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GUERCŒUR de Magnard à l’Opéra du Rhin : une résurrection à marquer d’une pierre blanche !

par Florent Coudeyrat 29 avril 2024
par Florent Coudeyrat 29 avril 2024

© Klara Beck

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Personnalité fascinante à plus d’un titre, le compositeur français Albéric Magnard (1865-1914) n’a pas fini de déclencher les passions : sa mort tragique pour avoir voulu défendre son manoir coûte que coûte face aux soldats allemands, au début de la Première guerre mondiale, le fit alors connaitre au plus grand nombre en tant que martyr patriotique. Malgré cette publicité inédite, sa musique est toujours restée l’apanage de ses rares soutiens et admirateurs, il est vrai rafraichi par un caractère farouchement indépendant et abrupt, hors de toutes modes et coteries. De nos jours, ses ouvrages lyriques comme ses quatre symphonies restent inexplicablement absentes des programmes de concert, là où le disque a été heureusement plus disert, depuis les gravures réalisées par Michel Plasson pour EMI à la fin des années 1980.

La création tardive de son deuxième opéra Guercoeur, son ouvrage le plus monumental (d’une durée d’environ trois heures), n’intervint qu’en 1931, soit trente ans tout juste après sa composition. On y découvre une musique toujours impressionnante par sa hauteur de vue, évitant soigneusement toute facilité, que ce soit au niveau mélodique ou dans la coloration orchestrale : un souffle majestueux s’épanouit en un flot continu, digne de son modèle avoué, Wagner. Si Magnard s’est également autorisé à écrire lui-même son livret, tout en ayant aussi recours aux leitmotivs, son langage reste d’une clarté toute française, en lien avec l’admiration pour les ainés Franck, Chausson ou d’Indy (son professeur le plus marquant). On ne trouve en revanche aucune trace des dentelles de son contemporain Debussy, Magnard restant attaché à un accompagnement plus opulent en comparaison, principalement conduit par les cordes, ainsi qu’à une déclamation proche de la tragédie lyrique héritée de Gluck jusqu’à Berlioz.

A l’instar de son dernier ouvrage lyrique Bérénice, monté à Tours en 2014 pour célébrer le centenaire de la mort du compositeur, Guercoeur n’évite pas un certain statisme de l’action, du fait de son livret en grande partie philosophique. Point de départ inédit, l’opéra débute par une confrontation entre la Vérité, une sorte de divinité laïque, et son héros défunt, insatisfait de son passage trop court sur terre. Une fois autorisé à quitter ce «purgatoire», Guercoeur retourne sur terre deux ans après sa mort, pour constater qu’aucune des graines semées n’a germé : sa femme Giselle a déjà trouvé le réconfort dans les bras de son meilleur ami Heurtal, tandis que ce dernier est devenu un traitre à la cause politique commune, acquise jadis à la démocratie. Le peuple lui-même le déçoit par sa versatilité, de son refus de prendre son destin en main à l’emballement pour les promesses vertigineuses du dictateur Heurtal. Revenu auprès de la Vérité, Guercoeur trouve finalement l’apaisement en écoutant son message d’espérance pour bâtir un monde meilleur, progressivement débarrassé des petitesses et égoïsmes nationaux, par l’effort de chacun.

Autour de ce livret ambitieux, Magnard fascine par sa capacité à ciseler chacun de ses tableaux d’une atmosphère toujours renouvelée, entre les ambiances éthérées du premier acte, avec le chœur énigmatique en sourdine en coulisses (admirable Chœur de l’Opéra national du Rhin, très bien préparé pour l’occasion), aux tendresses éperdues de Giselle, d’un lyrisme très émouvant, au début du II. Que dire, aussi, de la vigueur rageuse des choeurs à la fin du même acte (le plus long), avant le tout dernier, irisé du chant radieux des cordes, pour offrir un tapis velouté et idéal aux interprètes. Tout amoureux de l’orchestre ne peut qu’être à la fête ici, tandis que les amateurs de lyrique se régalent des parties plus proches de l’oratorio profane.

Il faut dire qu’un maître est dans la fosse en la personne d’Ingo Metzmacher, qui fait là ses débuts à l’ONR. Sa direction souple et féline évite toute lourdeur en adoptant des tempi assez vifs, d’un équilibre souverain avec le plateau. Et quel plateau réuni ! On ne pouvait imaginer meilleur interprète du rôle-titre que Stéphane Degout, toujours aussi impressionnant de facilité dans la puissance maitrisée, au service d’une prestation de grande classe, entre prononciation idoine et attention au sens. On retrouve de semblables qualités chez Catherine Hunold, malheureusement desservie par des aigus peu justes dans les piani. On lui préfère le chant homogène sur toute la tessiture d’Antoinette Dennefeld, par ailleurs très convaincante au niveau dramatique. En dehors d’une émission parfois nasale, Julien Henric touche au but par sa force d’incarnation, en lien avec le caractère de son personnage, tandis que les seconds rôles se montrent idéalement distribués. Ces derniers sont dominés par la superlative Souffrance d’Adriana Bignagni Lesca, qu’on espère entendre dans un rôle plus étoffé encore à l’avenir.

La mise en scène toute de sobriété Christof Loy (déjà applaudi ici-même en 2022 pour la production d’une autre rareté, Le Chercheur de trésors de Franz Schreker) joue sur son habituel minimalisme au niveau des décors, pour se concentrer sur la direction d’acteurs, très précise. Le natif d’Essen oppose les mondes céleste et terrestre, figurés respectivement en noir et blanc, tout en intercalant entre les deux un paysage idyllique de Claude Lorrain, coincé comme une parenthèse évocatrice du rêve d’un monde meilleur. De quoi annoncer dès le début du II les espoirs ambivalents de Guercoeur (comme un double de Magnard), hésitant entre renonciation au monde et volonté de prendre part à son amélioration, avant sa transfiguration finale auprès de la Vérité. Si le travail tout d’élégance de Loy permet de se concentrer sur le message d’édification morale de l’ouvrage, il reste toutefois en deçà dans les passages symphoniques, où il aurait pu oser davantage au niveau visuel.

Quoi qu’il en soit, cette résurrection est à marquer d’une pierre blanche, ce qui conduit à saluer la curiosité et la persévérance d’Alain Perroux (directeur général de l’Opéra national du Rhin depuis 2020) pour valoriser les répertoires les plus méconnus et stimuler la curiosité des publics. Les partenariats avec France Musique et Arte permettront au plus grand nombre de découvrir ou redécouvrir ce spectacle, en audio ou en digital, avant une commercialisation en DVD prévue par l’éditeur Bel Air Classiques.

Les artistes

Guercœur : Stéphane Degout
Vérité : Catherine Hunold
Giselle : Antoinette Dennefeld
Heurtal : Julien Henric
Bonté : Eugénie Joneau
Beauté : Gabrielle Philiponet
Souffrance : Adriana Bignagni Lesca
L’Ombre d’une femme : Marie Lenormand
L’Ombre d’une vierge : Alysia Hanshaw
L’Ombre d’un poète : Glen Cunningham

Orchestre philharmonique de Strasbourg, dir. Ingo Metzmacher
Chœur de l’Opéra national du Rhin, dir. : Hendrik Haas

Mise en scène : Christof Loy
Scénographie : Johannes Leiacker
Costumes : Ursula Renzenbrink
Lumières : Olaf Winter

Le programme

Guercoeur

Opéra d’Albéric Magnard, livret du compositeur, composé entre 1897 et 1901, puis créé le 23 avril 1931 à Paris.
Opéra national du Rhin à Strasbourg, représentation du dimanche 28 avril 2024.

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Catherine HunoldAntoinette DennefeldJulien HenricChristof LoyStéphane DegoutIngo Metzmacher
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Florent Coudeyrat

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