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DON PASQUALE à la Scala : la joyeuse profondeur d’un spectacle bouffe

par Marc Dumont 1 juin 2024
par Marc Dumont 1 juin 2024

© Brescia e Amisano – Teatro alla Scala

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La Scala de Milan propose un spectacle parfaitement réussi, drôle mais aussi profond car les manigances du barbon Don Pasquale débouchent sur une réflexion sur le temps qui passe et la solitude de la vieillesse.

Photo Marc Dumont

Du 9 mai au 4 juin, La Scala de Milan propose un spectacle parfaitement réussi, drôle et profond à la fois.

Drôle, parce que le sujet de cet opera buffa n’engendre pas la mélancolie par ses situations ni par sa musique. Profond, car le barbon Don Pasquale est aussi ridicule que touchant, et que ses manigances pour épouser une jeunette débouchent de fait sur une réflexion sur le temps qui passe et la solitude de la vieillesse – ce que la mise en scène, s’appuyant sur des décors dans les tons gris-noir, ne fait que souligner.

Car Davide Livermore fourmille d’idées et fait tourner la tête au premier acte par ses inventions multiples. Dès l’ouverture, nous voici plongés dans les sombres souvenirs familiaux de Don Pasquale. Tout commence par les funérailles de sa mère, dont la présence, tout au long de sa vie, a été particulièrement castratrice. On le voit tour à tour enfant empêché de jouer avec une petite fille, adolescent interdit de flirter, et adulte empêché d’épouser. Les saynètes sont irrésistibles, drôles… et pathétiques à la fois. Car ce passé défile sous le portrait de la mère qui nous suivra durant toute la représentation, jusqu’à la victoire finale de celle qui jubile post-mortem. Le ton est donné : oui, il s’agit d’opéra bouffe, mais ce décor si sombre, ce prologue doux-amer si explicite ouvrent des abîmes mélancoliques.

Composé en onze jours, créé à Paris en 1843, Don Pasquale emprunte au traditionnel modèle des comédies bouffes, avec un riche septuagénaire célibataire en mal de mariage refusant que son neveu et seul héritier, Ernesto, épouse une jeune veuve sans fortune, Norina. Afin de se donner un héritier, il décide donc de se marier et charge son ami Malatesta de lui trouver une femme. Bien sûr, rien ne se passe comme souhaité puisque Malatesta prend fait et cause pour les amoureux, et présente à Don Pasquale celle qu’il fait passer pour sa sœur mais qui n’est autre que Norina. Un faux mariage est organisé, Ernesto en étant le témoin averti. Et immédiatement, la timide et soumise épouse se transforme en virago dépensière et infernale. Dès lors, comment s’en débarrasser ? D’autant que la belle est surprise dans un rendez-vous amoureux arrangé par Malatesta. Le divorce est la seule voie, ce qui est d’autant plus simple que le mariage était un faux. Pour sortir de ce cauchemar domestique, Don Pasquale est soulagé d’accorder la main de Norina à son neveu.

Un décor tournant efficace, des costumes d’aujourd’hui, des lumières subtilement réglées : tout a concouru à la réussite d’une partition menée avec entrain et maestria par un habitué de ce répertoire, le chef Evelino Pido. Il a insufflé un sens de la phrase lyrique, des saveurs bouffes avec une précision au cordeau et une ardeur ravageuse dans les ensembles. La mise en place des moments les plus délicats a été impressionnante de virtuosité : le finale échevelé du second acte, avec ses effets vocaux alla Rossini, fut un grand moment, tout comme le duo délirant du troisième acte entre Don Pasquale et Malatesta (« Chetti, cheti, immantimente »), d’une précision à couper le souffle et propre à déchaîner les applaudissements enthousiastes. L’orchestre de la Scala en grande forme donna une réplique tour à tour endiablée et poétique, drôle et tendre, aux cinq chanteurs et les chœurs ont excellé dans leurs interventions.

Le baryton Ambrogio Maestri incarne un Don Pasquale naïf, touchant et finalement bouleversant au dernier acte. Connu pour son interprétation de Falstaff (un rôle qu’il incarnera la saison prochaine sur cette même scène, voir notre présentation de la saison), il donne au côté bouffe du personnage une vraie profondeur. Son air « E finita Don Pasquale » fit entendre l’effarement d’un vieux barbon comprenant dans quel traquenard il est tombé, et, plus encore, combien son temps est fini, chantant, halluciné « il ne te reste rien d’autre que d’aller te noyer ».

Le beau timbre d’Andrea Carroll convient parfaitement au rôle épicé d’une Norina en fausse ingénue, jeune fille écervelée, manipulatrice, joueuse – perverse ? La soprano s’adapte parfaitement au personnage dessiné par la mise en scène. Sa cavatine « So anch’io la virtu magica » du premier acte enchante par sa fraicheur et son duo avec Malatesta est le clou du spectacle, par son feu d’artifice vocal comme par le moment le plus drôle de la mise en scène. Lorsqu’elle demande à Malatesta si elle doit être fière, triste ou simplette, on assiste à un élégant défilé de mode où chaque mannequin porte un cartel précisant « fière, triste ou simplette ». Seule femme au milieu de ces quatre rôles masculins, sa voix légère de soprano a cependant parfois du mal à occuper tout l’espace scénique.

Le Malatesta de Mattia Olivieri  impressionne par son aisance vocale et par son jeu de scène, dans un rôle qui se trouve sans cesse en duo ou au sein d’un ensemble. Touchant dans son air « Bella Si come un angelo », présentant sa fausse sœur à Don Pasquale, il fut vibrillonnant dans la scène du mariage, aux côtés du notaire halluciné du baryton Andrea Porta.

Habitué du répertoire bel cantiste, excellant depuis des années dans les partitions rossiniennes[1], le ténor Lawrence Brownlee apporte ici une présence tourmentée dans son grand air du second acte, superbement introduit et accompagné par la trompette soliste « Povero Ernesto… Cerchero lontana terra… ». Au troisième acte, la célèbre sérénade d’Ernesto « Com’è gentil » (reprenant le thème annoncé dans l’ouverture) fut un pur moment de tendresse.

Photo Marc Dumont

Ce fut donc un beau spectacle scaligère, dont on regrettera que l’invention et le grain de folie de la mise en scène du premier acte ne tienne pas toutes ses promesses dans le reste de l’œuvre.

———————————————————–

[1] En juin, il sera Ramiro dans la Cenerentola de Munich et Tonio dans La fille du régiment de Donizetti à l’Opéra Bastille en octobre prochain.

Retrouvez ici le baryton Mattia Olivieri en interview !

Les artistes

Don Pasquale : Ambrogio Maestri
Norina : Andrea Carroll
Ernesto : Lawrence Brownlee
Malatesta : Mattia Olivieri
Un notaire : Andrea Porta

Orchestre de la Scala, dir. Evelino Pido
Mise en scène : Davide Livermore
Costumes : Gianluca Falaschi
Décors : Davide Livermore et Gio Forma
Lumières : Nicolas Bovey
Vidéo : D-Wok

Le programme

Don Pasquale

Opéra bouffe en trois actes de Gaetano Donizetti, livret de Giovanni Ruffini, créé au Théâtre-Italien de Paris le 3 janvier 1843.
Milan, Teatro alla Scala, mai 2024

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Lawrence BrownleeDavide LivermoreMattia OlivieriAmbrogio MaestriAndrea CarrollEvelino Pido
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Marc Dumont

Passionné par l’Histoire et la Musique, Marc Dumont a présenté des centaines de concerts et animé de multiples émissions à Radio France de 1985 à 2014. Il se consacre à des conférences et animations, rédige actuellement un livre où Musiques et Histoire se croisent sans cesse, et propose des « Invitations aux Voyages », qui sont des rencontres autour de deux invités, en vidéo.

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