondeur requise, par de subtiles variations de couleurs et une attention constante portée aux mots. Lors de notre rencontre en octobre dernier, Marina Viotti nous confiait son amour de la mélodie et du lied : elle se montre ici tout bonnement excellente, faisant valoir un timbre tantôt lumineux, tantôt profond, capable de rendre justice aux climats propres à chacun des lieder qui lui sont confiés, de la sauvagerie noire du premier chant tzigane à la légèreté du second, de la sérénité de « Feldeinsamkeit » à la fougue de « Rote Abendwolken », de la poésie délicatement ciselée de « Sapphischen Oden » à l’humour de  « Die Schwestern », qu’elle chante en duo avec la soprano. Notons d’ailleurs que la voix et l’art du chant de la mezzo se marient admirablement à ceux de Rachel Harnisch au timbre riche (dont la pulpe rappelle parfois la voix d’une Karita Mattila), disposant d’un panel de nuances dont elle joue à volonté, avec un goût toujours très sûr, dépourvu de tout maniérisme. Il va de soi que le maître d’œuvre Jan Schutsz dialogue avec ces trois artistes avec une musicalité et un sens de la poésie de tous les instants.

Un disque indispensable à tout amateur de Brahms… et de lieder ! 

Les artistes

Rachel Harnisch, soprano
Marina Viotti, mezzo-soprano
Yannick Debus, baryton


Jan Schultsz, piano

Le programme

Lieder et duos de Johannes Brahms

2CD (67:40 et 58:22) Panclassics, octobre 2020 (enregistré du 02 au 05 décembre 2019 à Zurich)

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Rachel HarnischMarina ViottiBrahmsLiederYannick DebusJan Schultsz
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

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