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Œuvres

LA VIDA BREVE, Falla (1913) – dossier

par Stéphane Lelièvre 12 août 2025
par Stéphane Lelièvre 12 août 2025
H. Hansen, "Une jeune femme va chercher de l'eau à une fontaine dans une cour mauresque du sud de l'Espagne"
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Manuel de Falla, La vida breve (La Vie brève), drame lyrique en deux actes, livret de Carlos Fernández Shaw, créé (en français) le 1er avril 1913 au Casino municipal de Nice.

LES AUTEURS

Le compositeur

Manuel de Falla (1876-1946)

Falla s’illustra tout d’bord dans le genre de la zarzuela, mais c’est un premier opéra qui lui apporte la notoriété : La Vie brève,  représenté à Nice en 1913. Lors d’un séjour dans la capitale française, il se lie avec des compositeurs tels Debussy, Ravel, Dukas ou Albeniz, qui auront sur lui une certaine influence.

 Après La Vie brève, il composa sept Chansons populaires (1914), les ballets L’Amour sorcier (1915) et Le Tricorne (1919), Le Retable de Maître Pierre (1923). Une dernière œuvre, L’Atlantide, restera malheureusement inachevée. La personnalité singulière de Falla lui permit de créer une œuvre particulièrement originale qui en fait l’un des musiciens les plus séduisants et les plus intéressants de son temps. 

Le librettiste

Carlos Fernández Shaw

Carlos Fernández Shaw (1865-1911)

Carlos Fernández Shaw naquit à Cadix le 23 septembre 1865, d’un père espagnol et d’une mère anglaise. Il s’illustra en tant qu’auteur principalement dans trois domaines : la poésie, le théâtre et le journalisme. Il participa fréquemment à la création d’œuvres musicales, notamment pour les compositeurs Ruperto Chapí (il écrivit pour lui les textes de plusieurs  zarzuelas : La revoltosa, La chavala, Las bravías mais aussi le livret de son opéra Margarita la tornera) et Manuel de Falla (La vida breve). Ce dernier livret prend appui sur La chavalilla, un poème tragique dont il est également l’auteur. 

En tant que journaliste, il signe des articles pour La epoca, La illustración et El correo, ou encore le magazine d’avant-garde madrilène Prometeo.  Carlos Fernández Shaw meurt à Madrid le 7 juin 1911.

L’ŒUVRE

La création et la fortune de l'oeuvre

En 1905, Falla saisit l’opportunité d’un concours proposé par l’Académie royale des Beaus-Arts de San Fernando pour composer un opéra (en un acte, selon les modalités du concours). Falla remporte le prix, mais déchante assez vite : contrairement à ce qu’il espérait, le Teatro Real ne se montre guère disposé à monter son oeuvre. Qu’à cela ne tienne. Fort du succès remporté auprès du jury, Falla réalise son rêve : il se rend à Paris, où il rencontre Dukas, mais aussi Ravel et Debussy, dont il écoute les conseils. La partition originale de La vida breve se trouve ainsi quelque peu modifiée, dans son orchestration, le développement de certaines musicales, ou encore son architecture, les deux scènes avec intermezzo qui constituaient l’oeuvre première devenant finalement deux actes. Falla présente alors son oeuvre à Albert Carré, directeur de l’Opéra-Comique, qui se montre intéressé… sans donner suite. L’œuvre sera finalement créée au Casino de Nice le 1er avril 1913, dans une traduction française signée Paul Milliet.  Le succès remporté par les représentations réveille l’intérêt de Carré: La Vie brève est jouée à l’Opéra-Comique en janvier 1914. 

Ces deux succès remportés en France suscitent la curiosité de Madrid : pas celle du Teatro Real (où l’oeuvre ne sera créée qu’en… 1997 !), mais celle du Théâtre de la Zarzuela, où elle reçoit un accueil enthousiaste lors de sa création le 14 novembre 1914.

Façade du Théâtre de la Zarzuela

Le livret

Acte 1
La cour d’une maison de gitanes dans l’Albaicin, le quartier ziride de Grenade.
On entend des forgerons chanter en travaillant. C’est là que vit la jeune Salud (soprano), avec sa grand-mère (mezzo-soprano) et son oncle Sarvaor (basse chantante). Salud attend l’homme qu’elle aime, le jeune Paco (ténor), d’un statut social supérieur au sien. Alors que sa grand-mère l’exhorte à la patience, Paco arrive et les deux jeunes chantent un duo d’amour. Paco, cependant, est attaché à une autre femme, Carmela, d’une classe sociale supérieure à celle de Salud, plus conforme à son propre statut.  Le vieil oncle connaît la liaison de Paco avec Carmela : « Demain, il épouse une fille de sa classe et de sa caste, une fille assez jolie et de plus fort riche ! » Devant la grand-mère effrayée, il menace de tuer Paco.

Acte 2
Une petite rue à Grenade. La façade latérale de la maison de Carmela et de son frère Manuel (baryton) borde cette petite rue.
On entend, provenant de la maison de Carmela, des chants de fête et des musique de danse. Salud est gagnée par le doute quant à la sincérité des sentiments de Paco à son égard. Elle apparaît, regarde à travers une fenêtre à l’intérieur de la maison et se désespère : « L’infâme ! l’infâme ! Que lui ai-je fait pour qu’il me tue ainsi ? Tous me cachaient cela, lui, par vilenie, les autres, par pitié ». Salud est rejointe par sa grand-mère, qui tente de la consoler, et par son oncle, qui maudit le jeune homme. Salud entend la voix de Paco. « Il faut qu’il entende aussi la mienne! ». Elle se met à chanter le chant des forgerons entendu au premier acte : « Malheur à qui naît enclume, au lieu de naître marteau !  » En entendant la voix de Salud, Paco blêmit… Salud et l’oncle décident de pénétrer dans la maison. 
Devant les invités médusés, Salud explique qu’un serment d’amour la liait à Paco ; elle demande au jeune homme qu’il achève de la tuer : « Je ne viens pas chanter ! Je ne viens pas danser ! Je viens voir cet homme, et lui dire, pour Dieu, qu’il me tue, qu’il achève enfin de me tuer !…  » Paco accuse Salud de mentir. La jeune femme tombe morte à ses pieds, devant les invités horrifiés. 

La musique

La vida breve est la première grande œuvre d’un Manuel de Falla nouveau venu dans le monde de la composition musicale. Pourtant, la personnalité du musicien transparaît déjà nettement, notamment dans l’importance accordée au chœur et surtout à l’orchestre – une importance sans commune mesure avec ce qui s’était fait jusqu’alors dans le répertoire hispanique, et qui s’observe dans le soin extrême accordé à l’orchestration, le remarquable équilibre entre voix et pâte orchestrale, mais aussi dans les quelques pages purement instrumentales qui émaillent la partition. En témoignent les célèbres « Interlude et danse » de l’acte II, avec, pour le premier, absolument superbe, une atmosphère particulièrement sombre et contemplative, et pour la seconde une profusion de rythmes et de couleurs qui sonnent comme une célébration des traditions musicales espagnoles – même si, au-delà de références évidentes aux musiques traditionnelles, on ne trouve presque guère de « citations » musicales précises, le folklore se trouvant ainsi en quelque sorte toujours « réinventé ».

La tonalité de l’œuvre est évidemment très sombre, et cette atmosphère pesante est présente dès les premières scènes avec le chant des forgerons (interprété au début de l’opéra par une voix mélancolique : « Il faut travailler. C’est nous qui devons peiner pour que les autres puissent s’amuser !… »), puis par le chant de Salud («  Vivent ceux qui rient ! Que meurent ceux qui pleurent ! »), avant que la voix anonyme ne réintervienne après le duo « d’amour », semblant annoncer la fin tragique de l’héroïne : « Malheureuse la pauvre femme, née sous une mauvaise étoile ! Malheureux celui qui naît enclume plutôt que marteau !… ». Ce poids du destin, l’ancrage de l’action dans un chronotope contemporain évoquant les petites gens et les laissés pour compte de la société, la violence des sentiments et la mort brutale de l’héroïne : la partition de Falla s’inscrit dans la mouvance du naturalisme ou du « vérisme » caractéristiques des œuvres musicales de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, tout en présentant une indéniable originalité, fruit du langage musical déjà éminemment personnel d’un compositeur  âgé de 27 ans à l’époque où il compose son opéra.

Pour écouter l'œuvre

CD

Hallfter/ De Los Angeles, Civil. Chœurs de La Capilla Clasica Polifonica, Orchestre Symphonique de l’opéra de Barcelona, 1 CD Somm, 2006 (enr. 1954).

De Burgos / De Los Angeles, Cossutta. Orfeon Donostarria, Orquesta nacional de España . 1 CD EMI 1990 (enr. 1966).

Navarro / Berganza, Carreras. Ambrosian Opera Chorus, London Symphony Orchestra. 2 CD DG (+ L’Amour sorcier), 1978.

Lopez-Coboz / Nafe, Ordóñez. May Festival Chorus, Cincinnati Orchestra. 1 CD Telarc, 1992.

Pons / Egido, Ordóñez. Cor de Valencia, Orquestra Ciudad de Granada. 1 CD Harmonia Mundi, 1998.

Valdés / Sanchéz, Valls. Prince of Asturias Foundation Choir, Asturias Symphony Orchestra. 1 CD Naxos, 2002.

Mena / Herrera, Machado. RTVE Symphony Chorus, BBC Philharmonic. 1 CD Chandos, 2018.

DVD et Blu-ray

Maazel; de Monaco / Gallardo-Domas, de Leon. Cor de le Generalitat Valenciana, Orquesta de la Communitat Valenciana. 1 Blu-ray Unitel Classica, 2011.

Streaming

Douglas Kinney Frost / Erica Petrocelli, David Rivera. New England Conservatory, 2016.
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

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