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Film – West side story : Spielberg ré-enchante le drame lyrique de Bernstein

par Stéphane Lelièvre 12 décembre 2021
par Stéphane Lelièvre 12 décembre 2021
© Niko Tavernise - 2020 Twentieth Century Fox Film Corporation. All Rights Reserved.
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Steven Spielberg ré-enchante le drame lyrique de Bernstein, qui n’a rien perdu de sa force d’émotion et dont le propos apparaît plus que jamais d’une brûlante actualité.

Un chef-d'œuvre universel

La comédie musicale a eu certaines difficultés à s’acclimater à la France, sans doute parce qu’alors qu’elle émergeait dans les pays anglo-saxons, notre pays possédait déjà, de l’opéra à l’opérette via l’opéra-bouffe et l’opéra-comique, une riche et longue tradition de musiques dramatiques. Même les chefs-d’œuvre de Sondheim, récemment disparu – et par ailleurs auteur des lyrics de West side story – restent relativement peu connus du grand public.

West side story, cependant, échappe à la règle. Créé le 26 septembre 1957 au Winter Garden Theatre de Broadway et immortalisé quatre ans plus tard par le film de Robert Wise et Jerome Robbins, ce « drame lyrique » est un chef-d’œuvre universel, proposant une adaptation bouleversante et infiniment subtile et intelligente du Roméo et Juliette de Shakespeare, magnifiée par la musique du génial Leonard Bernstein qui, au-delà du lyrisme irrésistible de certains tubes (« Maria ! ») et de la séduction immédiate de 

rythmes jazzy ou latinos, donne à entendre une musique souvent plus riche que celles entendues dans d’autres œuvres ressortissant au même genre : orchestre coloré (celui de la création comportait un trentaine de musiciens), constructions savantes (le quintette « Tonight » de la fin du premier acte), voire certaines possibles citations de musiques dites savantes : je n’ai, par exemple, jamais pu m’empêcher d’entendre, derrière le motif qui apparaît à la fin de « Somewhere », que chante Maria dans « I have a love » face à Anita et que l’orchestre reprend lors de la procession funèbre qui clôt l’œuvre, un écho lointain du motif de la Rédemption par l’amour du Ring de Wagner…

Un casting tout simplement idéal

De fait, les musiciens classiques tentent parfois l’aventure et s’essaient à interpréter la musique de Bernstein : dans la suite orchestrale que le compositeur tire de son œuvre en 1961, mais aussi parfois dans les parties chantées, comme dans la version discographique enregistrée pour Deutsche Grammophon en 1986 par Bernstein lui-même. Une version qui ne tient pas tout à fait toutes ses promesses : la direction de Bernstein est flamboyante, Marilyn Horne impériale (mais dans le seul «Somewhere»), Tatiana Troyanos parfaite. Mais le couple de héros reste un tant soit peu guindé, Kiri Te Kanawa surtout, toujours un peu Comtesse des Noces égarée à Manhattan…

Rien de tel dans la version de Steven Spielberg : les acteurs, outre leur talent de comédiens, révèlent tous des dons de chanteurs (oui, ce sont bien eux qui chantent, contrairement à la version de 1961, ce qui permet une transition entre les scènes parlées et les scènes chantées des plus naturelles) et de danseurs absolument exceptionnels. (Ils sont accompagnés par les Orchestres philharmoniques de New York et de Los Angeles, dirigés par un Gustavo Dudamel impeccable de dynamisme et d’émotion). Le casting se révèle d’ailleurs tout simplement idéal, chaque acteur faisant corps avec son personnage, d’Ansel Elgort (Tony au visage d’adolescent grandi trop vite, empreint d’une indélébile mélancolie, bouleversant lorsqu’il laisse couler ses larmes alors que le révolver qu’il tente de subtiliser à Riff lui échappe), à la toute jeune Rachel Zegler, délicieuse Maria aux grands yeux noirs si expressifs, ou encore Ariana DeBose, magnifique Anita, bouleversante lorsqu’elle doit faire face à la mort de Bernardo, à sa propre douleur et à celle de Maria… Les seconds rôles sont éblouissants et tous criants de vérité, avec une mention spéciale pour Mike Faist (Riff), Josh Andrés Rivera (qui donne à Chino une épaisseur et un intérêt inhabituels) et surtout Rita Moreno, 90 printemps, qui tenait le rôle d’Anita dans le film de 1961 et qui incarne ici Valentina, vieille dame responsable du drugstore que tient Doc dans l’œuvre originale, elle-même mariée à un Américain, complice de Tony, et à qui échoit le fameux « Somewhere »…

Fallait-il proposer une nouvelle adaptation cinématographique du chef-d’œuvre de Bernstein ?

Fallait-il finalement, après Robert Wise et Jerome Robbins, proposer une nouvelle adaptation cinématographique du chef-d’œuvre de Bernstein ? La réponse est oui, sans hésitation, tant la version de Spielberg ne se confond jamais avec celle de ses devanciers. La tonalité du film de 2021 est plus sombre que celle de la première version : les ballets lumineux et aériens de  Wise/Robbins prennent corps ici dans un décor sinistre éclairé d’une lumière froide : celui d’un quartier en démolition, symbole de l’absence de repères et d’attaches de jeunes en perdition (la lutte des deux clans pour garder la mainmise sur ce territoire n’en devient que plus absurde et dérisoire…) ; les nouveautés insérées dans le scénario (signé Tony Kushner !) sont toutes d’une très grande pertinence (le personnage de Valentina, l’ensemble « Cool » devenant une lutte entre Riff et Tony pour la possession du revolver qui fera basculer l’intrigue dans la tragédie,

le duo « One Hand, One Heart » chanté par Maria et Tony lors d’une escapade dans les Cloisters, le sinistre hangar où se déroule la rixe au cours de laquelle Riff et Bernardo perdent la vie,…). La réalisation de Spielberg, éblouissante, regorge de trouvailles bienvenues (magnifique rencontre entre Tony et Maria derrière la piste de danse du Gymnase…) et surtout, elle prend constamment appui sur la musique de Bernstein, traitée comme une véritable bande-son, les effets musicaux venant rythmer les effets visuels avec une précision et une efficacité incroyables : à cet égard, le quintette « Tonight », avec son montage serré de plans très courts, ou la scène d’ouverture, avec l’apparition progressive des Jets et le ballet qui s’ensuit sont absolument éblouissants… D’une manière générale, les numéros dansés sont époustouflants et supportent très largement la comparaison avec ceux de la version originale.

Une dernière raison d’aller voir le film de Spielberg ? Rarement le message humaniste porté par les œuvres de Shakespeare, Bernstein, Sondheim et Laurents aura retenti avec autant d’à propos, pour ne pas dire d’urgence, et l’on est surpris du caractère éminemment actuel du discours : racisme, intolérance, violence gratuite, refus assumé de la réflexion et du débat, refus d’intégrer ou de s’intégrer, auxquels s’opposent la tempérance, l’amour, le pardon,… L’œuvre, on le sait, s’achève sur un (mince) rayon d’espoir. On aime à croire qu’il viendra à son tour éclairer notre présent, hélas bien sombre…

Les artistes

Tony : Ansel Elgort 
Bernardo : David Alvarez 
Riff : Mike Faist 
Chino : Josh Andrés Rivera
Le lieutenant Schrank : Corey Stoll
Le sergent Krupke : Brian d’Arcy James
María : Rachel Zegler
Anita : Ariana DeBose 
Valentina : Rita Moreno

Réalisation : Steven Spielberg
Scénario : Tony Kushner, d’après la comédie musicale West Side Story 
Direction artistique : Deborah Jensen
Décors : Adam Stockhausen
Costumes : Paul Tazewell
Photographie : Janusz Kamiński
Montage : Michael Kahn

Le programme

West side story

Film de Steven Spielberg, scénario de Tony Kushner, d’après la comédie musicale West Side Story de Leonard Bernstein (livret d’Arthur Laurents, lyrics de Stephen Sondheim).

Sortie française : 08 décembre 2021

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Bernstein
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

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