Opéra en un acte de Philippe Boesmans, livret de Luc Bondy et Marie-Louise Bischofberger, créé à la Monnaie de Bruxelles le 8 mars 2005.
LES AUTEURS
Le compositeur

Philippe Boesmans (1936-2022)
Philippe Boemans est né en Belgique en 1936. Sa passion pour Wagner le conduit à la composition musicale : musique instrumentale, mais aussi opéras. Influencé par le sérialisme, il choisit d’en dépasser les contraintes et s’applique à retrouver une véritable communication avec l’auditeur. Dans sa riche production lyrique, citons La Passion de Gilles (1983, Bruxelles) ; Reigen (1993, Bruxelles) ; Wintermärchen (1999, Bruxelles) ; Julie (2005, Bruxelles); Yvonne, princesse de Bourgogne (2009, Paris).
Ces ouvrages rencontrent le plus souvent un réel succès critique et public, ce dont témoigne le fait qu’ils aient fait l’objet de reprises dans divers théâtres du monde – un phénomène relativement rare pour les opéras contemporains. L’œuvre de Philippe Boesmans a été récompensée par le prix Honegger en 2000, et par le Prix Musique de la SACD en 2004.
Philippe Boesmans meurt le 10 avril 2022 à Bruxelles.
Les librettistes

Luc Bondy (1948-2015)
Luc Bondy est essentiellement connu comme metteur en scène de théâtre et d’opéra (parmi ses mises en scènes lyriques, signalons celles de Lulu et Wozzeck à Hambourg, Yvonne, Princesse de Bourgogne à Cologne, Cosi fan tutte et Julie à Bruxelles, Don Carlos à Paris). Mais il fut aussi directeur de théâtre (il dirigea le Théâtre de l’Odéon de 2011 à 2015), réalisateur (Die Ortliebschen Frauen, 1979 ; Terre étrangère, 1988 ; Ne fais pas ça, 2004), acteur et auteur. En tant qu’écrivain, il signa plusieurs scénarios de films ou téléfilms, divers ouvrages parus chez Grasset ou Christian Bourgois, mais également quatre livrets d’opéras : Reigen, Wintermärchen, Julie, Yvonne, Princesse de Bourgogne (musique de Boesmans).

Marie-Louise Bischofberger (1948-2015)
Née en Suisse, Marie-Louise Bischofberger suit des cours de théâtre à l’Ecole Florent, puis au Deutsche Teater Berlin et à la Schaubühne de Berlin. Elle se consacre au théâtre en tant que metteuse en scène ( Au But de Thomas Bernhard ; La Fin de l’amour de Christine Angot ; Visites de Jon Fosse ; Le Viol de Lucrèce de Shakespeare ; Sonate d’automne de Bergman), conseillère dramaturgique mais aussi auteure. Elle a notamment cosigné les livrets du Conte d’hiver et de Mademoiselle Julie de Philippe Boesmans avec Luc Bondy.
L'ŒUVRE
La création et la fortune de l'œuvre

Julie est créé le 8 mars 2005 à La Monnaie de Bruxelles. Patrick Davin et Kazushi Ōno dirigeaient l’Orchestre de chambre de la Monnaie, la mise en scène était signée Luc Bondy, les décors étaient conçus par Richard Peduzzi.
La création est un succès, que confirment les reprises viennoises et aixoises. La production fait l’objet d’une publication en DVD.
L’œuvre a depuis été régulièrement reprise : Paris (Théâtre de l’Athénée Louis-Jouvet, 2010), Opéra national de Lorraine et de Dijon (2022), Lisbonne (2025, Operafest)…
Le livret
La source littéraire
Le livret s’inspire de la pièce Mademoiselle Julie, pièce emblématique du kammerdrama nordique de la fin du XIXe siècle, de l’écrivain suédois August Strindberg (1889). Cette pièce fit l’objet d’une adaptation cinématographique en 1951, signée Alf Sjöberg. Le film reçut la Palme d’Or au Festival de Cannes.
L’intrigue
L’argument mêle combat des sexes, réflexion sur les assignations sociales et le poids des conventions morales : alors que la fête bat son plein dans le château du comte pendant la nuit de la Saint-Jean, sa fille Julie (mezzo-soprano) aguiche le serviteur Jean (baryton), fiancé à la femme de chambre Kristin (soprano). D’abord réticent, Jean entre peu à peu dans son jeu de séduction, entrevoyant une occasion d’élévation sociale. Ils passent la nuit ensemble et, au réveil, Jean tente de convaincre Julie de fuir et d’aller ouvrir avec lui un hôtel en Suisse. La fille du comte avoue alors qu’elle n’a aucune fortune, mais accepte de voler l’argent de son père pour financer leur fugue. Lorsque Kristin vient chercher son fiancé pour se rendre à l’église, elle comprend ce qui se trame et le convainc de renoncer à ses projets. Résigné et dépité, Jean incite par vengeance Julie à mettre fin à ses jours…
La partition
Julie est un opéra bref (un peu plus d’une heure de musique) nécessitant un petit orchestre :
- vents : flûte, hautbois, clarinette, basson ;
- cuivres : 2 cors, trompette, trombone ;
- cordes : 2 violons, 2 altos, violoncelle, contrebasse ;
- deux percussionnistes, harpe, piano.
Cet orchestre chambriste se garde bien de surligner le drame : la musique de Boesmans distille un lyrisme tout en clair-obscur qui rappelle par moment le Britten de l’English Opera Group. Attachant autant d’importance à accompagner les émotions des personnages qu’à faire entendre leurs paroles (texte chanté en allemand), elle procède par courtes cellules timbriques et ponctuation d’alliances sonores où la riche percussion fait merveille. Constamment au service du drame, elle accompagne ou prolonge le texte en en dessinant les arêtes ou en en précisant les non-dits. L’oeuvre nécessite un grand engagement vocal et scénique des deux principaux rôles (Julie, mezzo-soprano, et Jean, baryton), et une grande maîtrise technique pour l’interprète du rôle de Kristin, qui doit évoluer avec aisance dans le haut de la tessiture de soprano.
NOTRE SÉLECTION POUR VOIR ET ÉCOUTER L'ŒUVRE
DVD et Blu-ray

Ōno, Bondy / Ernman, Magee, Avemo. Orchestre de chambre de la Monnaie de Bruxelles. Festival d’Aix-en-Provence, 2005. 1 DVD Bel Air Classiques.