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Quand West side story investit le Grand Est

par Stéphane Lelièvre 3 juin 2022
par Stéphane Lelièvre 3 juin 2022

© Klara Beck

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L’Opéra du Rhin vient d’avoir une double bonne idée : programmer West side story d’une part, inviter un spectacle de Barrie Kosky d’autre part. On ne dira jamais assez à quel point l’œuvre de Bernstein est un absolu chef-d’œuvre, sur le double plan musical et dramatique.  La partition regorge de pages bien sûr irrésistibles, mais dont l’efficacité et l’immédiate séduction n’excluent nullement une réelle science dans l’écriture, voire certaines citations savantes (l’émouvant thème de « I Have a love and it’s all that I have », entendu à plusieurs endroits stratégiques de l’œuvre – notamment dans les toutes dernières mesures sur lesquelles l’œuvre se referme… – évoque de très près celui de la Rédemption par l’amour de la Tétralogie : cela ne saurait être un hasard…). Quant au livret, il est probablement l’une des plus habiles adaptations de Shakespeare jamais réalisées pour une œuvre musicale : absolument tous les éléments de la tragédie du grand Will trouvent un écho dans le texte d’Arthur Laurents et Stephen Sondheim, s’y intégrant de façon parfaitement naturelle et confirmant le caractère universel et intemporel de cette implacable dénonciation de la violence, de l’intolérance et du racisme.

Barrie Kosky est l’un des metteurs en scène les plus actifs et les plus talentueux du moment, et c’est toujours un plaisir d’apprendre que l’un de ses spectacles, conçus pour la Komische Oper de Berlin dont il est le directeur, est invité par un théâtre français. Ce West side story, qui n’est peut-être pas sa mise en scène le plus marquante, n’en demeure pas moins un excellent spectacle, intelligent, beau, très émouvant. On peut trouver à redire sur tel ou tel point (par exemple certains détails triviaux ou vulgaires, qui n’apportent strictement rien…) et regretter peut-être un parti pris un peu trop exclusif : celui de refuser le « grand spectacle » que beaucoup attendent dans cette comédie musicale. Un parti pris qui est visible surtout dans une scénographie volontairement réduite au minimum : un terrain de basket sur un plateau tournant, deux échelles à l’avant-scène rappelant les « escaliers de secours » new-yorkais (les fameux fire escapes), et c’est à peu près tout, à l’exception de certains éléments mobiles faisant ponctuellement leur apparition (un lit pour la chambre de Maria, un étalage de légumes pour la boutique de Doc, des boules à facette pour la scène du gymnase). Mais on peut, a contrario, trouver que cette sobriété permet de se concentrer encore plus sur la tragédie et la violence des relations entre les personnages, la direction d’acteurs se révélant particulièrement travaillée dans cette reprise assurée par Tamara Heimbrock. Certaines scènes, en tout cas, marquent durablement les esprits : la poétique rencontre de Tony et Maria au gymnase ; les cadavres de Riff et Bernardo abandonnés sur le terrain de basket à la fin de l’acte I ; et surtout la bouleversante apparition d’un couple de personnes âgées dansant tendrement, improbable incarnation de Tony et Maria projetés dans un futur qui leur sera tragiquement refusé…

Par ailleurs, le côte « spectaculaire » de la mise en scène n’est-il pas en quelque sorte assumé par les scènes dansées (la chorégraphie est signée Otto Pichler), éblouissantes de vie, de précision, de violence, de sensualité ?… La troupe de chanteurs-acteurs-danseurs réunis pour ce spectacle laisse le public stupéfait devant ce qui s’apparente à une forme de perfection : c’est un pur bonheur que de voir ces jeunes artistes chanter et danser tout à la fois sans le moindre effort apparent et avec un naturel absolument confondant.

Des seconds rôles se détachent notamment le Riff bien chantant de Bart Aerts, le Bernardo ou le Chino très crédibles de Kit Esuruoso et Marin Delavaud, ou encore le Anybodys touchant de Laura Buhagiar. Amber Kennedy remporte un grand succès personnel et ce n’est que justice : elle possède toute la gouaille mais aussi toute la sensualité d’Anita, à laquelle elle apporte également une vraie touche d’émotion, notamment dans son duo avec Maria (acte II).
Quant à Roméo/Tony et Juliette/Maria, ils ont les traits et la voix de deux interprètes irrésistibles : Mike Schwitter et Madison Nonoa. Si la voix du premier manque peut-être un peu d’épaisseur, son art du chant est remarquable (avec notamment de très habiles et très beaux aigus émis en voix de tête), et surtout son incarnation du personnage de Tony est d’une crédibilité et d’une émotion absolues. Madison Nonoa se glisse quant à elle avec une grande  aisance et un parfait naturel dans l’esthétique de la comédie musicale, ce à quoi ne parviennent pas toujours les chanteuses de formation classique – Madison Nonoa a à son répertoire, entre autres rôles, la Juliette de Bellini ou la Lauretta de Puccini (on se souvient de la grande Kiri Te Kanawa qui, dans la version DG dirigée par Bernstein lui-même, ne parvenait jamais à donner vie à son personnage, malgré la beauté incontestable de son chant…). La voix de Madison Nonoa est chaude, richement colorée et pleine de nuances – et qui plus est l’actrice est bouleversante, notamment lors de l’annonce de la mort de Bernardo, et surtout dans la scène finale, à tirer les larmes…

Au rideau final, c’est un triomphe pour tous les artistes, y compris pour l’Orchestre symphonique de Mulhouse qui, sous la direction experte de David Charles Abell, s’approprie valeureusement un langage et des codes esthétiques qui, pourtant, ne ressortissent pas à leur répertoire habituel !

——————————————

Lisez ici notre compte rendu du West side story de Steven Spielberg !

Les artistes

Maria : Madison Nonoa
Tony : Mike Schwitter
Anita : Amber Kennedy
Riff : Bart Aerts
Bernardo : Kit Esuruoso
Chino : Marin Delavaud
Action : Thomas Bernier
A-Rab : Maxime Pannetrat
Baby John : Léo Gabriel
Big Deal : Zoltan Zmarzlik
Snowboy : Antoine Beauraing
Diesel Shane Dickson
Anybodys Laura Buhagiar
Graziella Emmanuelle Guélin
Pepe : Jesse Lyon
Velma : Ana Karina Enriquez Gonzalez
Rosalia : Valentina Del Regno
Consuelo : Sofia Naït
Francisca : Alice Pernão
Anxious : Pierre Doncq
Indio : Pierre-Émile Lemieux-Venne
Nibbles : Hénoc Waysenson
Luis : Marwik Schmitt
Estella : Brett Fukuda
Teresita : Deia Cabalé
Margarita : Noemi Coin
Doc : Dominique Grylla
Lieutenant Schrank : Flavien Reppert
Officier Krupke, Glad Hand : Logan Person

Orchestre symphonique de Mulhouse, dir. David Charles Abell
Chœur de West Side Story, dir. Luciano Bibiloni
CCN • Ballet de l’Opéra national du Rhin
Mise en scène : Barrie Kosky, Otto Pichler
Chorégraphie : Otto Pichler
Responsable de la reprise (mise en scène) : Tamara Heimbrock
Responsable de la reprise (chorégraphie) : Silvano Marraffa
Concept des décors : Barrie Kosky
Costumier : Thibaut Welchlin
Lumières : Franck Evin

Le programme

West Side Story

Comédie musicale en deux actes de Leonard Bernstein, livret d’Arthur Laurents, paroles de Stephen Sondheim, chorégraphie de Jerome Robbins, créée en 1957 à Broadway.
Opéra National du Rhin, Strasbourg, représentation du mardi 31 mai 2022

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Barrie KoskyMadison NonoaMike SchwitterAmber KennedyBart AertsKit EsuruosoMarin DelavaudDavid Charles AbellOtto Pichler
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

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