Gala des lauréats du concours Enesco, salle Gaveau, dimanche 7 décembre 2025
Ce dimanche après-midi, salle Gaveau, l’orchestre Colonne accueillait les lauréats du Concours Enesco pour un concert symphonique et lyrique centré sur l’opéra français. Au milieu d’un public enthousiaste mais pas toujours au fait des usages, on se serait cru revenu un bon siècle en arrière, du temps où les fanfares militaires interprétaient des « fantaisies » et autres arrangements sous un kiosque de place publique. Les deux Suites tirées de Carmen sont interrompues d’applaudissements nourris dès qu’un infime silence se glisse dans une mesure, mais la direction vigoureuse de Sora Elisabeth Lee explique sans doute que les auditeurs se laissent ainsi emporter par ces airs célébrissimes, même si on voudrait parfois que les violons soient un peu plus parfaitement ensemble.
Pour autant, le programme inclut aussi des œuvres de compositeurs vivants, qui seront tout aussi chaleureusement acclamées. On reste un peu dubitatif face à ce qui n’est en fait que le deuxième mouvement d’un concerto intitulé Through Flames, du jeune compositeur brésilien Jean Szulc, qui permet d’entendre l’encore plus jeune violoniste Maelys Lauriac, lauréate du Concours Edouard Colonne 2025. D’Henri Nafilyan, Roumain de Paris régulièrement honoré par les organisateurs du Concours Enesco, on entend Guyane, pièce vocale créée en 2023 dans sa version avec piano : hélas, si la mezzo espagnole Begoña Gomez a pu travailler sa diction de la séguedille de Carmen en écoutant des enregistrements, il n’en va pas de même pour Guyane, où l’on peine à comprendre quelques mots ici et là.
Quant au programme, s’il repose largement sur le quatuor Bizet – Gounod – Massenet -Offenbach, il inclut aussi une compositrice : Yingying Zong, Premier Prix du Concours Enesco, s’illustre ainsi en Marguerite de Gounod mais aussi en Margarita du Fausto de Louise Bertin, belle incursion hors des sentiers battus. La soprano chinoise possède d’incontestables moyens, et son français est clair, mis à part le son JE qui transforme « Ah, ye ris de me voir si belle », la formule chère à la Castafiore ; le trille ne semble pas tout à fait maîtrisé, cependant.
Deuxième Prix du Concours Enesco, Audrey Maignan campe une poétique Juliette dans un « Je veux vivre dans le rêve » pris à un rythme très lent, et une rêveuse Thaïs dans le duo final de cet opéra où elle a pour Athanaël le baryton québécois Dominic Veilleux, lauréat du Troisième Prix, un peu écrasé par l’orchestre dans l’air de Sancho de Don Quichotte. Titulaire de trois prix, la curieusement prénommée Max Roblain remporte un vif succès avec « Les oiseaux dans la charmille », malgré un suraigu parfois un peu arraché, et revient ensuite dans deux des Sept Chansons de Clément Marot d’Enesco qui montrent qu’elle a d’autres atouts que la colorature.
Maelys Lauriac, violon
Begoña Gomez, mezzo-soprano
Yingying Zong, soprano
Audrey Maignan, soprano
Dominic Veilleux, baryton
Max Roblain, soprano
Orchestre Colonne, dir. Sora Elisabeth Lee
Gala lyrique à la française
Jules Massenet • Airs de Manon et Werther
Charles Gounod • Airs de Faust et Roméo et Juliette
Louise Bertin • Air de Fausto
Georges Bizet • Airs et Suites n°1 et 2 de Carmen
Henri Nafilyan • Guyane
Szulc, étudiant de la classe de composition d’Olivier Calmel (Conservatoire du 12e) • création mondiale
Salle Gaveau, concert du dimanche 7 décembre 2025

