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À Gênes, une NORMA qui n’a pas peur du vide et qui touche juste

par Marie Gaboriaud 12 mai 2023
par Marie Gaboriaud 12 mai 2023

© Teatro Carlo Felice - Genova

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Un spectacle scéniquement abouti, avec, dans le rôle-titre, une Vasilisa Berzhanskaya qui touche les étoiles !

À Gênes, où la saison lyrique impose année après année un répertoire italien hégémonique qui ne concède que quelques parenthèses au cousin transalpin, le wagnérien exilé se sent parfois nostalgique. Heureusement, le destin réserve de belles surprises : dans la dernière production de l’opéra Carlo Felice, c’est la force des Walkyries qui a pris possession de la scène à travers la musique de Bellini.

Il s’agit sans doute de la proposition la plus réjouissante de cette saison. La Norma de Riccardo Minasi (direction) et Stefania Bonfadelli (mise en scène) fait honneur à la particularité de l’opéra de Bellini, rarissime œuvre lyrique du répertoire qui mette en scène un duo féminin solidaire et puissant. Fait original, les deux distributions ne donnent pas la même œuvre. S’appuyant sur le travail qu’il a lui-même fourni sur l’édition critique de Norma, Riccardo Minasi donne les deux versions de la pièce : la version originale, et la version remaniée ensuite par Bellini, pour abaisser par exemple Casta Diva d’un ton, de sol majeur à fa majeur, pour des raisons pratiques évidentes.

Stefania Bonfadelli choisit de concentrer les effets dramatiques sur les lumières, sans tirer parti – contrairement à la plupart de ses confrères et consœurs – des formidables machineries du Carlo Felice. La scène inclinée qui constitue l’élément principal de la scénographie, restera donc fixe durant les deux actes du spectacle, seulement agrémenté de pierres suggérant les menhirs, se transformant au gré des lumières (grâce au travail de Daniele Naldi) en prairie, en sol de marbre ou de béton, tandis que le gros du décor est confié à des éléments verticaux, noirs, coulissant latéralement et créant à loisir une antichambre ou le péristyle d’un temple, ainsi qu’à des projections vidéos qui évitent tout mauvais goût. À rebours de la tradition, les prêtresses sont coiffées d’un chignon, vêtues de tenues guerrières aux tons sombres, de bottes à talon plat, d’un corset métallique, et d’une cape claire qu’elles revêtent lors des scènes de cultes. Qu’il est rafraîchissant de voir enfin autre chose que des tuniques drapées, et se matérialiser dans les costumes la force de ces personnages féminins, force religieuse, politique et morale. La mise en scène prend le parti pris de la sobriété, que ce soit dans les costumes, les lumières, le décor, la direction des chanteurs, sans pour autant tomber dans le travers de la nudité ou de la fadeur. C’est au contraire la simplicité des choix scéniques qui rend tout le tragique de l’œuvre. Ainsi, les « tableaux vivants » qui jouent sur l’immobilité du chœur, mettent à contribution le hors champ du fond de la scène, ou les moments de silence assumés, contrebalancent et soulignent tout à la fois les moments les plus tragiques et donnent à cette production une grande intensité dramatique.

Dans le rôle-titre, la jeune mezzo russe Vasilisa Berzhanskaya touche les étoiles. D’une présence scénique d’autant plus impressionnante qu’elle choisit la sobriété et évite toute affectation, elle campe une Norma impérieuse, rentrée, complexe, lumineuse, à travers une justesse de jeu impeccable d’un bout à l’autre, fidèle à l’ « éclatante austérité » (« splendente austerità ») que son amie lit dans ses yeux. Son agilité vocale, son très beau timbre font de certains moments des instants de grâce. Au premier acte, le très attendu « Casta Diva », pris très piano, démontre une impressionnante maîtrise du phrasé et de l’intensité, un très beau vibrato (et je suis très tatillonne sur le vibrato !), sans effets inutiles, qui suspend le temps dans la salle du Carlo Felice. Les arpèges sont aussi de grands moments de poésie, même si elle n’évite pas toujours l’acidité dans l’aigu (mais qui le peut ?)
L’Adalgisa de Carmela Remigio est moins en phase avec l’atmosphère générale et son jeu est parfois un peu outré. Cependant, sa voix très sûre, puissante, tonique, agile, complète magnifiquement le duo central Norma/Adalgisa. Autant le « Mira, o Norma » que les morceaux de bravoure que sont les arpèges a capella du second acte sont relevés sans sourciller par le duo féminin.
Pour compléter le trio, Stefan Pop incarne un Pollione tonique, à la voix claire jusque dans l’aigu, d’une belle homogénéité.

Du côté de l’orchestre, beaucoup de puissance et de grâce, en particulier le solo de flûte du premier acte, puissant et lyrique, et le pupitre de cuivres qui évite de souligner la dimension parfois pompière de la partition.

Injustement sifflée par quelques esprits mesquins (c’est malheureusement une habitude au Carlo Felice que de siffler les metteurs en scène lors des premières), probablement parce que la metteuse en scène, outre le défaut d’être une femme, a aussi le culot de ne pas envelopper Norma de son sempiternel voile virginal, cette production possède au contraire une grande force. Au-delà de la beauté formelle des lumières caravagesques, elle permet de réactiver une œuvre susceptible de nous parler encore. Ainsi les accents apocalyptiques de la réplique du premier acte « Rome mourra par ses vices », lancée par une Norma résignée, ou l’accusation lancée à Pollione, « Essa non è colpevole. Il malfattor tu sei », qui résonne aujourd’hui étrangement avec la performance du collectif chilien Las Tesis « El violador eres tú », devenu hymne de révolte et de sororité dans le monde entier.

Les artistes

Norma : Vasilisa Berzhanskaya
Adalgisa : Carmela Remigio
Pollione : Stefan Pop
Oroveso : Alessio Cacciamani
Clotilde : Simona Di Capua
Flavio : Blagoj Nacoski

Orchestre et chœurs de l’OIpéra Carlo Felice de Gênes, dir. Riccardo Minasi

Mise en scène : Stefania Bonfadelli
Décors : Serena Rocco
Costumes : Valeria Donata Bettella
Chorégraphie : Ran Arthur Braun
Lumières : Daniele Naldi

 

Le programme

Norma

Tragédie lyrique en deux actes Vincenzo Bellini (1801-1835), livret de Felice Romani (1788-1865), d’après la tragédie d’Alexandre Soumet Norma ou L’infanticide, donnée pour la première fois au Teatro alla Scala, Milan, 26 décembre 1831.

Représentation du 2 mai 2023, Teatro Carlo Felice, Gênes

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stefan popVasilisa BerzhanskayaCarmela RemigioStefania Bonfadelli
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Marie Gaboriaud

Marie Gaboriaud est enseignante-chercheuse en littérature française à l'Université de Gênes. Elle est spécialiste des liens entre musique et littérature, et des phénomènes de canonisation des figures de musiciens. Elle a notamment publié "Une vie de gloire et de souffrance. Le Mythe de Beethoven sous la Troisième République" (2017), qui a été finaliste du Prix France Musique des Muses en 2018.

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