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Les Noces de Figaro à Garnier : un opéra déconstruit

par Ivar kjellberg 20 novembre 2025
par Ivar kjellberg 20 novembre 2025

© Franck Ferville - OnP

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Les Noces de Figaro, Opéra Garnier, samedi 15 novembre 2025

Réaligner un opéra avec le Zeitgeist peut offrir de belles occasions pour dépoussiérer des intrigues connues de tous, et donner lieu à de belles prises de risques. Alors un Figaro version #metoo… pourquoi pas en fin de compte ? 

Reprise d’une mise en scène crée par Netia Jones en 2022, plus que de moderniser il s’agit de donner un nouveau cadre, littéralement, à l’opéra de Mozart. Donner une envergure d’actualité est toujours un pari risqué, surtout quand il est lié à un court instant dans l’actualité. Mais la déflagration qu’a été le mouvement #metoo a mis un certain temps à arriver dans le monde classique, où pourtant ces pratiques étaient aussi institutionnalisées que dans le milieu du cinéma par exemple. Ainsi donc on est encore assez proche du moment de rupture qu’a été la prise de parole des femmes contre les agressions sexistes et sexuelles pour que la mise en scène ne perde pas en rien de son impact.  

Mais que vient faire Mozart dans tout cela ? On ne serait pas loin de penser que Mozart ne vient que donner un cadre musical à une revendication, alors qu’il s’agit de l’inverse. L’intrigue de Beaumarchais allant mettre en lumière les petites hypocrisies de la bourgeoisie, elle devient dans les mains de Jones un outil pour dénoncer les VSS commises par un directeur d’opéra, notre cher Comte Almaviva, qui entre deux auditions où on le voit apparaître en serviette, ou s’approcher trop près de danseuses, a jeté son dévolu sur Susanna, la costumière fiancée à Figaro. Cette dernière travaillant avec notamment la Diva la comtesse Almaviva, épouse délaissée du comte. Marcellina, Barbarina, Don Basilio, s’intègrent complètement à cette nouvelle intrigue, comme autant de personnages travaillant dans le monde de l’opéra, et intriguant pour leurs intérêts. Cherubino devient un ado au flirt insistant et tournant tout autour de la comtesse mais aussi des danseuses ou de Susanna. 

Dans l’absolu, cela fonctionne. Grâce au recours astucieux de décors inversés (tel Magritte, on ne voit pas le côté cour, on voit le panneau indiquant “côté cour”) pensés par Netia Jones : on voit le devant et l’arrière des loges, les rangs de costume et enfin le retour à la scène comme dénouement de toutes les vérités qui se cachaient en coulisse.

Aidés par des jeux de lumière de Lucy Carter soulignant certains éléments de décors, l’impression de découvrir l’envers de la scène est renforcée par le découpage en trois loges pour y faire avancer l’action. On aura plus de doutes sur les projections d’extraits de dialogues en diverses langues ou d’ombres chinoises n’apportant pas grand-chose. Sauf sans doute, la réflexion de Beaumarchais sur les nuisances causées aux femmes par les hommes, correspondant à lair de Marcelline que la metteuse en scène a choisi de couper, et apparaissant, à propos, en gros sur le panneau central à l’approche du dernier acte. Un moment fort, même si la démarche laisse croire que Mozart et son librettiste avaient choisi expressément de ne pas dénoncer les violences faites aux femmes, alors que Marcellina, dans son air, estime que les hommes sont pires que  « les animaux les plus féroces » et dit très clairement : « Mais nous pauvres femmes, /qui aimons tant ces hommes, /sommes traitées par les perfides /avec une cruauté constante »…
La vision de la metteuse en scène ne perturbe pas le déroulé de l’intrigue,
 qui suit son cours avec juste quelques touches « #metoo » en toile de fond;  et l’amour reprend ses droits à la fin de l’oeuvre,  même si le Comte Almaviva se voit démasqué à la toute fin du spectacle.

L’ensemble fonctionne également grâce aux chanteurs, tous incarnant fort bien leur personnage. Avec en tête de file Sabine Devieilhe, dont on admire ici un instinct comique très sûr, et évidement une voix effilée et agile collant parfaitement au rôle de Susanna. Sa sérénade “Deh vieni non tardar…” très délicate et au tempo laissant à quasi infinimentla voix la possibilité de se déployer  déployer quasi infiniment, reste un très beau moment de poésie. Hanna-Elizabeth Müller, avec un timbre plus rond et aux teintes plus veloutées offre un “Porgi Amor” plein de grâce et de nostalgie.

Gordon Bintner peine quelque peu à rentrer vocalement dans le costume de Figaro : malgré une technique aguerrie, la voix ne remplit pas toujours la salle(son “Non Piu andrai…” n’étant pas toujours audible). Il convient de saluer le comte de Christian Gerhaher, plein de verve et d’une indignation que l’on retrouve dans une projection puissante et une articulation impeccable. Cette production bénéficie également de forts beaux rôles de compléments : Leonard Cortellazzi incarne un Don Basilio plein de malice, tandis que James Creswell et Monica Barcelli, en Bartolo et Marcellina, donnent respectivement une dimension vaudevillesque à leur personnage, avec une mention spéciale à Creswell qui,  par un simple détail, n’est pas loin ici ou là de voler la vedette aux autres personnages ! Barcelli, elle, démontre une voix certes légère mais aux aigus soyeux et sans aucune aigreur. Ilanah Lobel-Torres, Franck Leguérinel et Nicholas Jones tirent fort bien leur épingle du jeu grâce à un bon alliage entre sens comique et prise vocale impeccable. L’incarnation la plus inattendue, sans doute, reste Léa Desandre très convaincante en Cherubino façon ado en jogging casquette. On savait que la mezzo pouvait explorer une grande variété de registres (avec notamment son spectacle Chasing Rainbows) : ici, son jeu de scène, si éloigné de ses Théodora tragiques,  laisse à penser qu’il y a également un potentiel comique à investir, tout comme chez sa consœur Sabine Devielhe.  

Antonello Manacorda, sans proposer une relecture musicale révolutionnant notre vision de l’oeuvre, fait briller l’Orchestre et les chœurs de l’Opéra national de Paris, offrant avec cet opéra une belle fin d’année aux Mozartiens prêts à (re)découvrir cette inventive adaptation. 

Les artistes

Il Conte di Almaviva : Christian Gerhaher 
La Contessa di Almaviva : Hanna-Elisabeth Müller 
Figaro : Gordon Bintner 
Susanna : Sabine Devieilhe 
Cherubino : Lea Desandre 
Marcellina : Monica Bacelli 
Bartolo : James Creswell 
Don Basilio : Leonardo Cortellazzi 
Don Curzio : Nicholas Jones 
Barbarina : Ilanah Lobel-Torres 
Antonio : Franck Leguérinel 
Due donne : Sima Ouahman, Daria Akulova 

Orchestre et Chœurs de l’Opéra National de Paris, dir. Antonello Manacorda 
Chef des Chœurs : Alessandro Di Stefano 
Mise en scène, décors, costumes : Netia Jones 
Lumières : Lucy Carter 
Chorégraphie : Sophie Laplane 
Collaboration à la mise en scène : Glen Sheppard 
Collaboration à la vidéo : Ian Winters & Lightmap 
Dramaturgie : Solène Souriau 

Le programme

Le Nozze di Figaro

Opera buffa en 4 actes de Wolfgang Amadeus Mozart, livret de Lorenzo da Ponte d’après Beaumarchais, créé le 1er mai 1786 au Burgtheater de Vienne.
Paris, Opéra Garnier, reprtésentation du samedi novembre 2025.

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Netia JonesGordon BintnerHanna-Elisabeth MüllerSabine DevieilheLea DesandreChristian GerhaherAntonello Manacorda
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Ivar kjellberg

Habitué de longue date du TCE et pianiste amateur, Ivar Kjellberg est venu à l'art lyrique grâce à ses parents, qui faisaient sonner Wagner dans tout l'immeuble pour l'amuser. Grand fan des interprètes des années 70 et de l'opéra allemand, Ivar peut écouter en boucle les disques d'Edda Moser et d'Hermann Prey avant d'enchaîner... sur un bon Offenbach !

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