À la une
Le barbier démoniaque de Fleet Street arrive à Strasbourg
Siegfried : Deuxième journée du Ring de David McVicar à la...
Saint-Denis : Le Devoir du premier commandement – Il Caravaggio, sempre...
Julien Chauvin propose une nouvelle turquerie au Théâtre des Champs-Élysées :...
Ça s’est passé il y a 200 ANS : création d’...
« Mythes », la saison 25-26 de l’Opéra Grand Avignon
En 2025-2026, l’Opéra [de Rennes] en partage !
Les opéras du monde –Teatro dell’Opera di Roma : ce...
Formidable Retour d’Ulysse dans sa patrie à Crémone : La terra...
Traviata surréelle pour le retour du chef-d’œuvre de Verdi sur la...
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs
Première Loge

Pour ne rien manquer de l'actualité lyrique, restons en contact !

ProductionCompte renduVu pour vous

Faust version 1859 à Lille : plus intense, plus dramatique !

par Victoria Okada 7 mai 2025
par Victoria Okada 7 mai 2025

© Simon Gosselin

© Simon Gosselin

© Simon Gosselin

© Simon Gosselin

0 commentaires 4FacebookTwitterPinterestEmail
2,2K

En co-production avec l’Opéra Comique et le Palazzetto Bru Zane, l’Opéra de Lille présente jusqu’au 22 mai Faust de Gounod, dans sa version initiale en opéra-comique de 1859, qui se déploie en un prologue et quatre actes. Mise en scène par Denis Podalydès, cette production, portée par les dialogues parlés, se distingue par une étonnante fluidité spatiale et temporelle. L’œuvre y gagne en intensité, servie par un plateau vocal francophone de très haute volée. On y entrevoit l’ambition artistique du compositeur, qui délivre ici avec cette œuvre l’un des plus beaux théâtres lyriques de tous les temps.

Le Faust entièrement chanté avec des récitatifs nous semblait si naturel que nous ne songions même plus à sa version initiale, avec des textes parlés… jusqu’à ce que le Palazzetto Bru Zane, Centre de musique romantique française, propose il y a quelques années un livre-disque qui avait ébloui l’auditeur grâce à la dramaturgie musicale inattendue de l’opéra-comique[i]. Dans la présente production, le metteur en scène et le chef d’orchestre Louis Langrée ouvrent encore plus grand la porte pour nous inviter à entrer dans le cabinet de travail — ou dans le cerveau — de Gounod, afin de dévoiler son intention première, sans la contrainte officielle de l’Opéra de Paris, autrement dit, la version grand opéra en cinq actes avec ballet de 1869. C’est comme cette porte symbolique, sans mur autour, placée au milieu de la scène, représentant le seuil que Méphistophélès franchit pour dévoiler petit à petit son secret maléfique à Faust…

La scénographie d’Éric Ruf est construite autour d’une plaque tournante, comme pour matérialiser un engrenage diabolique qui ne s’arrête jamais. La disposition circulaire fait irrésistiblement penser au cirque, impression renforcée par la présence du chœur, qui occupe souvent les gradins en spectateurs du drame. Les costumes de Christian Lacroix allient sobriété et simplicité, mais vers la fin de l’œuvre, la magie du couturier opère : la Nuit de Walpurgis livre soudain une orgie de couleurs chez les sorcières, éclairée efficacement par les lumières de Bertrand Couderc.

La puissance de cette version de 1859 est palpable surtout sur le plan musical, formidablement rendue par l’Orchestre National de Lille, absolument sublime sous la direction de Louis Langrée. Dès les premières notes du prélude, les cordes suaves et sensuelles, mais aussi profondes, résistant à la longueur de la progression harmonique, sont remarquables. Elles pourraient constituer un double musical de Marguerite résistant à la tentation de Faust, à ses sentiments profonds, presque latents. Tout au long du spectacle, les gestes du chef sont à la fois dynamiques et précis, avec ou sans baguette selon les moments. Il tire le meilleur de l’ONL, dont les musiciens semblent eux aussi ensorcelés pour révéler des facettes de l’œuvre jusqu’alors jamais montrées. Sous la direction de Mathieu Romano et Louis Gal, le chœur assure, malgré un effectif relativement restreint, un rôle collectif tantôt avec véhémence, tantôt avec délicatesse.

Sans trop spoiler, laissons les spectateurs découvrir dans cette version 1859 le trio Siebel-Wagner-Faust dans le prologue, la cabalette de Faust à la fin de l’air Salut, demeure chaste et pure dans l’acte II, la scène d’église après la mort de Valentin dans l’acte VI, et bien d’autres moments qui captivent l’oreille — autant de merveilles que nous a laissées le magicien Gounod. Le moment fort de la soirée a été, incontestablement, cette cabalette que Julien Dran a livrée avec force et raffinement. Ce passage, miraculeux, constitue, comme l’indique le chef dans le programme — et l’a encore souligné lors de nos brefs échanges après la représentation « une maestria d’orchestration toute berliozienne […], des pages exceptionnelles au théâtre ». Distingué pour son excellence dans le chant français, notamment dans le rôle de Nadir dans Les Pêcheurs de perles de Bizet à Dijon tout récemment, Julien Dran confirme ici sa réputation, avec un art constamment ciselé par l’élégance, sans jamais sacrifier la puissance. À ses côtés, Jérôme Boutillier campe un Méphistophélès cynique à souhait, dont les ricanements et les railleries procurent un plaisir théâtral indéniable. Tout au long de la soirée, le baryton fait preuve d’une solidité vocale irréprochable. Vanina Santoni, dont Première Loge vient de vanter l’excellence de l’album Par amour, incarne avec justesse la pureté et l’innocence de Marguerite. En ce soir de première, elle n’était visiblement pas au sommet de sa forme, mais elle a su contourner cette difficulté pour façonner un personnage plus pudique encore, démontrant ainsi une remarquable capacité d’adaptation.

Les seconds rôles sont tout aussi homogènes et chevronnés. On regrette que Anas Séguin ne soit pas davantage mis en avant : avec un souffle parfaitement maîtrisé et une diction idéale, son Wagner dépasse le cadre du simple rôle secondaire. Qui sait s’il n’assumera pas un jour celui de Méphistophélès ? Lionel Lhote endosse la veste du soldat en Valentin. Son timbre clair donne d’abord au personnage une naïveté presque enfantine ; mais à son retour de la guerre, sa couleur vocale s’assombrit pour devenir plus grave, plus tragique. La jeune mezzo-soprano Juliette Mey, révélation lyrique aux Victoires de la musique classique 2024 et qui vient tout juste de remporter un grand succès dans un concert Rossini aux côtés de Karine Deshayes aux Invalides, campe un Siebel rassurant, porté par la droiture de son émission et un timbre à la fois riche et léger. Enfin, Marie Lenormand, en dame Marthe, souligne avec bonheur le caractère comique de son personnage, un registre qu’elle explore avec un plaisir grandissant depuis quelques années.

Le spectacle est complété par deux comédiens, incarnant les machinistes et serviteurs de Méphistophélès, qui veillent au « bon déroulement » de son plan, ainsi que par deux danseurs intervenant aux moments clés, dans une chorégraphie de Cécile Bon, pour évoquer les prolongements de l’histoire. Les spectateurs habitués au ballet dans l’œuvre ne seront ainsi pas dépaysés, car leurs danses « remplacent » efficacement ces instants traditionnellement confiés aux corps en mouvement.

La production sera retransmise sur grand écran dans quatorze villes des Hauts-de-France, le 15 mai à 20 heures ; elle sera ensuite présentée à l’Opéra-Comique à Paris, du 21 juin au 1er juillet : ne manquez pas ce superbe spectacle !

—————————————————————-

[i] L’œuvre avait également fait l’objet d’un superbe concert donné au TCE en juin 2020.

Les artistes

Faust : Julien Dran
Marguerite : Vannina Santoni
Méphistophélès : Jérôme Boutillier
Valentin : Lionel Lhote
Siebel : Juliette Mey
Wagner : Anas Séguin
Dame Marthe : Marie Lenormand

Alexis Debieuvre, Léo Reynaud, comédiens
Julie Dariosecq, Elsa Tagawa, danseuses
Arthur Dreger, Alice Leborgne l’Enfant (en alternance)

Orchestre National de Lille, dir. Louis Langrée
Chœur de l’Opéra de Lille
Chefs de chœur : Mathieu Romano, Louis Gal
Chef de chant : Nicolas Chesneau
Mise en scène : Denis Podalydès
Collaborateur à la mise en scène :Laurent Delvert
Scénographie : Éric Ruf
Costumes : Christian Lacroix
Lumières : Bertrand Couderc
Chorégraphie :Cécile Bon
Masques : Louis Arène
Maquillage et coiffure : Véronique Soulier-Nguyen
Assistant à la direction musicale : Sammy El Ghadab
Assistantes scénographie : Caroline Frachet, Zoé Pautet
Assistant costumes : Jean-Philippe Pons
Stagiaire assistanat à la mise en scène : Méryl Vourch

Le programme

Faust 1859

Opéra en quatre actes et un prologue de Charles Gounod, livret de Jules Barbier et Michel Carré d’après Goethe, version originale avec les dialogues parlés créée le 19 mars 1859 au Théâtre-Lyrique.
Opéra de Lille, représentation du lundi 5 mai 2025.

image_printImprimer
Lionel LhoteJulien DranJérôme BoutillierVannina SantoniLouis LangréeJuliette MeyDenis Podalydès
0 commentaires 4 FacebookTwitterPinterestEmail
Victoria Okada

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Sauvegarder mes informations pour la prochaine fois.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

post précédent
Ça s’est passé il y a 200 ANS : mort d’ANTONIO SALIERI
prochain post
Le retour de Riccardo Muti à Turin pour la saison 2025-2026

Vous allez aussi aimer...

Le barbier démoniaque de Fleet Street arrive à...

22 juin 2025

Siegfried : Deuxième journée du Ring de David McVicar...

22 juin 2025

Saint-Denis : Le Devoir du premier commandement – Il...

20 juin 2025

Julien Chauvin propose une nouvelle turquerie au Théâtre...

19 juin 2025

En 2025-2026, l’Opéra [de Rennes] en partage !

18 juin 2025

Formidable Retour d’Ulysse dans sa patrie à Crémone :...

17 juin 2025

Traviata surréelle pour le retour du chef-d’œuvre de Verdi...

17 juin 2025

Pharaonique ! Aïda réunit près de 7.000 spectateurs à...

16 juin 2025

Soirée BIZET à la Cité de la Musique :...

16 juin 2025

Diva ma non troppo : le public du festival...

14 juin 2025

En bref

  • Brèves de mai –

    30 mai 2025
  • Les brèves de mars –

    14 mars 2025
  • Les brèves de février

    25 février 2025
  • Sauvons l’Avant-Scène Opéra !

    18 février 2025
  • L’Avant-Scène Opéra, c’est fini…

    7 février 2025

Humeurs

  • Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

Édito

  • Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

La vidéo du mois

PODCASTS

PREMIÈRE LOGE, l’art lyrique dans un fauteuil · Adriana Gonzàlez & Iñaki Encina Oyón – Mélodies Dussaut & Covatti

Suivez-nous…

Suivez-nous…

Commentaires récents

  • Vicat dans Chorégies d’Orange 2025 : Il trovatore et La forza del destino en version de concert – avec « les deux Anna » dans les deux Leonora !
  • Meyer dans Dans le labyrinthe des opéras de RIMSKI-KORSAKOV
  • Stéphane Lelièvre dans À Rouen, SEMIRAMIDE au pays des vampires
  • HUBERT dans À Rouen, SEMIRAMIDE au pays des vampires
  • cecile PABA ROLLAND dans Il trovatore à Marseille : Le chant de l’Extrémo

Première loge

Facebook Twitter Linkedin Youtube Email Soundcloud

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Login/Register

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Rechercher

Archives

  • Facebook
  • Twitter
  • Youtube
  • Email
Première Loge
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs

A découvrirx

Le barbier démoniaque de Fleet Street...

22 juin 2025

Siegfried : Deuxième journée du Ring de...

22 juin 2025

Saint-Denis : Le Devoir du premier commandement...

20 juin 2025