Le Messie, Théâtre des Champs-Élysées, samedi 13 décembre 2025
Comme presque toujours désormais, et c’est heureux, le Messie n’est plus donné avec pléthore d’instrumentistes et de choristes. C’est donc un orchestre d’une vingtaine de musiciens et vingt choristes qui ont occupé la scène du Théâtre des Champs-Élysées (faisant salle comble) ce samedi 13 décembre.
Le quatuor vocal de ce soir est à 100% britannique, et ce sont des artistes que l’on ne voit que très rarement se produire en France.
La soprano Grace Davidson (épouse de Nigel Short, fondateur du chœur Tenebrae), est spécialisée dans la musique baroque et renaissante. Elle a enregistré plusieurs opéras de Händel mais aussi, en 2020 de remarquables Leçons de ténèbres de Couperin (direction Nigel Short, Signum Classics). Sa voix, belle et puissante, parcourt avec une facilité déconcertante les trois parties de l’œuvre. On retiendra le « Rejoice Greatly » agrémentée de nuances peu souvent entendues, « How beautiful are the feet » tout en grâce, mais surtout le merveilleux « I know that my Redeemer liveth », en fusion avec violons et violoncelle.
Martha McLorinan, alto britannique et membre d’Ex Cathedra, chœur et ensemble de musique ancienne britannique, déçoit quelque peu. La prononciation est hasardeuse, la voix est par moments mal maîtrisée et n’arrive pas à convaincre dans « O thou that tellest good tidings to Zion », ni dans le duo « He shall feed his flock », dominé par la soprano.
Jeremy Budd, ténor, a été chef de chœur de la cathédrale Saint Paul et fut aussi un temps membre de l’ensemble Cantabile. Le premier récitatif « Comfort ye » suivi de l’air « Every Valley » sont abordés sans nuances et la voix accuse par moments quelques baisses de de régime. Le merveilleux arioso « Behold and see » est hélas dépourvu du dramatisme qui est pourtant de mise ici. « Thou shalt break them », air essentiel menant vers l’Hallelujah qui clôt la deuxième partie, manque d’engagement et de puissance.
Le baryton-basse Edward Grint est avec la soprano, par sa prestance noble et sa puissance vocale mais aussi sa présence, la voix de la soirée. Le premier air « The people that walked in darkness » est terrifiant de noirceur. Encore plus haut, « Why do the nations » est extraordinaire, porté par un orchestre chauffé à blanc. Enfin, « The trumpet shall sound », en liant nuances et puissance, nous emmène vers des sommets.
Le chef britanique Nigel Short (ancien membre de l’ensemble vocal The King’s Singers) est le fondateur et directeur artistique de Tenebrae et de Tenebrae Consort. Le chœur Tenebrae est d’ailleurs bel et bien le triomphateur de cette soirée. On le ressent dès le « For unto us a child is born », mais tous les autres chœurs procureront un égal enchantement. Le « All we like sheep » de la deuxième partie, notamment, est proprement miraculeux par sa parfaite fusion avec l’orchestre. Le chœur sera accueilli par un tonnerre d’applaudissements lors des nombreux saluts.
Le célèbre Kammerorchester Basel est à tous points de vue excellent – malgré deux trois approximations pour la trompette, notamment lors de l’Hallelujah. Mention spéciale au pupitre de premier violoncelle dont la sensibilité fut d’un bout à l’autre admirable, ainsi qu’au premier violon qui occupa le devant de la scène, après que le chef s’est retiré pour le fabuleux air de soprano « If God be for us », dont les intonations nous ont conduit vers un moment d’absolue sérénité. Deux petits regrets : à un moment du concert, les trompettes ont été maladroitement placées au niveau du deuxième balcon, créant un déséquilibre avec l’orchestre ; de même, le clavecin, par moments, n’arrive pas à se faire entendre. Tous les autres pupitres se sont révélés excellents.
Au final, une soirée des plus agréables. Nous espérons réentendre bientôt sur scène ce chœur Tenebrae de très haute facture !
Grace Davidson, soprano
Martha McLorinan, alto
Jeremy Budd, ténor
Edward Grint, basse
Kammerorchester Basel
Chœur Tenebrae
Nigel Short, direction
Le Messie
Oratorio pour chœur, solistes vocaux et orchestre de Georg Friedrich Haendel, créé à Dublin le 13 avril 1742.
Paris, Théâtre des Champs-Élysées, concert du samedi 13 décembre 2025.

