À la une
À Liège, Vincent Dujardin met platement en scène Così fan...
Pour ses 200 ans, l’Opéra d’Avignon invoque le mythe Don...
Le beau, le borgne et le boiteux : Francesca da...
Otello au Teatro Regio de Parme : la tempête Verdi...
PARME, FESTIVAL VERDI 2026 : l’exotisme à l’honneur !
Gala Verdiano 2025 à Parme : la relève verdienne sous...
10 octobre 2025 : Joyeux anniversaire, Maestro Verdi ! 212...
10-10-2025: Auguri, Maestro Verdi! 212 anni e un’intensa vitalità!
Theodora de Haendel au TCE : une martyre lumineuse
Se préparer au REQUIEM de Verdi / TEREZIN –Grand Amphithéâtre...
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs
Première Loge

Pour ne rien manquer de l'actualité lyrique, restons en contact !

Compte renduProductionVu pour vous

Pour ses 200 ans, l’Opéra d’Avignon invoque le mythe Don Giovanni

par Aurélie Mazenq 12 octobre 2025
par Aurélie Mazenq 12 octobre 2025

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

© Studio Delestrade Avignon

0 commentaires 2FacebookTwitterPinterestEmail
59

Don Giovanni, Opéra Grand Avignon, vendredi 10 octobre 2025

Par une douce soirée d’automne, la ville d’Avignon célébrait les deux cents ans de son Opéra, offrant à un public conquis un Don Giovanni à guichet fermé, retransmis en direct sur la place Saint-Didier. Un symbole fort pour inaugurer une saison placée sous le signe des mythes : pouvait-on rêver plus belle incarnation que celle de ce séducteur absolu, héraut de la liberté et de la perdition, figure éternelle de l’homme en fuite devant sa propre fin ?

Sous la direction de Débora Waldman, l’Orchestre national Avignon-Provence fait résonner dès les premières mesures les sombres accords de l’ouverture, ces battements funèbres où Mozart fait déjà danser la mort. Les cordes tremblent, les cuivres grondent. Le retour des trombones dans la partition, absents depuis Idomeneo, se fait ici pressant et spectral. Les contrastes de tempi, les respirations, les accélérations soudaines, tout concourt à traduire la tension dramatique d’une partition où le drame et le jeu s’enlacent sans cesse. Le chœur, aux intervention ponctuelles mais précises est préparé par Alan Woodbridge. Il porte avec brio ce double souffle de légèreté et d’effroi : pétillant dans les scènes de fête, glaçant dans la confrontation finale avec le Commandeur. Au continuo, Juliette Sabbah contribue efficacement à l’avancée du drame grâce à un jeu vif et imaginatif. 

La mise en scène de Frédéric Roels embrasse l’œuvre dans une lecture fluide et intemporelle. Un seul décor monumental, imaginé par Bruno de Lavenère, se métamorphose au gré des scènes : façades branlantes, arcades assombries, ouvertures qui dévoilent intérieurs et salons, places et palais. Tout respire l’instabilité, comme si le monde de Don Giovanni menaçait à chaque instant de s’effondrer. Laurent Castaingt éclaire ce labyrinthe de lumières mouvantes, tandis que les costumes de Lionel Lesire comme les éléments de décors brouillent les époques (pantalons d’époque et vestes contemporaines, chandeliers et téléphones, appareils photos pour le « catalogue » des conquêtes…) Ce mélange des temps, volontairement déroutant, sert un propos clair : Don Giovanni est un mythe, et son ombre plane sur toutes les époques.

Dans ce monde mouvant, ce sont les femmes qui mènent la danse. Eduarda Melo campe une Zerlina éblouissante, au charme mutin et à la malice désarmante. Ingénue et dominatrice tout à la fois, elle incarne la vitalité et l’intelligence d’une femme qui choisit d’aimer et d’être aimée selon ses propres termes. La voix, souple et brillante, épouse toutes les nuances de la sensualité et du jeu : on y sent la joie, la ruse et la liberté. À ses côtés, Aimery Lefèvre prête à Masetto un mélange délicieux de jalousie bourrue et de tendresse sincère. Leur duo, plein de complicité, restitue à merveille cette partition pleine de charme et de vitalité.

Anaïk Morel, en Donna Elvira, fait le choix d’une incarnation plus tourmentée que véhémente : son personnage, perpétuellement en mouvement, semble errer dans une pluie continue qui l’enveloppe comme un voile de chagrin. Le parti pris scénique, audacieux, souligne sa fidélité obsessionnelle et sa blessure, mais la voix, parfois contrainte dans les aigus, peine à s’épanouir pleinement dans ces tempêtes d’émotion. Gabrielle Philiponet prête à Donna Anna une fragilité nouvelle, celle d’une femme égarée entre la peur, le désir et le souvenir. Son allure, plus sensuelle que noble, bouscule les codes du rôle : curieuse de son agresseur, elle semble fascinée par le mal autant qu’elle le dénonce, allant jusqu’à désarmer son père dans un geste ambigu qui sauve Don Giovanni et la rend, malgré elle, complice de sa mort. Ce renversement donne à son personnage une ambiguïté troublante…

Face à elles, Armando Noguera est un Don Giovanni d’une irrésistible séduction. Flamboyant et fuyant, il court, charme, provoque et disparaît, comme happé par un désir de liberté qui n’est qu’un masque pour ses échecs et ses peurs. Son timbre, solaire et viril, se colore d’une sensualité délicate dans la célèbre sérénade à la mandoline, moment suspendu d’une grâce presque naïve. Il y livre une jolie ode au libertinage et à la liberté, qu’il accompagne lui-même aux castagnettes tout en chantant, avec une légèreté et une désinvolture délicieusement naturelles. Le baryton argentin joue avec l’orchestre comme avec son ombre, conférant à ce passage un charme aérien et une vitalité irrésistible. Il habite le rôle avec une vérité rare : son Don Giovanni n’est pas seulement un libertin, mais un homme en quête d’absolu, condamné à n’aimer que l’idée de l’amour.

Son double, Tomislav Lavoie, campe un Leporello plein de vivacité et d’esprit, dont la complicité avec son maître se nuance d’admiration et de rivalité. Sa voix ample et généreuse se prête avec aisance au fameux « catalogue », devenu ici un gigantesque album numérique : un clin d’œil intelligent à notre époque de collectionneurs d’images. Lavoie, vêtu des habits de son maître, goûte un instant à la tentation du pouvoir avant d’en comprendre le prix. Le cercle est complet : celui qui voulait fuir sa condition de valet choisit, au terme du parcours, de la retrouver, plus lucide mais non moins fidèle.

Lianghua Gong incarne un Don Ottavio délicat et sincère, fidèle à son idéal d’amour mais parfois en retrait face à la puissance des figures féminines qui l’entourent. Sa voix, douce et légère, peine parfois à s’imposer dans les ensembles, notamment dans le trio des masques où sa ligne mélodique semble se dissoudre dans la texture orchestrale. Ce manque de relief scénique traduit peut-être, malgré lui, la fadeur du personnage imaginé par Da Ponte : un homme de vertu dans un monde d’excès, spectateur plus qu’acteur du drame qui se joue.

Mischa Schelomianski, en Commandeur, incarne avec justesse cette présence spectrale et solennelle : vêtu comme un pèlerin errant, il traverse l’espace comme une figure de la mort, dernière compagne du héros.

La cohérence de l’ensemble et la direction vive de Débora Waldman offrent une soirée agréable. Tout n’est pas parfait, certes, mais tout respire la sincérité, l’énergie et le plaisir partagé. L’Opéra Grand Avignon signe ici une ouverture de saison lumineuse et accessible, fidèle à son ambition de transmission. L’accueil chaleureux du public, la présence d’élèves dans la salle et la retransmission en plein air rappellent combien l’opéra, lorsqu’il est ainsi vivant, reste une fête.

Les artistes

Don Giovanni : Armando Noguera
Donna Anna : Gabrielle Philiponet
Don Ottavio : Lianghua Gong
Il Commendatore : Mischa Schelomianski
Donna Elvira : Anaïk Morel
Leporello : Tomislav Lavoie
Masetto : Aimery Lefèvre
Zerlina : Eduarda Melo

Orchestre national Avignon-Provence, dir. Débora Waldman
Chœur de l’Opéra Grand Avignon, dir. Alan Woodbridge
Mise en scène : Frédéric Roels
Scénographie : Bruno de Lavenère
Costumes : Lionel Lesire
Lumières : Laurent Castaingt
Assistante à la mise en scène : Nathalie Gendrot
Études musicales et basse continue : Juliette Sabbah

Le programme

Don Giovanni

Dramma giocoso en deux actes de Wolfgang Amadeus Mozart, livret de Lorenzo da Ponte, créé le 29 octobre 1787 au Théâtre des États de Prague.
Opéra Grand d’Avignon, représentation du vendredi 10 octobre 2025.

image_printImprimer
Armando NogueraGabrielle PhiliponetFrédéric RoelsAnaïk MorelDébora WaldmanMischa SchelomianskiTomislav LavoieLianghua GongAimery LefèvreEduarda Melo
0 commentaires 2 FacebookTwitterPinterestEmail
Aurélie Mazenq

Tombée depuis seulement quelques années dans la potion magique de l'art lyrique, Aurélie n'a, depuis lors, de cesse de rattraper le temps perdu en sillonnant les plaques-tournantes de l'Europe opératique... à la recherche des grandes voix de demain tout en se consolant par une collection impressionnante de vinyles de ne pas avoir pu entendre celles d'hier voire d'avant-hier...

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Sauvegarder mes informations pour la prochaine fois.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

post précédent
Le beau, le borgne et le boiteux : Francesca da Rimini cent ans plus tard au  Regio de Turin
prochain post
À Liège, Vincent Dujardin met platement en scène Così fan tutte

Vous allez aussi aimer...

À Liège, Vincent Dujardin met platement en scène...

13 octobre 2025

Le beau, le borgne et le boiteux :...

12 octobre 2025

Otello au Teatro Regio de Parme : la...

12 octobre 2025

PARME, FESTIVAL VERDI 2026 : l’exotisme à l’honneur...

11 octobre 2025

Gala Verdiano 2025 à Parme : la relève...

11 octobre 2025

Theodora de Haendel au TCE : une martyre...

10 octobre 2025

ESULTATE ! : Suite d’électrisantes soirées au Teatro Real...

10 octobre 2025

Madrid : La puissance musicale et vocale de l’Iris...

8 octobre 2025

Une nuit au musée : Nancy accueille la production...

6 octobre 2025

Caudillo ma non troppo : à Reims, un Barbier...

4 octobre 2025

En bref

  • Les brèves d’octobre –

    8 octobre 2025
  • Les brèves de septembre –

    29 septembre 2025

Humeurs

  • Les années 2020 : sombre époque pour les arts, la culture, l’humanisme…

    5 mars 2025

La vidéo du mois

Édito


  • Édito d’octobre –
    « O, mia musica, si bella e perduta… » : quand le cas Venezi révèle un malaise plus profond concernant les arts et la musique en Italie

    2 octobre 2025

PODCASTS

PREMIÈRE LOGE, l’art lyrique dans un fauteuil · Adriana Gonzàlez & Iñaki Encina Oyón – Mélodies Dussaut & Covatti

Suivez-nous…

Suivez-nous…

Commentaires récents

  • Ivonne Begotti dans 10-10-2025: Auguri, Maestro Verdi! 212 anni e un’intensa vitalità!
  • Renza dans 10-10-2025: Auguri, Maestro Verdi! 212 anni e un’intensa vitalità!
  • LE CLERRE dans La traviata à l’Opéra de Rouen, ou le triomphe des deux Germont
  • Ivonne Begotti dans Ouverture de la nouvelle saison de l’Opéra-Comique : applaudissements chaleureux pour Les Contes d’Hoffmann
  • aient dans Pompeo Magno à Genève : le couronnement de Pompée

Première loge

Facebook Twitter Linkedin Youtube Email Soundcloud

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Login/Register

Keep me signed in until I sign out

Forgot your password?

Rechercher

Archives

  • Facebook
  • Twitter
  • Youtube
  • Email
Première Loge
  • Accueil
  • À Voir
  • Avant-concerts
  • Vu pour vous
  • Artistes
  • Œuvres
  • Médiathèque
  • Humeurs

A découvrirx

À Liège, Vincent Dujardin met platement...

13 octobre 2025

Le beau, le borgne et le...

12 octobre 2025

Otello au Teatro Regio de Parme...

12 octobre 2025