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LE VAISSEAU FANTÔME ou la rédemption par Asmik…

par Hervé Casini 6 novembre 2025
par Hervé Casini 6 novembre 2025
© OMC - Marco Borrelli
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Le Vaisseau fantôme, Grimaldi Forum de Monaco, dimanche 2 novembre 2025

Évènement d’envergure pour l’ouverture de la saison lyrique monégasque que ce Fliegende Holländer mis en espace… mais surtout mis sur orbite par la présence toujours aussi hors-du-commun d’Asmik Grigorian en Senta.

De la vision d’un cadre et d’un chœur flamboyant

Habitué des versions mises en espace au Grimaldi Forum, le collectif D-Wok situe les projections de ce spectacle à à l’intérieur d’un cube pouvant, tour à tour, contenir les flots déchaînés des mers traversées sans relâche par le Hollandais maudit – passant du bleu nuit au rouge carmin -, prendre la forme d’une tête de mort qui, associée au personnage principal, peut, lors du duo avec Daland, se remplir de l’or du galion fantôme ou encore – et c’est pour nous l’évocation la plus judicieuse – devenir le cadre d’un tableau obsessionnel à l’intérieur duquel se mettent en mouvement les ombres de Senta et du mystérieux capitaine… et les cinéphiles se seront peut-être rappelés ici certaines scènes de The Ghost and Mrs Muir de Joseph L. Mankiewicz.

Sans véritable utilisation scénique de ces projections – n’oublions pas que nous assistons seulement à une version mise en espace ! – le vaste plateau du Grimaldi Forum se trouve souvent un peu dénudé, et ce d’autant plus que certaines d’entre elles – celle, initiale, des éléments déchaînés, en particulier – n’évitent pas l’écueil du cheap, nous faisant davantage songer au liquide contenu dans les lampes à lave de notre jeunesse qu’à l’univers de tempête que nous expose pourtant l’orchestre dès les premières mesures de l’Ouverture !

C’est tout d’abord dans le cri des matelots norvégiens qui s’encouragent en chantant pendant leur travail (« Hojohe ! Hallojo ! »), et qui trouvera son pendant avec le chœur des fileuses introduisant l’acte II, puis avec son apothéose dans la grande scène du début de l’acte III, où les différents groupes de choristes dialoguent entre eux, que nous trouvons la première grande satisfaction de cette matinée : ici, la force de frappe de la formation monégasque, portée pour l’occasion à un effectif de quatre-vingt membres et emportée par la conduite fièvreuse de Stefano Visconti, apparaît irrésistible. C’est le gros point positif de cette représentation concertante.

On aurait aimé pouvoir en dire autant de l’orchestre, l’un de ceux qui nous donnent souvent, depuis de nombreuses années, les plus grands bonheurs musicaux dans l’hexagone. Curieusement, alors que cette représentation constituait, sur le carton, l’un des must de la nouvelle saison, on est un peu en deçà de nos attentes : non que la phalange qui, dans ses diverses catégories, possède des instrumentistes de haute volée – comme auront pu encore nous le faire entendre les interventions de la petite harmonie dès l’ouverture – n’ait démérité mais c’est davantage du point de vue de la cohésion d’ensemble que, lors de cette matinée, le résultat n’est pas complètement au rendez-vous, du fait sans doute d’une direction d’orchestre prosaïque – Gianluca Marcianò – qui nous aura semblé privilégier le volume sonore aux dépens de la poésie onirique du romantische oper, hérité de Carl Maria von Weber, que l’on doit pourtant impérativement entendre dans cette musique. Dommage.

Une distribution vocale dominée par la Senta d’Asmik Grigorian

Du ténor d’école quasi rossinienne que nécessite le rôle du Pilote, le gallois Trystan Llyr Griffiths dispose de l’émission aisée et de l’art de la nuance, ce qui est moins le cas de sa compatriote Angharad Lyddon qui de Mary ne dispose guère des moyens permettant de passer le mur du son de l’orchestre et du chœur.

Nouvelle coqueluche de Bayreuth – où ses disques faisaient l’objet, l’été dernier, d’une belle mise en valeur – le ténor et compositeur allemand Daniel Behle donne à entendre une voix lyrique, à la puissance moyenne mais doté d’une fort belle musicalité qui lui permet d’aborder la cavatine de l’acte III comme une aria di camera de Bellini tout en ne l’empêchant pas de trouver les sonorités diaphanes nécessaires à son « récit du rêve » pendant son duo avec Senta à l’acte II.

C’est sans doute le vétéran Albert Dohmen qui, en Daland, nous donne certains des meilleurs moments musicaux de la soirée dans un rôle où il faut savoir impérativement ce que legato et allègement du timbre signifient ! Ici, pas de chant caverneux mais un art consommé d’une ligne de chant dont l’interprète connaît la filiation toute droite empruntée à Meyerbeer voire à Gounod !

Si Bryn Terfel n’a plus aujourd’hui l’assurance vocale d’il y a quelques années – constat que nous avions déjà pu faire aux Chorégies d’Orange en 2024 pour Tosca – ses apparitions sur scène constituent toujours des évènements indéniables. Dans une tessiture de basse devant disposer d’aigus redoutables, le chanteur gallois a souvent fait les beaux soirs des grandes maisons d’opéra. D’emblée, l’autorité vocale et scénique est bien là, même si, très vite, on doit constater que la voix se fait plus serrée dans le haut médium et que l’aigu est souvent à la peine, entaché d’un graillon dès la fin du monologue de l’acte I. Pourtant, le métier et l’intelligence technique sont toujours présents et permettent d’entendre un duo avec Senta d’une ensorcelante poésie où l’aplomb vocal est, pour un instant, bel et bien de retour : soudain, alors que le cadre du tableau projeté s’est progressivement rempli du rouge des pétales de rose qui le constellent, Sir Bryn Terfel est vocalement transfiguré. Il faut dire qu’en face de lui, Senta est Asmik Grigorian.

Dès le lever de rideau de l’acte II, on ne sera pas surpris de lire que toute la lumière est soudain captée par son personnage : assise à l’avant-scène, vêtue d’un tee-shirt orné dans sa partie centrale de la représentation naïve d’un…pirate, perdue dans ses pensées, la soprano lituanienne – qui n’avait plus chanté le rôle depuis la production de Dimitri Tcherniakov pour Bayreuth, en 2021 – donne à voir, avant même d’ouvrir la bouche, la figure d’une jeune fille décidée, au regard pénétrant, relativement étrangère à ses camarades fileuses et à son environnement direct (Mary, Erik, Daland), même s’il y a davantage à l’égard de ce dernier un détachement bienveillant, quelquefois offusqué, qu’une franche hostilité… . Irrésistiblement, en voyant apparaître cette Senta en teenager inconsciente et généreuse dans ses gestes, on pense à Anja Silja, incarnation idéale du personnage, jadis, sous la houlette de Wieland Wagner… .

Vocalement, Asmik Grigorian, pour ses débuts in loco rafle largement la mise, non seulement parce que la voix est glorieuse du début à la fin de la représentation mais aussi parce que l’interprète sait totalement faire sienne dans son approche cette sorte de « lointain » indéfinissable – et qui pourtant se chante ! – qui nous réserve des moments suspendus, dès l’appel a cappella de la célèbre ballade – dont la totalité est chantée avec une générosité d’approche absolument électrisante – jusqu’à l’exposition triomphale du leitmotiv de la rédemption. De même, dans un rôle à la couleur foncièrement lyrique, Asmik Grigorian donne à entendre une santé vocale – depuis les nombreux graves dont est truffée la partition jusqu’au si naturel et autres aigus passant sans difficulté la rampe de l’orchestre – qui nous incite à penser que le champ d’investigation de certains rôles wagnériens devrait être encouragé, dans les années à venir… . Enfin, c’est tout à la fois dans les envolées, la succession de quartes et de cadences dont est constitué le duo avec le Hollandais, à l’angélisme si puissant, que l’on rend les armes pour constater, une fois de plus, la formidable préparation technique d’une voix qui, aujourd’hui, peut chanter un répertoire si large avec autant d’engagement et de crédibilité.

Grâce soit rendue aux équipes artistiques de l’Opéra de Monte-Carlo d’avoir permis à cette artiste hors-norme d’en donner ici un nouvel exemple, avec autant d’éclat.

Les artistes

Le Hollandais: Sir Bryn Terfel
Senta : Asmik Grigorian
Daland : Albert Dohmen
Erik : Daniel Behle
Mary : Angharad Lyddon
Le pilote : Trystan Llyr Griffiths

Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, direction :  Gianluca Marcianò
Chœurs de l’Opéra de Monte-Carlo, chef de choeur :  Stefano Visconti

Projections :  D-Wok

Le programme

Der fliegende Holländer (Le Vaisseau fantôme)

Opéra romantique en 3 actes de Richard Wagner (1813-1883), créé à Dresde, Königliches Hoftheater, le 2 janvier 1843.

Monaco, Forum Grimaldi, représentation du dimanche 2 novembre 2025.


 

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Asmik GrigorianBryn TerfelDaniel BehleAlbert DohmenGianluca Marcianò
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Hervé Casini

Hervé Casini est diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix-en-Provence, docteur en littérature française à Aix-Marseille Université et Secrétaire Général du Museon Arlaten (Musée d’ethnographie provençale). Collaborateur de diverses revues (Revue Marseille, Opérette-Théâtre Musical, Résonances Lyriques…), il anime un séminaire consacré au « Voyage lyrique à travers l’Europe (XIXe-XXe siècle) à l’Université d’Aix-Marseille et est régulièrement amené à collaborer avec des théâtres et associations lyriques dans le cadre de conférences et colloques.

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