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Un Orfeo en demi-teintes pour la réouverture de l’Opéra Comique…

par Joseph Antonios 8 juin 2021
par Joseph Antonios 8 juin 2021
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Crédit photos : © Stefan Brion

Réouverture de l'Opéra Comique avec L'Orfeo de Monteverdi dirigé par Jordi Savall

La première de l’Orfeo de Monteverdi à l’Opéra Comique ce vendredi 4 juin 2021 était très attendue : Jordi Savall, référence de la musique baroque, dirigeait dans la fosse son orchestre Le Concert des Nations, et sur scène, plusieurs spécialistes de la musique de Monteverdi ainsi que le chœur qu’il a fondé, La Capella Reial de Catalunya, la mise en scène de cette nouvelle production ayant été confiée à la talentueuse Pauline Bayle. Mais la magie portée par cette « fable en musique » historiquement et musicalement extraordinaire ne fut pas tout à fait au rendez-vous…

Mettre en scène l'Orfeo : une tâche délicate

Il est assurément délicat de mettre en scène l’Orfeo. Ici, la direction d’acteurs a indéniablement été travaillée avec rigueur, elle s’avère pourtant souvent inaboutie. Certaines images sont plutôt belles, des idées sont ébauchées (à travers les chorégraphies, les costumes, les accessoires, les éléments de décors évoquant la nature) mais elles ne font que rarement mouche. Le travail de Pauline Bayle est assurément investi, mais le résultat ne touche ni ne convainc vraiment, sans doute parce que l’on a parfois un sentiment de déjà-vu (les parterres de fleurs artificielles que les chanteurs et danseurs posent et enlèvent plusieurs fois par exemple). L’option choisie d’une absence du moindre artifice technique est tout à fait pertinente puisque l’Orfeo fut créé en 1607 d’une part, dans un salon du palais du Duc de Mantoue d’autre part ; pourtant, l’épure ne sert ici pas la magie du mythe d’Orphée.

Une distribution inégale

Dans la présente production, le rôle d’Orfeo nous paraît un peu surdimensionné pour Marc Mauillon. Il nécessite en effet une grande endurance vocale et physique : à partir du troisième acte, Orphée est omniprésent sur scène et doit faire preuve de prouesses aussi bien théâtrales (nombreux changements d’états) que vocales (longs et exigeants récitatifs). Même si la tessiture est centrale, elle requiert sans cesse de pouvoir assurer des aigus après avoir chanté longtemps dans le grave, et vice versa. Et d’un point de vue scénique, Orphée doit être sûr de lui-même, de son talent immense ; il est audacieux, orgueilleux pourrait-on dire (il est conscient de sa capacité à émerveiller les hommes, les animaux, la nature, et même… les Dieux), du moins jusqu’à ce qu’il perde Eurydice pour la deuxième fois. Il révèle dès lors sa fragilité, son humanité.
Or Marc Mauillon est assurément un aède, un très sensible musicien. Il est un conteur, un narrateur qui excelle entre autres dans la musique du Moyen-Âge, ou dans la musique française du tout début du 17e siècle :

 

"Loyauté que point ne delay"
Guédron : "Aux plaisirs, aux délices bergères", Les Arts Florissants

Mais il n’est, pour autant, pas tout à fait un Orfeo. Sa présence scénique manque parfois d’assurance, de force de conviction, d’entièreté. Son jeu, est humble et parfois touchant, mais il n’est pas dans la démesure, l’hybris qui devrait être celle du personnage jusqu’à la fin du quatrième acte. Le moment crucial de l’œuvre où il se retourne (trop tôt !) vers Eurydice apparaît presque anecdotique : le personnage paraît alors désincarné, et le spectateur a dès lors du mal à mesurer l’immensité de la perte et la tristesse qui s’ensuit.
Monterverdi disait lui-même préférer un bon acteur capable de chanter plutôt que le contraire. Mais d’un point de vue strictement vocal, on perçoit un peu de fatigue (et quelques soucis d’intonation, pourtant rares, en général, chez Marc Mauillon) au fil des actes, fort exigeants jusqu’à la fin de l’œuvre.

Le reste du plateau vocal présente quelques beaux atouts : Sara Mingardo (La Messagère) possède de beaux graves et une grande expérience de ce rôle, Salvo Vitale (Charon / Hadès) tient parfaitement son double rôle même si son grave manque parfois de puissance et Furio Zanasi, qui fut un magnifique Orfeo, campe ici un tout aussi magnifique Apollon, père d’Orphée, deus ex-machina venant résoudre tous les problèmes. Lorsqu’il apparaît à la fin du cinquième acte, la voix solaire, le style et l’expérience de ce dernier nous transportent immédiatement. Lise Viricel (une nymphe) assure aussi parfaitement le rôle.
Enfin, concernant les solistes : notre coup de cœur va au ténor Alessandro Giangrande (un berger / esprit), dont la voix, l’expressivité et la présence scénique sont d’une grande justesse.

Le chœur convainc lui aussi, même s’il pourrait gagner en puissance et en précision grâce à une plus grande fusion des voix.

La lecture brillante de Jordi Savall

Reste donc la musique du génial Claudio Monteverdi, qui anticipe les extraordinaires Vêpres de la Vierge (1610), où l’on retrouvera de nombreuses idées (spatialisation, échos) ou passages réarrangés (ouverture, duos ou trios de bergers qui donneront le fameux Duo Seraphim), et mêle savamment la prima prattica (où, pour simplifier, prime l’harmonie) et la seconda prattica (où prime la mélodie).
Et en ce sens, l’interprétation proposée par Jordi Savall fonctionne à merveille : sa profonde connaissance de la partition rend l’interprétation simple, évidente, sans fioriture. Les contrastes (changements de dynamiques et de tempi) pourraient être plus importants, plus « baroques », mais l’orchestre composé de fidèles du Concert des Nations (beaucoup d’instrumentistes étaient présents lors de la production de 2002 au Liceu de Barcelone) propose une version patinée et totalement convaincante.

Musicalement donc, aux réserves près exprimées ci-dessus, l’Orfeo de l’Opéra Comique mérite le détour ! Il est de toute façon toujours très émouvant d’entendre l’une des œuvres dont l’influence, sur toute la musique occidentale, est aujourd’hui encore immense…

Pour finir, nous vous suggérons trois versions qui ont fait date depuis la fin des années 1970 :

Harnoncourt – Ponnelle – 1978 – Opernhaus de Zurich
Savall – Deflo– 2002 – Théâtre du Liceu de Barcelone
Gardiner – Rooke (mise en espace) – 2017 – Teatro La Fenice de Venise
Les artistes

Orfeo   Marc Mauillon
Apollo   Furio Zanasi
Caronte/Plutone   Salvo Vitale
Pastore I /Spirito II   Victor Sordo
Pastore II /Spirito IV   Gabriel Diaz
Pastore III /Spirito I /Eco   Alessandro Giangrande
Pastore IV/Spirito III   Yannis François
Musica/Euridice   Luciana Mancini
Messaggera   Sara Mingardo
Speranza/Proserpina   Marianne Beate Kielland
Ninfa   Lise Viricel
Danseurs Yannick Bosc, Loïc Faquet et Xavier Perez

Orchestre Le Concert des Nations, ChœurLa Capella Reial de Catalunya, dir. Jordi Savall
Mise en scène   Pauline Bayle

Le programme

L’Orfeo, favola in musica

Opéra en 5 actes avec Prologue de Claudio Monteverdi, livret d’Alessandro Striggio, créé à Mantoue, Palazzo Ducale, Accademia degl’Invaghiti, 24 février 1607.

Paris, Opéra Comique, vendredi 4 juin 2021

 

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Joseph Antonios

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