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Aix-en-Provence : SALOME, une expérience tellurique

par Nicolas Darbon 12 juillet 2022
par Nicolas Darbon 12 juillet 2022

© Bernd Uhlig

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Cet opéra est une énigme. Pourquoi Salomé demande-t-elle la mort de la personne qu’elle désire le plus au monde ? Le parti-pris du directeur musical Ingo Metzmacher et de la metteure en scène Andrea Breth est de faire du personnage titre une adolescente presque pure, mue par les forces contradictoires du désir, dans un contexte familial légèrement compliqué : son beau-père la désire et sa mère est « incestueuse »…  Sur scène, Salomé apparaît dans la pureté vaporeuse d’une robe / chemise de nuit ; blancheur qui perdurera jusqu’à la fin. Ce halo séraphique est tout de même loin de l’image d’une femme resplendissante que tout le monde désire – du roi aux soldats – et qui exerce sa séduction comme on exerce le pouvoir. La production aixoise présente ainsi une incohérence ; en supprimant la chorégraphie érotique de la « Danse des sept voiles », Breth annihile cet érotisme triomphant pour installer un état d’apesanteur. Sur une musique enfiévrée, le plateau noir est alors traversé de divers personnages zombies évoluant ultra lentement. Désérotiser cette Danse, c’est renoncer à une stratégie de séduction égocentrée et mortifère.

Le désir s’affirme toutefois dans les mots de la jeune fille lorsqu’elle s’oppose à l’intransigeance psycho-rigide de Jochanaan [autrement dit, Jean le Baptiste du Nouveau Testament], qui est une sorte de fanatique religieux tout à fait insensible et moralisateur (« C’est par la femme que le mal est entré dans le monde. ») Suite à cette entrevue, où Salomé n’obtient pas gain de cause, elle demande la mort de Jochanaan, ce que le roi Hérode finit par accepter. Si Salomé tue certainement par un geste de dépit et d’orgueil, l’explication d’Andrea Breth est tout autre. « C’est l’histoire d’une jeune fille qui est soudain confrontée à son désir, à l’éveil de sa sexualité et à sa capacité à aimer avec une telle force qu’elle ne parvient pas à agir de manière raisonnable, sensée. » Cette justification du meurtre est assez légère.

Au crédit de Breth, il faut insister sur la nature naïve et enfantine de Salomé, que l’on néglige souvent, et même d’une forme de maladie mentale, perceptible dans la scène finale, lorsqu’elle se demande pourquoi les yeux de la tête qu’elle tient dans une corbeille… restent fermés.

Hérode, le Tétrarque de Judée, est parfaitement campé par le ténor John Daszak dont l’agilité phénoménale et la justesse n’ont d’égale que l’énergie d’un rôle très agité. Son épouse Herodias, incarnée par Angela Denoke (qui a déjà endossé le rôle de Salomé), possède une voix de soprano dramatique puissante et intimidante. Gábor Bretz joue un Jochanaan à la voix onctueuse et ample, aussi bien qu’imperturbable. Ancienne artiste de l’Académie du Festival d’Aix, Elsa Dreisig nous livre une Salomé éblouissante que le public saluera, à peine le rideau tombé, par une déflagration extraordinaire de hourras. La franco-danoise possède un profil de Salomé tout à fait adapté aux idées de la mise en scène. Sa prestation vocale est sûre, ferme, inspirée, nuancée ; même les graves, qui pourraient être fragiles dans ce rôle, s’imposent aisément. Le choix rare de la version allégée de Dresde (1929) permet au timbre de soprano lyrique de l’héroïne (Dreisig chante par exemple les rôles de Micaëla, Pamina, Papagena… ) de se fondre aux linéaments timbriques du génial compositeur. L’équilibre acoustique général, des interprètes et de la salle du Grand Théâtre de Provence, est excellemment réalisé. L’Orchestre de Paris, dans le second interlude instrumental, marie énergie, rudesse et travail d’orfèvrerie. Les décors soulignent avec efficacité les forces de l’imaginaire qui travaillent les personnages. Au début de l’opéra, le tableau de Caspar David Friedrich Zwei Männer in Betrachtung des Mondes (1819-20) installe la couleur noire qui enveloppera tout l’opéra (décors signés Raimund Orfeo Voigt) avec des changements « toplogiques » : une Lune  immense circule. Le jeu des lumières confié à Alexander Koppelmann est à la fois épuré et juste, traversant un voile en tulle d’avant-scène. Cet opéra de Strauss est unique. Elsa Dreisig et l’ensemble de la production aixoise nous en restituent sa tellurique beauté.

Les artistes

Salome : Elsa Dreisig
Herodias : Angela Denoke
Eine Sklavin : Katharina Bierweiler
Jochanaan : Gábor Bretz
Herodes : John Daszak
Narraboth : Joel Prieto
Ein Page der Herodias : Carolyn Sproule
Erster Jude : Léo Vermot-Desroches
Zweiter Jude : Kristofer Lundin
Dritter Jude : Rodolphe Briand
Vierter Jude : Grégoire Mour
Fünfter Jude / Zweiter Soldat : Sulkhan Jaiani
Erster Nazarener / Ein Kappadozier : Kristján Jóhannesson
Zweiter Nazarener : Philippe-Nicolas Martin
Erster Soldat : Allen Boxer

Orchestre de Paris, dir. Ingo Metzmacher

Mise en scène : Andrea Breth
Décors : Raimund Orfeo Voigt
Costumes : Alexandra Charles
 Lumière : Alexander Koppelmann

Le programme

Salome

Drame en un acte de Richard Strauss, livret du compositeur d’après Oscar Wilde, créé le 21 novembre 1901 à la Semperoper de Dresde.

Festival d’Aix-en-Provence, représentation du samedi 9 juillet 2022

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Gábor BretzElsa DreisigIngo MetzmacherJohn DaszakAngela DenokeAndrea Breth
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Nicolas Darbon

Nicolas Darbon est professeur des universités en musicologie. Avant sa carrière universitaire à l'Université d'Aix-Marseille, il est professeur de musique en collèges-lycées en Normandie et en Guyane. Spécialiste de la musique des XXe-XXIe siècles, il organise de nombreux colloques. Membre du laboratoire LESA, il coordonne le Groupe de recherche sur la musique (GRiiiM) et des projets avec l'Afrique. Parmi ses livres : Pour une approche systémique de l'opéra contemporain ou Penser les métissages sonores. Il contribue notamment à L'Avant-scène opéra et à l'Histoire de l'opéra français publié chez Fayard. Outre sa participation. à Première Loge, il a écrit des analyses des opéras de Clapisson, Ferneyhough, Jolas, Messiaen, Pesson, Rihm...

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