À la une
Ça s’est passé il y a 100 ans : mort...
À Liège, Faust et Marguerite approfondissent leur connaissance du Bien...
La Bohème revient à l’Opéra Bastille dans la conception spatiale...
Se préparer à FLORA MIRABILIS – Opéra national de Grèce,...
Se préparer à FAUST, Opéra Royal de Wallonie-Liège, 12-20 septembre...
Le cycle FOLIES PARISIENNES du Palazzetto Bru Zane
CD – The World Feels Dusty, récital de Sarah Connolly...
Les brèves de septembre –
JULIE, Boesmans (2005) – dossier
CD – Erin Morley-Lawrence Brownlee : GOLDEN AGE, un parcours idéal sur...
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs
Première Loge

Pour ne rien manquer de l'actualité lyrique, restons en contact !

ProductionCompte renduVu pour vous

Les festivals de l’été –
Médée et Jason au Nouveau Festival Radio-France Montpellier

par Sabine Teulon Lardic 22 juillet 2023
par Sabine Teulon Lardic 22 juillet 2023

© Marc Ginot

© Marc Ginot

© Marc Ginot

© Marc Ginot

© Marc Ginot

© Marc Ginot

© Marc Ginot

0 commentaires 5FacebookTwitterPinterestEmail
1,5K

L’opéra monté au Nouveau Festival Radio-France Occitanie Montpellier est Médée et Jason, reconstitution de musiques du XVIIIe siècle français, dans la veine des parodies. Sur la scène de l’Opéra-Comédie de Montpellier, la complicité des chanteurs et des musiciens de l’ensemble Les Surprises a réjoui le public par un humour décomplexé.

« Faire Théâtre » par un collage de savoureuses parodies

Jusqu’alors, l’engouement pour l’opéra baroque français a privilégié la tragédie lyrique, de Lully à Rameau, sans oublier la Médée de Charpentier (au TCE la saison dernière – voir ici le compte rendu qu’en avait fait notre collègue Pascal Lelièvre). Si Platée demeure une exception tragi-comique, le riche répertoire comique des foires Saint-Germain et Saint-Laurent est en revanche plutôt ostracisé, hormis au Théâtre de l’Opéra-Comique qui en est l’héritier : voir la parodie Pierrot et Cadmus, recréé en 2008.

Dans le spectacle Médée et Jason, parodie de Romagnesi (1717, 1736), le drame mythologique est au cœur de l’action. Le héros de la Toison d’or (Jason) abandonne sa compagne Médée, mère de leurs enfants, afin d’épouser la fille du roi Créon. Pour se venger, la magicienne Médée incendie le palais et commet l’irréparable : le double infanticide. Ici, le tragicomique s’accommode de la caricature de la noblesse mythologique, sans esquiver des scènes de trivialité. Cette humour non consensuel est celui que pratiquaient les parodistes désinhibés avec la contribution de musiciens qui taillaient leurs airs ou les vaudevilles (airs sur des paroles nouvelles adaptant des chansons connues).

En 2023, comment « faire Théâtre » (A. Vitez) avec ces matériaux disparates ? Grâce à la collaboration du Centre de musique baroque de Versailles (CMBV) et de l’ensemble Les Surprises, la parodie est construite autour de l’opéra-cible, Médée (1693) de M-A Charpentier sur un livret de Thomas Corneille. Leur collage hétérogène de pièces, de Campra jusqu’à Rameau (voir la rubrique « Programme »), est cousu à un scenario parlé qui conte les péripéties (textes de Corneille, Carolet et Romagnesi, 1736). Place à « l’enfer qui braille » dixit la magicienne Médée, au dark maquillage grunge, vêtue en torero avec bas et muleta rose, maîtresse de l’arène.

La réalisation scénique est simple et plutôt économe. Devant un théâtre des tréteaux, posé en fond de scène à la manière « foires parisiennes 1720 », les acteurs chanteurs et deux danseurs donnent vie à la pantomime, introduite par un bateleur à la tête carnavalesque « Grand Siècle ». L’interprète en est l’astucieux metteur en scène et scénographe Pierre Lebon, qui métamorphose la scène en une dystopie antique à la Monty Python. Jason est un dandy bouffon, dragueur irrépressible ; le roi Créon, un vieillard cacochyme sur brancard, et sa fille (Créuse), une bécasse en jupon vert, tandis que la confidente Cléone, balai en main, semble autant servante que sorcière baroque. Bonne idée qui relie la dystopie au lieu d’Argos : tous les musiciens, vêtus en marins rouges (costumes :  Floriane Breau), sont soit regroupés à Cour autour du chef et claveciniste Louis-Noël Bestion de Camboulas, soit itinérants pour se mêler aux pantomimes et danses. Le tout s’anime avec une spontanéité, un sens du collectif (scène de l’incendie déclenché par Médée) probablement rodé depuis la création du spectacle au Festival d’Hardelot (30 juin 2023). On peut cependant regretter l’importance accordée au parler (surtout pour le rôle-titre) en rapport du chanté-joué.

Des interprètes qui réinventent

Réinventer les codes de la parodie : le chef Louis-Noël Bestion de Camboulas s’y emploie en concertation du directeur musical du CMBV, Benoît Dratwicki. Leurs trouvailles des airs, des timbres (retrouver les mentions « sur l’air de ») et de rares chœurs baroques rencontrent les collages humoristiques de la mémoire collective : un tango, les effluves du Bal de Berlioz ou les scansions du Sacre du Printemps traversent le spectacle, en toute hétérogénéité. Les Surprises s’adaptent avec sûreté rythmique à ce manteau bigarré d’Arlequin, en dépit d’une formation modeste – 2 dessus de violon, deux vents et le continuo à trois instrumentistes – néanmoins proche des formations historiques de la Foire. On souhaiterait toutefois plus de nervosité chez les basses et davantage de volume pour tous les mélodrames (parlé sur soutien instrumental) couverts par les trépignements sur le plateau.

Comme dans les tragédies-cibles, la Médée de cette parodie est libre et rebelle, toujours dotée de pouvoirs surnaturels. Lucile Richardot lui confère cette personnalité émancipée lors de ses apparitions surnaturelles : son aura, son timbre si singulier font feu de tout bois dans le style baroque qu’elle a intensément fréquenté. Le public la découvre en comédienne investie durant ses deux longs face-à face avec Jason : son naturel, ses mimiques et sa joie de participer sont communicatives. En Jason, Flannan Obé est un fieffé bateleur, dont la déclamation d’emphase exagérée fait mouche : le public se plie de rire lors de son numéro sur les pleurs. Ses rares contributions vocales sont un peu justes. La Créuse d’Ingrid Perruche est également très à l’aise dans l’imitation déformante du jeu tragique, et convaincante dans ses airs, notamment face à la rivale Médée. Le baryton Matthieu Lécroart (Créon) séduit par l’aisance vocale d’un roi mégalo, prêt à « vendre » sa fille au héros guerrier. L’Arcas de Pierre Lebon assume clairement l’introduction parlée du spectacle, celle qui instruit le public sur les codes de la parodie, tandis que les danseurs sont de souples démons (Xavier-Gabriel Gocel et Gabriel-Ange Brus) et des choristes tout à fait polyvalents. Bizarrement, le moment de grâce surgit vers la fin du spectacle, lors de l’air la soprano Eugénie Lefebvre (Nérine). Elle en détaille le beau phrasé, avant que le sublime chœur de déploration (de Dauvergne) ne replace l’humain au cœur du spectacle

En conclusion, cette fabrique du spectacle parodique est rafraichissante, même si le public, aux réactions mitigées, n’en maîtrise pas tous les codes. En effet, la question de l’autonomie de la parodie est posée :  faut-il renouer avec la proximité de l’opéra-cible et de sa parodie ? Quoiqu’il en soit, ce spectacle humoristique démontre que la désacralisation lyrique de l’Olympe n’a pas débuté avec Offenbach et ses acolytes !

Pour aller plus loin 

  • Louis-Noël Bestion de Camboulas, invité de Jean-Baptiste Urbain dans Musique Matinsur France Musique, 15 mai 2023
Les artistes

Médée : Lucile Richardot
Jason : Flannan Obé
Créuse : Ingrid Perruche
Créon : Matthieu Lécroart
Cléone, Nérine : Eugénie Lefebvre
Arcas : Pierre Lebon
Danseurs – chanteurs : Xavier-Gabriel Gocel et Gabriel-Ange Brus

Ensemble Les Surprises, dir. Louis-Noël Bestion de Camboulas
Mise en scène, scénographie et costumes : Pierre Lebon
Lumières : Bertrand Killy
Costumes :  Floriane Breau
Conseiller musical :  Benoit Dratwicki

Le programme

Médée et Jason

Reconstitution sur le texte de la parodie de Médée ; extraits d’opéras de J.-B. Lully, J. B. de Boismortier, A. Dauvergne, M.-A. Charpentier, J.-B. Rameau, A. C. Destouches, J.-J. C. de Mondonville, A. Campra, M. Marais, J.-F. Salomon ; textes de Corneille, Carolet et Romagnesi
Opéra Comédie Montpellier, Représentation du mercredi 19 juillet 2023

image_printImprimer
Ingrid PerrucheEugénie LefebvreLucile RichardotMatthieu LécroartFlannan ObéLouis-Noël Bestion de CamboulasPierre Lebon
0 commentaires 5 FacebookTwitterPinterestEmail
Sabine Teulon Lardic

Sabine Teulon Lardic est chercheure à l'université de Montpellier 3. Spécialiste de l'opéra-comique du XIXe siècle et des spectacles lyriques dans les Théâtres de plein air (XIXe-XXIe siècles), elle a collaboré aux volumes collectifs de Carmen Abroad (Cambridge Press), The Oxford Handbook of the Operatic Canon (Oxford Press), Histoire de l'opéra français, t.3 (Fayard, 2022). Elle signe également des articles pour les programmes de salle (Opéra-Comique, Opéra de Montpellier) ou la collection CD du Palazzetto Bru Zane.

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Sauvegarder mes informations pour la prochaine fois.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

post précédent
Les festivals de l’été –
DELLA GLORIA D’OTELLO… : Électrisante version de concert du chef-d’œuvre de Verdi au Grand Théâtre de Provence
prochain post
Un danois à Montpellier : Michael Schønwandt

Vous allez aussi aimer...

À Liège, Faust et Marguerite approfondissent leur connaissance...

15 septembre 2025

La Bohème revient à l’Opéra Bastille dans la...

14 septembre 2025

Les festivals de l’été – Lisbonne – JULIE de...

9 septembre 2025

Les festivals de l’été –Ottavio plus : un...

5 septembre 2025

Les festivals de l’été –Operafest de Lisbonne : Didon...

1 septembre 2025

Les festivals de l’été – Verdi réinventé :...

1 septembre 2025

Les festivals de l’été –PARSIFAL à Bayreuth : sexe,...

1 septembre 2025

Les festivals de l’été –À Innsbruck, l’IPHIGÉNIE de...

31 août 2025

Les festivals de l’été –L’émouvante Cio-Cio San de...

30 août 2025

Les festivals de l’été –ANDREA CHENIER : le...

30 août 2025

Annonces

OPERAFEST LISBOA & OEIRAS 2025

En bref

  • Les brèves de septembre –

    12 septembre 2025
  • La vidéo du mois – TERESA BERGANZA chante Gluck

    7 septembre 2025

Humeurs

  • Édito de mars –
    Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

La vidéo du mois

Édito

  • Édito de septembre –
    L’opéra aujourd’hui : marcher – et chanter – sur des œufs !

    2 septembre 2025

PODCASTS

PREMIÈRE LOGE, l’art lyrique dans un fauteuil · Adriana Gonzàlez & Iñaki Encina Oyón – Mélodies Dussaut & Covatti

Suivez-nous…

Suivez-nous…

Commentaires récents

  • Stéphane Lelièvre dans LA RONDINE, Puccini (1917) – dossier
  • Panossian dans Les festivals de l’été –
    TRISTAN ET ISOLDE à Bayreuth : une mise en scène figée dans la mort
  • Wim Nikolas Wiemert dans LES ITALIENS À PARIS (9) : Donizetti, Les Martyrs (1840)
  • Stéphane Lelièvre dans In memoriam : Bob Wilson (1941-2025)
  • Repetto Robert dans LA RONDINE, Puccini (1917) – dossier

Première loge

Facebook Twitter Linkedin Youtube Email Soundcloud

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Login/Register

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Rechercher

Archives

  • Facebook
  • Twitter
  • Youtube
  • Email
Première Loge
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs

A découvrirx

À Liège, Faust et Marguerite approfondissent...

15 septembre 2025

La Bohème revient à l’Opéra Bastille...

14 septembre 2025

Les festivals de l’été – Lisbonne –...

9 septembre 2025