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ÉCRIRE LE TEMPS – Pièces d’orgue de Nicolas de Grigny et motets de Nicolas Lebègue

par Nathanaël Eskenazy 27 juillet 2020
par Nathanaël Eskenazy 27 juillet 2020
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Les artistes

Nicolas Bucher, Marion Tassou, dessus
Vincent Lièvre-Picard, taille 
Ensemble Gilles Binchois, Dominique Vellard

Le programme

Nicolas de Grigny, Livre d’orgue
Nicolas Lebègue, Motets

2 CD Hortus (juin 2020) – 61’48

Il faut accepter une écoute où la musique s’écoule lentement, à son rythme, qui est aussi le rythme du cérémonial religieux...

La musique française pour orgue du XVIIe siècle tourne autour de quelques grands noms :  Jean Titelouze, qui inaugure une lignée prestigieuse, en passant par Roberday ou encore, à la fin du siècle, Couperin. Nicolas de Grigny marque en quelque sorte l’acmé de ce répertoire et d’un genre en particulier, celui de la messe pour orgue typique de la musique française. Né et décédé à Reims (1672-1703), où il fut organiste de la cathédrale à partir de 1696, Nicolas de Grigny mourut jeune, à l’âge de 31 ans, ne nous laissant qu’une seule œuvre, un Livre d’orgue, publié en 1699, comprenant une messe et différentes hymnes. En tout, un peu plus d’une quarantaine de pièces, qui sont la synthèse éblouissante d’une musique raffinée, complexe et hautement inspirée.

Le disque de Nicolas Bucher nous fait revivre ce que pouvait être une messe française au XVIIe siècle. En effet, qu’il s’agisse de la messe proprement dite ou bien des hymnes, l’organiste a choisi de les faire accompagner par différents extraits de plain-chant ainsi que de quatre motets de Nicolas-Antoine Lebègue (1631-1702). Cette alternance de pièces pour orgue et de plain-chant était en vigueur depuis 1662 et le Cæremoniale parisense qui avait été édité par l’archevêque de Paris.  Cette alternance crée une ambiance particulière qui peut inviter à la méditation et dans laquelle le temps semble s’étirer, même si l’on peut craindre parfois un certain systématisme. Faire un tel disque et l’écouter en son entier relève, à notre sens, d’une gageure dans notre monde moderne. Et il ne faut pas voir dans ce propos une critique négative. Bien au contraire. Ce temps qui s’étale, et qui est celui de la musique, entre en totale contradiction avec notre époque où tout va très (trop) vite. Il faut donc accepter une écoute où la musique s’écoule lentement, à son rythme, qui est aussi le rythme du cérémonial religieux.

Pour nous y convier, Nicolas Bucher joue d’un très bel instrument, celui de l’abbatiale Saint-Robert de la Chaise-Dieu : orgue coloré, puissant, aux couleurs chatoyantes. Ensuite, l’organiste trouve une réelle inspiration dans un répertoire difficile et qui exige beaucoup de l’interprète, notamment en ce qui concerne l’ornementation, particulièrement précise et détaillée. Les pièces du compositeur n’excèdent jamais les quatre minutes à l’exception de l’Offertoire sur les grands jeux, tandis que la pièce la plus courte (Premier Sanctus en taille) n’atteint pas la minute. Il faut y voir un « aphorisme », mais en musique, et l’on sait combien cette forme ramassée était chère à la littérature de l’époque. On sera plus particulièrement attentif aux fugues dont Nicolas Bucher met en valeur la densité contrapuntique tout en gardant une grande clarté dans l’articulation et le phrasé. Et c’est probablement grâce à ces pièces que le titre du disque prend tout son sens. Si l’organiste laisse libre cours parfois à la dextérité dans l’Offertoire, la Basse de trompette et de cromorne, ou bien encore le Récit de basse de trompette ou de cromorne, les fugues sont, au contraire, empreintes d’une grande intériorité et nous invitent à un moment d’introspection ou de recueillement. Nicolas Bucher prend volontiers le parti de tempi assez lents à la fois pour la précision des ornements et la mise en relief du contrepoint.  

On saluera, en outre, une grande sobriété. Cela est particulièrement vrai pour l’ensemble des passages chantés. En premier lieu, pour les plains-chants interprétés par quatre chanteurs de l’ensemble Gilles-Binchois sous la direction de Dominique Vellard, et qui retrouvent une gravité certaine et un hiératisme digne du Grand Siècle, mais sans ce côté empesé qu’on peut lui trouver parfois. Enfin, on ne pourrait terminer sans évoquer les deux chanteurs solistes, Marion Tassou et Vincent Lièvre-Picard qui interprètent chacun deux motets à voix seule avec accompagnement d’orgue de Lebègue, qui fut, précisons-le, organiste de l’église Saint-Merry puis de la chapelle royale de Versailles et dont l’œuvre tient en trois livres d’orgue, deux livres de pièces de clavecin ainsi qu’un livre de motets. Les deux chanteurs montrent de réelles qualités expressives même si cela peut paraître un peu trop retenu et parfois, vocalement, trop « cravaté » – et que l’on eût aimé un peu plus d’ampleur.  

On regrettera que la pochette de disque ne fasse pas figurer les textes latins, notamment des hymnes et des motets. Un grand organiste, Jean Boyer avait enregistré ces pièces en 1980. Il fut aussi le professeur de Nicolas Bucher à Lille et peut-être peut-on voir dans cette nouvelle version un hommage personnel de l’étudiant au professeur. Quoi qu’il en soit, cette musique peut être vue comme le sommet d’une production organistique qui allait s’étioler peu à peu au cours du XVIIIe siècle. Et quelle plus belle reconnaissance pour cet unique opus que la plume de Bach, qui recopia en 1712 ce cahier grâce auquel, alors qu’il était encore un jeune homme, il trouverait matière à forger son propre style…

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Nicolas BucehrMarion Tassou
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Nathanaël Eskenazy

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