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Concerts d’automne à Tours – III : l’Ensemble Jacques Moderne fête son anniversaire aux Enfers pour le plus grand plaisir du public tourangeau

par Nicolas Le Clerre 30 octobre 2024
par Nicolas Le Clerre 30 octobre 2024

© Rémi Angeli / Concerts d’automne

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La Descente d’Orphée aux Enfers, Concerts d’automne, Tours, 20 octobre 2024

Pour conclure les IXe Concerts d’automne, Alessandro Di Profio a invité l’Ensemble Jacques Moderne à fêter son cinquantième anniversaire autour d’une partition rarement jouée de Marc-Antoine Charpentier. La fraicheur des artistes réunis sur la scène du Grand Théâtre de Tours donnerait envie de les suivre avec Orphée… jusqu’aux enfers !

Opéra de salon

De Marc-Antoine Charpentier, on connait évidemment le prélude du Te Deum (H.146) composé à Paris vers 1690 lorsqu’il était maitre de musique à l’église jésuite Saint-Louis, mais peu de mélomanes savent que quelques années plus tôt, en 1686-1687, il s’attela à la composition d’un petit opéra sur le mythe d’Orphée pour le salon parisien de sa protectrice, Mlle de Guise, parente du duc de Lorraine, et principale mécène de la capitale à un moment où Versailles et la Cour avaient capté la majeure partie de la création artistique française.

Grâce à la parfaite documentation de ce concert que Charpentier dirigea lui-même depuis le chœur où il interprétait le rôle d’Ixion, Joël Suhubiette a pu restituer sur le plateau du Grand Théâtre de Tours l’effectif exact – musiciens et chanteurs – de la création, ne s’autorisant pour seule fantaisie que d’y ajouter un théorbe.

La partition de La descente d’Orphée aux Enfers étant incomplète – les musicologues se disputent encore pour savoir si Charpentier avait le projet d’y ajouter un troisième acte pour mettre en musique la remontée infernale et l’épisode de la curiosité d’Orphée se retournant pour s’assurer qu’Eurydice est bien derrière lui – Joël Suhubiette a fait le choix d’intercaler entre les deux actes un large extrait de la cantate H471 que Marc-Antoine Charpentier a composée trois ans plus tôt sur un thème très proche. C’est l’occasion, explique-t-il en introduction au concert, d’entendre une lamentation poignante et l’une des plus belles pages vocales du grand goût ludovicien.

Enfin, de manière à fêter dignement le cinquantième anniversaire de l’Ensemble Jacques Moderne dont il a repris la direction à la suite de son fondateur Jean-Pierre Ouvrard, Joël Suhubiette a passé commande au compositeur Patrice Burgan d’un madrigal sur le 14e sonnet de la poétesse lyonnaise Louise Labé dont on commémore par ailleurs en 2024 le 500e anniversaire de la naissance. Méditation sur la mort et la séparation, ce poème de quatorze alexandrins fait merveilleusement écho au mythe orphique et complète idéalement le programme d’un concert savant, hors des sentiers battus.

Grand goût français

Si la salle du Grand Théâtre de Tours est incontestablement plus vaste que le salon de Mlle de Guise dont la résidence parisienne s’élevait au Grand Siècle à l’emplacement de l’actuel hôtel de Soubise, rue des Francs-Bourgeois, dans le Marais, ce n’est en rien un handicap pour les musiciens de l’Ensemble Jacques Moderne dont les sonorités capiteuses emplissent le théâtre dès les premiers accords de l’ouverture. La ritournelle qui ouvre le drame d’Orphée est d’ailleurs immédiatement l’occasion d’apprécier des cordes primesautières sans être astringentes, ainsi qu’un solide et majestueux continuo, les flutes délurées de Marine Sablonnière et Matthieu Bertaud pimentant délicieusement la simplicité du dispositif.

Du centre de la scène, Joël Suhubiette assure une direction de bon père de famille, ferme et bienveillante, attentive au confort des chanteurs comme aux chatoyances d’un orchestre qui respire le grand goût français avec un naturel confondant. Sans baguette mais le poignet ferme, le chef modifie un tempo, souligne un point d’orgue et temporise un crescendo pour donner à entendre un Charpentier juvénile, dégraissé de toute lourdeur baroque.

Côté chanteurs, le ténor américain Robert Getchell livre une interprétation très expressive du personnage d’Orphée. Doué d’une vraie voix baroque qui ferait également merveille dans le répertoire ramiste, il s’avère capable de nuances subtiles et sait trouver des accents bouleversants, notamment dans l’extrait de la cantate Orphée descendant aux Enfers intercalée entre les deux actes de l’opéra de salon.

Cantonnée au premier acte, Julia Wischniewski est une Eurydice élégiaque, amoureuse bien chantante jusqu’à ce qu’elle succombe à la piqure du serpent le jour de ses noces avec Orphée. C’est cependant Anne-Sophie Honoré qui lui ravit la vedette en composant une Proserpine aguicheuse, souveraine en ses Enfers. Sa prononciation du français est impeccable, l’instrument est idéalement projeté et le timbre séduit par ses éclats de métal en fusion.

S’il ne dispose que d’une courte intervention en fin de premier acte, Thierry Cartier impressionne très favorablement lui-aussi par le velours de la voix et les couleurs sombres de son timbre barytonnant. Ces atouts donnent à son Apollon – figure paternelle soucieuse de la gloire immortelle de son fils Orphée – une autorité naturelle sous laquelle affleure une belle sensibilité de divinité déconstruite.

Dans les ensembles, la douzaine de chanteurs réunis sur le plateau par Joël Suhubiette forment un chœur homogène et complice, d’une richesse de timbres conséquente. Cette complémentarité des voix est particulièrement mise en valeur par le madrigal composé par Patrick Burgan et chanté au cœur du concert, entre les deux actes de La descente d’Orphée aux Enfers. Si l’écriture alanguie, presque dissonante, peut déplaire et paraitre hors-sujet dans l’écrin que dessine autour d’elle la musique savante de Marc-Antoine Charpentier, l’exercice reste l’occasion d’harmoniser entre elles un ensemble de voix qui prennent un plaisir évident à produire du beau son toutes ensembles.

Au rideau final, le public tourangeau ne ménage pas ses applaudissements à tous les artistes de l’Ensemble Jacques Moderne et entonne timidement la mélodie « Joyeux anniversaire » jusqu’à être repris et soutenu par les chanteurs du plateau.

On sait gré à Alessandro Di Profio d’avoir su composer le dernier weekend des Concerts d’automne 2024 de manière aussi hétérodoxe et surprenante : entendre tour à Tours un sopraniste sud-américain chanter Vivaldi, une spécialiste de Monteverdi défendre la ruralité argentine et un orchestre quinquagénaire fringant comme un jeune homme fait tout le prix de ces rencontres automnales et donne diablement envie à Première loge de revenir assister à la Xe édition de ces beaux moments de musique partagés en bord de Loire.

Les artistes

Ensemble Jacques Moderne
Concerto Soave
Direction : Joël Suhubiette
Orphée : Robert Getchell
Eurydice : Julia Wischniewski
Pluton : Matthieu Heim
Proserpine : Anne-Sophie Honoré
Apollon : Thierry Cartier
Nymphes, bergers, fantômes et habitants des Enfers : Cécile Dibon-Lafarge, Cyrille Lerouge, Margot Mellouli, Cyprile Meier, Vincent Lièvre-Picard, Marc Manodritta, François-Olivier Jean, Cyrille Gautreau
Clavecin et orgue : Jean-Marc Ayme
Violes de gambe : Christine Plubeau, Flore Seube, Juliette Guichard
Violons : Frederica Basilico, Simon Pierre
Flûtes à bec, traverso: Marine Sablonnière, Matthieu Bertaud
Luth / théorbe : Diego Salamanca

Le programme

Marc-Antoine Charpentier (1643-1704)
La descente d’Orphée aux Enfers (H488)
Opéra de chambre en deux actes pour neuf voix, composé fin 1686 pour la duchesse de Guise.
Orphée descendant aux Enfers (H471)
Cantate composée en 1683.

Patrick Burgan (1960)
Complainte
Madrigal sur le sonnet XIV de Louise Labé. Création mondiale.

Grand Théâtre de Tours, concert du dimanche 20 octobre 2024.

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Julia WischniewskiJoël SuhubietteMatthieu HeimEnsemble Jacques ModernePatrice BurganRobert GetchellAnne-Sophie HonoréThierry Cartier
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Nicolas Le Clerre

C’est un Barbier de Séville donné à l’Opéra National de Lorraine qui décida de la passion de Nicolas Le Clerre pour l’art lyrique, alors qu’il était élève en khâgne à Nancy. Son goût du beau chant le conduisit depuis à fréquenter les maisons d'Opéra en Région et à Paris, le San Carlo de Naples, la Semperoper de Dresde ou encore le Metropolitan Opera de New-York. Collectionneur compulsif de disques, admirateur idolâtre de l’art de Maria Callas, Nicolas Le Clerre est par ailleurs professeur d’Histoire-Géographie, Président de la Société philomathique de Verdun, membre de l'Académie nationale de Metz et Conservateur des Antiquités et Objets d'Art de la Meuse.

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