À la une
Les festivals de l’été –Salzbourg : MARIA STUARDA, pas à pas...
GRISELDIS OU LES CINQ SENS, Adam (1848) – dossier
CD – Adam, Griseldis : la redécouverte d’un ballet « qui...
Les brèves d’août –
Les festivals de l’été –RINALDO fol du désert au 45e...
Les festivals de l’été –OperaFest à Lisbonne : une Traviata certes...
OPERAFEST 2025 – LISBONNE & OEIRAS : Amours interdites !
Les festivals de l’été – MITRIDATE à Salzbourg : sauts périlleux… et...
Les opéras du monde –L’art lyrique à Lisbonne : entre...
« Déesse d’or, entends nos voix ! »LÉO DELIBES au-delà de Lakmé
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs
Première Loge

Pour ne rien manquer de l'actualité lyrique, restons en contact !

CDMédiathèque

CD – Adam, Griseldis : la redécouverte d’un ballet « qui chante »…

par Jean-François Lavigne 10 août 2025
par Jean-François Lavigne 10 août 2025
1 commentaire 2FacebookTwitterPinterestEmail
536
Les artistes

Marija Jelic : soprano
Vesela Tritchkova : harpe
Stefan Stefanov Vrachev : harmonium
Chœur Philharmonique de Sofia (chef des chœurs : Tsvetan Krumov), Orchestre Philharmonique de Sofia, dir. Dario Salvi

Le programme

Les Cinq Sens, ou Griseldis

Ballet-pantomime en 3 actes et 5 tableaux d’Adolphe Adam, livret de Dumanoir et Joseph Mazilier, créé le 16 février 1848 au théâtre de l’Académie royale de musique.

2 CD Naxos (mai 2025, enregistré en février 2024)

Pourquoi, me direz-vous, évoquer un ballet, alors que Première Loge Opéra, comme son nom l’indique, se spécialise en art lyrique ? Ce ballet méconnu est assez audacieux, pour son époque (pour en savoir plus sur Griseldis ou les Cinq Sens, consultez ici le dossier que Première Loge consacre à cette œuvre) : il a recours à un chœur dans son introduction et à une soprano lors de diverses interventions. La danseuse étoile Carlotta Grisi, créatrice de Giselle notamment, se piquait aussi de chanter. Selon Théophile Gautier, elle détenait une très jolie voix. D’où la décision d’Adam d’intégrer une romance à son ballet : la ballerine cessait alors de danser et séduisait le public en chantant ! Nous voici face à une œuvre sinon unique en son genre (on lit dans la Revue et Gazette musicale du 20 février 1848 que Carlotta Grisi avait déjà chanté dans un ballet huit ans avant sa prestation dans celui d’Adam), du moins très originale et qui, l’air de rien, ouvrit une voie.
En effet, au fil des époques et des modes, mêmes si les ballerines cessèrent de chanter, dans divers ballets, l’orchestre symphonique s’enrichit régulièrement de chœurs et/ou de chanteurs : Massenet (Cigale), Tchaïkovski (Valse des flocons de neige de Casse-Noisette), Falla (L’Amour sorcier et Le Tricorne), Khatchaturian (Spartacus), Poulenc (Les Biches), Schmitt (Le petit elfe Ferme-l’œil et Oriane et le Prince d’Amour), Pierné (Cydalise et le chèvre-pied), Berners (Les Sirènes), Martinu (Spalicek), Szymanowski (Harnasie), Rodrigo (Pavana Real), Theodorakis (Alexis Zorba), etc…

Investi de la même soif de découverte envers le ballet romantique, que son prédécesseur Richard Bonynge, Dario Salvi nous révèle avec passion et poésie ce ballet oublié, comme il l’a fait en 2022 pour Orfa, du même Adam (Naxos, 1 cd 8.574478). Challenge téméraire, Adam n’étant pas très estimé ni très joué, hormis pour Giselle et, dans une moindre mesure, Le Postillon de Lonjumeau. Mais on ne peut que remercier une telle entreprise qui, plutôt que de nous proposer une énième version de la Pastorale ou des Quatre Saisons, nous permet de découvrir un pan de notre culture musicale depuis longtemps occulté.

Contrairement aux jugements installés, ce cher Adolphe ne manquait pas d’idées en matière de mélodies ! Pendant longtemps, le seul à en avoir été conscient, fut Camille Saint-Saëns, notamment dans ses Écrits sur la Musique et les musiciens (1870-1921, Vrin – MusicologieS, 2012)  : « Y avait-il donc, dans cet ennemi de la musique sérieuse et de la symphonie, un symphoniste qui s’ignorait ? (…) Dans ses ballets, où n’ayant pas de modèles, n’étant pas préoccupé d’imiter Auber ou Rossini, Adam a été créateur et a donné toute sa mesure. Il est vraiment étrange que ce mélodiste de profession n’ait complètement réussi que dans la symphonie ; car le ballet, c’est la symphonie qui s’amuse, mais c’est toujours la symphonie, et les ballets d’Adam sont des chefs-d’œuvre ».

L’intrigue de Griseldis, imaginé par le prolifique dramaturge Dumanoir, n’a rien à voir avec la légende médiévale de Grisélidis qui inspirera plus tard Massenet : pour en connaître les grandes lignes, lisez ici son résumé (rubrique « L »oeuvre / Le livret ». La partition d’Adam présente quant à elle plusieurs originalités : l’emploi d’un chœur, celui d’une soprano, et plusieurs solos conséquents pour la harpe et pour l’harmonium.
Le chœur n’intervient qu’au cours de la courte introduction, ce qui constitue une sorte d’enluminure sonore de présentation, pour ce conte médiéval. Mais son intervention unique, sur l’ensemble de l’ouvrage, est une participation fugace que l’on regrette, car le Chœur Symphonique de Sofia est bien expressif. On espère pouvoir l’apprécier pleinement lors d’autres enregistrements…
La soprano intervient sur une mélodie précise, que l’on retrouve au cours de l’œuvre, tel un leitmotiv, jusque dans les accords ultimes de la partition. L’excellent livret de la jaquette, dû à Robert Ignatius Letellier, ne nous est livré qu’en anglais. Néanmoins, le texte français de la mélodie pivot de l’œuvre, nous est bien fourni : « Arrête, enfant, arrête ! Ne quitte pas ces lieux !… » C’est une excellente idée, car si Marija Jelic fait preuve d’un bel engagement avec un timbre soyeux et charnu, sa prononciation en français est un peu hasardeuse ; aussi est-il judicieux de consulter la jaquette au préalable.
Les interventions de la harpiste Vesela Tritchkova (déjà requise avec élégance pour Orfa) contribuent avec charme aux instants où le mystère s’impose dans l’histoire.
Quant aux participations de Stefan Stefanov Vrachev à l’harmonium, elles surprennent tout d’abord, l’instrument étant bien rarement utilisé dans un ballet, mais s’intègrent sans effort dans l’action.

Rappelons certains aspects historiques, entourant la création de ce ballet, son succès, puis sa désaffection subite. Griseldis fut créée au Théâtre de l’Académie Royale de Musique, de Paris, le 16 février 1848, période éminemment charnière pour Adam. Brouillé avec le nouveau directeur de l’Opéra-Comique, il avait tenté l’aventure de fonder son propre théâtre. Financièrement, l’affaire ne fut pas simple ; toutefois, le 15 novembre 1847, le nouvel « Opéra-National » était inauguré de façon brillante, avec la création de Gastibelza de Louis-Aimé Maillart, qui obtint un franc succès. L’ouvrage n’en est pas moins tombé dans l’oubli depuis, et de Maillart, lorsque celui-ci est parfois évoqué, on ne retient plus (dans le meilleur des cas…) que l’opéra-comique Les Dragons de Villars… Qu’importe ! Le but fort louable de ce nouveau théâtre était justement de permettre aux jeunes compositeurs de trouver une scène qui accueillerait leurs créations, quand les scènes officielles les refuseraient. Malheureusement, l’Histoire en décida autrement.

D’après Arthur Pougin, biographe d’Adam : « La création de Griseldis, le 16 février 1848, rencontra un véritable succès mais ne put être ni aussi fructueux ni aussi prolongé qu’il eût été désirable. La révolution de février vint l’arrêter net, en même temps qu’elle tua l’Opéra-National, à peine ouvert, et dont l’existence vacilla. Malgré des efforts immenses, ce théâtre ne put traverser cette crise terrible ; il dut fermer ses portes le 26 mars, après avoir vécu un peu plus de quatre mois » (Adolphe Adam: sa vie, sa carrière, ses mémoires artistiques, 1877).

Griseldis ne fut jamais repris et Adam, ruiné, se trouva contraint pendant des années d’écrire des articles pour épurer ses dettes. Il avait d’ailleurs un réel talent d’écriture et, au-delà des critiques d’œuvres de son temps, on lui doit des monographies détaillées sur plusieurs de ses contemporains (Boieldieu, Cherubini, Dalayrac, Donizetti, Hérold…).

Certes, au-delà de l’emploi d’un chœur et d’une soprano, on retrouve dans ce 10e ballet d’Adam (il en composa 13 + 1 opéra-ballet) diverses idées et tournures déjà éprouvées dans Giselle, La Jolie Fille de Gand ou Le Diable à quatre, mais la verve d’Adam déverse sans peine apparente quantité de mélodies qui alimentent avec originalité cette veine symphonique évoquée par Saint-Saëns.

C’est cet aspect symphonique que magnifient avec talent, tonicité et humour, Dario Salvi et ses troupes, autant que l’indéniable pulsation rythmique de pages écrites pour la Danse. Ils y sont aidés par une prise de son fine et précise, valorisant autant les solistes que le galbe frémissant de l’orchestre. Cette Griseldis n’est peut-être pas une page majeure de l’Histoire de la Musique. Mais ce style de découverte est capital pour comprendre l’évolution d’un genre. Adolphe Adam lui ouvrit une voie royale où s’imposèrent avec leurs apports personnels, Delibes, Tchaïkovski, Glazounov, Lalo, Messager et bien d’autres…

image_printImprimer
Dario Salvi
1 commentaire 2 FacebookTwitterPinterestEmail
Jean-François Lavigne

1 commentaire

meyer 10 août 2025 - 19 h 55 min

Très belle analyse , merci

Répondre

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Sauvegarder mes informations pour la prochaine fois.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

post précédent
Les brèves d’août –
prochain post
GRISELDIS OU LES CINQ SENS, Adam (1848) – dossier

Vous allez aussi aimer...

CD – La poésie à fleur de lèvres :...

17 juillet 2025

CD – LIKE FLESH (Sivan Eldar)

4 juillet 2025

CD – Horizons, mélodies françaises par Kitty Whately...

6 juin 2025

Et Célestine Galli-Marié créa Carmen

1 juin 2025

Gracias a la vida, Anne-Lise Polchlopek – La...

23 mai 2025

CD – Ernelinde, princesse de Norvège de Philidor...

18 mai 2025

CD- Rebelle : hommage à Célestine Galli-Marié

8 mai 2025

CD – Salome : ni Lolita, ni Terminator

2 mai 2025

CD – I puritani : une gravure de...

25 avril 2025

CD – Indomita, le premier album d’Eleonora Buratto

11 avril 2025

Annonces

OPERAFEST LISBOA & OEIRAS 2025

En bref

  • Les brèves d’août –

    9 août 2025
  • Les brèves de juillet –

    17 juillet 2025

Humeurs

  • Édito de mars –
    Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

La vidéo du mois

Édito

  • Édito de mars –
    Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

PODCASTS

PREMIÈRE LOGE, l’art lyrique dans un fauteuil · Adriana Gonzàlez & Iñaki Encina Oyón – Mélodies Dussaut & Covatti

Suivez-nous…

Suivez-nous…

Commentaires récents

  • meyer dans « Déesse d’or, entends nos voix ! »
    LÉO DELIBES au-delà de Lakmé
  • meyer dans CD – Adam, Griseldis : la redécouverte d’un ballet « qui chante »…
  • Stéphane Lelièvre dans SCALA DE MILAN : découvrez la richissime saison 2025-2026 !
  • marie toffano dans SCALA DE MILAN : découvrez la richissime saison 2025-2026 !
  • Teulon Lardic sabine dans Les festivals de l’été –
    Louise prostrée au festival international d’Aix-en-Provence

Première loge

Facebook Twitter Linkedin Youtube Email Soundcloud

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Login/Register

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Rechercher

Archives

  • Facebook
  • Twitter
  • Youtube
  • Email
Première Loge
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs

A découvrirx

CD – La poésie à fleur...

17 juillet 2025

CD – LIKE FLESH (Sivan Eldar)

4 juillet 2025

CD – Horizons, mélodies françaises par...

6 juin 2025