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À la Staatsoper de Berlin, une TURANDOT-marionnette !

par Renato Verga 10 juillet 2022
par Renato Verga 10 juillet 2022

© Matthias Baus

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À la Staatsoper de Berlin, Zubin Metha remet Turandot sur le métier, dans une production (signée Philipp Stölz) où la princesse de glace est en réalité une gigantesque marionnette…

En 1972, Zubin Mehta a fait entrer un enregistrement de Turandot dans l’histoire de l’interprétation musicale. Le directeur indien est revenu plusieurs fois sur le dernier opéra de Puccini, comme dans le spectacle monté dans la Cité interdite par Zhang Ymou (1998), puis en 2007 avec un autre metteur en scène chinois, Chen Kaige. À 86 ans, à la Staatsoper de Berlin, il descend une fois de plus dans la fosse d’orchestre pour sa lecture du chef-d’œuvre inachevé et fait comprendre à quel point Turandot est une somme 

de la musique de son époque – Strauss, Stravinsky, Prokofiev, Ravel… – mais avec le temps l’impact sonore de sa direction, déjà remarquable à l’époque, a pris une opulence hollywoodienne : la recherche de contrastes de couleurs est poussée à l’extrême, le polissage sonore est éblouissant, mais la transparence de certaines pages lunaires et à la densité sonore raréfiée fait en revanche défaut.
Turandot est le seul opéra à pouvoir s’achever de quatre manières différentes : en interrompant la représentation après la dernière note écrite par Puccini, en utilisant le finale moderne de Berio, ou les deux finales d’Alfano, dont l’un est particulièrement grandiloquent : c’est la solution choisie par Mehta.

Si l’orchestre brille, il couvre les voix et force le chœur à atteindre un niveau sonore impressionnant, un concours de décibels que le public berlinois semble toutefois apprécier au même titre que ceux prodigués à profusion par les deux principaux protagonistes. Elena Pankratova, qui remplace Anna Netrebko initialement prévue, qui n’est plus invitée par le théâtre pour les raisons que l’on sait – il aurait pourtant été curieux d’entendre la chanteuse russe dans un opéra où un État autoritaire opprime son peuple avec violence et de façon arbitraire, et où le bourreau s’appelle « Poutine »-Pao… – est une machine à aigus tranchants comme des lames et à l’expression glaciale. Le ténor turc Murat Karahan (qui alterne dans les représentations avec Yusif Eyvazov) est encombré d’une diction presque incompréhensible, composée uniquement de consonnes et de sons flous dans le registre médian. Son Calaf, comme c’est souvent le cas, privilégie le registre élevé de la tessiture avec des notes aiguës fermes et confiantes, mais en-deçà desquelles on n’entend pas grand-chose…. Comme prévu, son « Nessun dorma » est très applaudi. Ce n’est pas le cas de Liù, un rôle qui n’est sans doute pas le mieux adapté à la voix d’Olga Peretyatko : il ne suffit pas de dessiner une belle ligne de chant et de posséder les bonnes notes, Liù doit aussi être capable d’émouvoir, ce que ne permettent pas le timbre métallique et l’expression froide de la soprano russe. Le vieux Timur trouve en René Pape un interprète efficace et vocalement encore autoritaire, ce que l’on ne peut pas dire en revanche de l’Altoum de Siegfried Jerusalem dont l’âge est proche de celui de l’empereur chinois ; il paraît cependant tout à fait inapproprié de manifester sa désapprobation comme certains spectateurs l’ont fait… Du groupe des trois ministres émerge clairement le baryton Gyula Orendt, un Ping de luxe, pour son beau timbre et sa vivacité expressive.

Comme le Hoffmann des Contes d’Offenbach, Calaf tombe ici amoureux d’une poupée, ou plutôt d’une marionnette, qui a les traits de la princesse Turandot. Comme sur la scène aquatique de Bregenz de Rigoletto l’année dernière, Philipp Stölz et la scénographe Franziska Harm construisent une énorme figure tirée  par des fils, qui encombre presque toute la scène, une figure vénérée par le peuple : un fétiche religieux, une divinité à laquelle on fait des sacrifices humains. En réalité, un instrument de domination et d’oppression du peuple puisque nous ne sommes pas dans la Chine millénaire de la fable de Gozzi, mais dans une dictature orientale où tout le monde porte un uniforme gris.

Dans l’opéra, Turandot ne chante qu’au milieu du deuxième acte. Jusque-là, il n’y a que la géante poupée sur scène, sous la jupe de laquelle s’ouvre la salle de torture. La méga-marionnette commence à se déconstruire à chaque bonne réponse de Calaf : elle perd d’abord sa perruque, puis le masque couvrant le crâne grimaçant de cette sorte de Moloch. La marionnette/Turandot est alors transformée en une arachnide terrifiante gardant une montagne de crânes. La vraie Turandot est emprisonnée dans les barreaux de la jupe à crinoline et elle aussi a perdu sa perruque, présentant des traits dont il est difficile d’imaginer qu’ils puissent susciter une fascination amoureuse… En fait, Calaf continue d’être désespérément épris du visage blanchi du masque et de sa bouche en forme de cœur, à tel point que la princesse s’empoisonne et meurt, sans qu’on sache  si c’est en raison de son honneur perdu, de son orgueil blessé, ou de dépit de se voir préférer une marionnette : elle expire dans les bras du prince inconnu, enfin mu par la pitié.
L’aspect surréaliste et symbolique de l’histoire constitue pour Stölzl comme la clé de lecture de cet opéra. Réalisateur de cinéma avant tout, c’est à la dimension picturale du spectacle que Stölzl confie cette histoire, et la mise en scène fonctionne en fait très bien sur ce plan là ; le metteur en scène cependant ne parvient pas à donner une signification  convaincante et crédible aux actions et comportements des personnages sur scène : « Calaf tombe dans une sorte d’obsession pour Turandot, de loin, comme un harceleur qui poursuit une star. Pourquoi ? Nous ne savons pas. C’est comme le fait d’une hypnose, ou d’une malédiction. On pourrait même dire qu’il projette une sorte de désir de mort dans l’image de la princesse. Il n’y a pas d’autre façon d’expliquer le fait qu’il soit confronté à cette épreuve, à laquelle personne avant lui n’a jamais survécu », écrit le réalisateur dans l’interview publiée dans le programme.
Nous, les spectateurs, sommes également laissés sans réponse…

Pour lire la version originale de cet article (italien), cliquez sur le drapeau !

Les artistes

Turandot : Elena Pankratova
Liù : Olga Peretyatko
Altoum : Siegfried Jerusalem
Timur : René Pape
Calaf : Murat Karahan
Ping : Gyula Orendt
Pang : Andrés Moreno García
Pong : Siyabonga Maqungo
Un mandarin : David Oštrek

Staatsopernchor, Kinderchor der Staatsoper, Staatskapelle Berlin, dir. Zubin Mehta

Mise en scène et décors : Philipp Stölzl
Costumes : Ursula Kudrna

Le programme

Turandot

Dramma lirico en trois actes de Giacomo Puccini, livret de Giuseppe Adami et Renato Simoni, créé au Teatro alla Scala de Milan le 25 avril 1926.

Staatsoper de Berlin, représentation du 08 juillet 2021.

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René PapePhilipp StölzlOlga PeretyatkoElena PankratovaMurat KarahanSiegfried JerusalemZubin Metha
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Renato Verga

Diplômé en Physique de l'Université de Turin, Renato Verga a toujours eu une passion immodérée pour la musique et le théâtre. En 2014, il lance un blog (operaincasa.com) pour recueillir ses critiques de DVD d'opéra, de spectacles vus partout dans le monde, de concerts, de livres sur la musique. Renato partage l'idée que la mise en scène est une partie constitutive de l'opéra lui-même et doit donc comporter de nécessaires transformations pour s'adapter à notre contemporanéité.

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