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Rosalind Elias, (Am)Erika The Beautiful (1930-2020)

par Pierre Brévignon 28 mai 2020
par Pierre Brévignon 28 mai 2020
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Elle était l’une des figures du Metropolitan Opera de New York depuis près de trente-cinq saisons : la mezzo-soprano américaine d’origine libanaise Rosalind Elias nous a quittés cette semaine, à l’âge de 90 ans.

Pour cette cadette d’une famille de treize enfants élevée par une mère au foyer et un père agent immobilier dans la région de Boston, le travail a toujours été une vertu cardinale. Et la volonté. Ainsi, c’est elle qui a dû convaincre son père de la laisser suivre des études musicales. D’abord au New England Conservatory, puis à l’Accademia Santa Cecilia de Rome et au Berkshire Music Center de Tanglewood. C’est en 1954 qu’elle foule pour la première fois la scène du Met, pour une Walkyrie où la tête d’affiche est partagée par Set Svanholm, Hans Hotter et Astrid Varnay. À 24 ans, la jeune femme n’imagine pas qu’elle recevra son ultime standing ovation new-yorkaise quatre décennies plus tard, un soir de novembre 1996, après pas loin de sept cents représentations ! Une longévité record, sans commune mesure avec celles de Leontyne Price ou de Grace Bumbry. Et une carrière marquée par deux dates phares : la création triomphale, en 1958, de Vanessa de Samuel Barber et, huit ans plus tard, le fiasco d’Antony and Cleopatra, du même compositeur, pour la soirée inaugurale du nouveau Met au Lincoln Center.

Le récit qu’elle a livré de son travail sur le premier opéra de Barber – où son personnage, Erika, rivalise directement avec le rôle-titre – révèle le tempérament et l’instinct musical de la jeune chanteuse :

« Dès que j’ai été engagée dans la distribution de Vanessa, je me suis mise au travail. Mais plus je relisais la partition, plus je pensais : c’est trop bête, je n’ai pas d’aria. Alors un jour, j’ai frappé à la porte du bureau de M. Bing [le directeur du Met] et je lui ai expliqué mon problème. Quand on est très jeune, n’est-ce pas, on ne manque pas de culot… Je ne ferais plus ça aujourd’hui ! Il m’a dit : “Attendez un peu, Rosalind”, puis a décroché son téléphone, composé un numéro et annoncé à son interlocuteur :

“Sam, j’ai Rosalind Elias devant moi. Elle veut vous parler.” J’ai cru que j’allais m’évanouir… M. Bing m’a tendu le combiné. “Monsieur Barber, ai-je dit, votre opéra est splendide et j’adore le rôle d’Erika mais j’aurais tellement voulu avoir mon aria !” C’est ainsi que Sam a écrit “Must the Winter Come So Soon ?”, qui est devenu l’un des airs préférés des mezzo-sopranos. » 

(Elle renouerait en 2001 avec Vanessa à l’Opéra de Monte Carlo. Distribuée cette fois dans le rôle presque silencieux de la Baronne, elle remarquerait : « Si j’avais su que je jouerais ce rôle un jour, j’aurais aussi demandé à Sam de lui écrire une aria ! ») Dans la foulée du succès remporté par Vanessa, Elias participera à l’enregistrement de l’œuvre sous la direction de Dmitri Mitropoulos (RCA) puis à sa création au festival de Salzbourg (Orfeo).

Vanessa, « Must the winter come so soon? » (Rosalind Elias)

Autres prestations marquantes dans l’opéra du XXe siècle : une Mother Goose et une Baba la Turque ébouriffantes dans le Rake’s Progress de Stravinski à Glyndebourne en 1975 (dans la production mythique Cox/Hockney, OpusArte) et une Judith hélas chantée en anglais dans Le Château de Barbe-Bleue de Bartók en 1962 (avec Jerome Hines et l’Orchestre de Philadelphie dirigé par Eugene Ormandy, Sony Classical). 

Les répertoires classique et surtout romantique l’ont également vue briller, incarnant une cinquantaine de rôles où son sens théâtral fait merveille : Rosina, Suzuki, Dorabella, Chérubin et Marcelline, Octavian, Azucena, Amnéris,  sous les baguettes de chefs aussi prestigieux que Fritz Reiner, Erich Leinsdorf, James Levine, Peter Maag. Son legs discographique est semé de références mythiques : des Nozze di Figaro par Leinsdorf (RCA, 1959), un Fliegende Holländer par Dorati (London/Decca, 1961), le Songfest de Bernstein dirigé par le compositeur (DG, 1978) le Requiem de Verdi par Fritz Reiner (1959), un Rigoletto par Solti (RCA, 1964), une Madama Butterfly par Leinsdorf (avec Leontyne Price, RCA 1962)… Autant de jalons d’un « âge d’or » du chant lyrique enregistré. 

La passion des planches ne l’a jamais quittée. Elle s’autorisera même quelques incursions impressionnantes dans l’univers du musical, que ce soit dans Man of La Mancha de Dale Wasserman (avec Placido Domingo), Sweeney Todd et A Little Night Music de Stephen Sondheim. Jusqu’à ses débuts émouvants à Broadway en 2011-2012, à 80 ans passés ! L’occasion : la reprise de Follies de Sondheim, où elle incarnait le rôle d’Heidi Schiller, ancienne showgirl d’une revue de l’entre-deux-guerres. Son air « One last Kiss », où planent des réminiscences du quintette final de Vanessa, sonne aujourd’hui comme un chant d’adieu. 

 

Follies, « One More Kiss » (Rosalind Elias)

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Pierre Brévignon

Pierre Brévignon jongle avec les mots et les notes, tour à tour dans les programmes de l'Opéra de Paris, de la Cité de la Musique, du Théâtre du Châtelet, dans les livrets de CD, dans les salles de conférence de la Philharmonie, au sein de l'Association Capricorn (www.samuelbarber.fr) ou dans les livres qu'il consacre à sa passion : la première biographie française de Samuel Barber ("Samuel Barber, un nostalgique entre deux mondes", éditions Hermann, 2012), le "Dictionnaire superflu de la musique classique" (avec Olivier Philipponnat, Castor Astral, 2015) et "Le Groupe des Six, une histoire des années folles" (Actes Sud, 2020).

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