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La vie n’est pas un long fleuve tranquille pour Les P’tites Michu de Messager !

par Stéphane Lelièvre 27 décembre 2019
par Stéphane Lelièvre 27 décembre 2019
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Photographies: Sandra Daveau

Le Docteur Miracle, Les Chevaliers de la table ronde, Faust et Marguerite, Les Deux aveugles…On sait gré au Centre de musique française romantique de ne pas oublier, dans son souci de faire redécouvrir le répertoire musical français du XIXe siècle dans toute sa richesse et sa diversité, le répertoire dit « léger », qui fit en son temps les beaux soirs des scènes françaises avant de se cantonner progressivement – à de rares exceptions près – aux scènes de province durant le XXe siècle, puis de disparaître presque complètement.

Au sein de ce répertoire, l’œuvre de Messager, musicien de grand talent s’il en est, mérite à coup sûr une attention particulière. Alors que la très raffinée Véronique a quasi disparu des scènes (même si  le Châtelet reprit l’œuvre en 2008, dans une mise en scène de Fanny Ardant), fallait-il redonner leur chance aux Pt’ites Michu, qui avaient connu un succès éclatant au XIXe siècle (l’œuvre est créée en 1897 aux Bouffes-Parisiens) mais qui sont aujourd’hui presque complètement oubliées ? On retrouve bien sûr dans Les P’tites Michu les qualités d’écriture de Messager, faite de finesse et de légèreté, avec une orchestration soignée et des dons de mélodiste certains. L’œuvre lorgne peut-être du côté de Mesdames de la Halle, mais plus sûrement encore du côté de La Fille de Madame Angot, avec son ancrage dans l’immédiate après-Révolution et le motif de jeunes femmes au langage pour le moins un peu vert ! Musicalement, elle appartient à la première « façon » de Messager, celle de l’opérette « classique », avant la « conversation en musique » de Fortunio (1907) et une dernière façon plus proche de la comédie musicale (Passionnément, 1926 et Coup de roulis, 1928). Précédant immédiatement Véronique (créée un an plus tard sur la même scène), elle en annonce parfois certaines pages (le duo Gaston/Blanche-Marie du dernier acte, « Rassurez-vous », évoque d’assez près celui entre Florestan et Véronique : « Eh bien, par ordre procédons ! »). Elle n’en a pas pourtant le charme immédiat et prégnant : lui manquent peut-être quelques pages vraiment piquantes (tels les couplets de la « Petite dinde »), des mélodies restant immédiatement en mémoire (sauf, peut-être, la « Ronde des halles »), de même que des finales enlevés et suffisamment développés (le « Tambour battant / Rataplan / Nous partons à l’instant ! » n’a pas l’élan irrésistible de « Allons ! allons d’un pas agile » qui clôt le premier acte de Véronique).

L’œuvre cependant est sympathique, amusante souvent, et, à en croire l’accueil enthousiaste des spectateurs depuis que ce spectacle tourne (il a été créé en 2018 et a fait l’objet d’une publication en CD), valait vraiment la peine d’être de nouveau soumise à l’attention du public. Il faut dire que pour cette co-production, Bru Zane France, la compagnie Les Brigands et Angers Nantes Opéra ont plutôt bien fait les choses pour assurer le succès de cette résurrection : la mise en scène de Rémy Barché, avec sa transposition habile de l’œuvre dans le cadre coloré et acidulé d’une comédie musicale des sixties, les illustrations et vidéos de Marianne Tricot et Stéphane Bordonaro pleines de fraîcheur et de naïveté, séduisent et maintiennent constamment l’intérêt de cette histoire d’enfants issus de milieux sociaux différents mais confondus, rappelant La Vie est un long fleuve tranquille de Chatilliez jusque dans une forme de déterminisme social un (tout petit) peu dérangeant. Christophe Grapperon dirige l’Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire/Tours et le chœur de l’Opéra de Tours avec toute la précision et la verve requises.

Mais c’est surtout l’homogénéité et le dynamisme du plateau qui emportent l’adhésion. Chaque chanteur est impeccablement distribué et propose de son personnage une incarnation haute en couleurs, de Damien Bigourdan, parfait en Monsieur Michu un peu abruti et que le démon de la danse vient régulièrement titiller, à Ingrid Perruche, une Mademoiselle Herpin directrice de pension autoritaire et coincée mais ne demandant qu’à se décoincer. Artavazd Sargsyan détaille fort joliment les couplets d’Aristide (« Blanche-Marie est douce ») ; Marie Lenormand est irrésistible de gouaille tendre et débonnaire en Madame Michu (délicieux couplets : « À l’ouvrag’ dès que vient l’matin » !). Jean-Baptiste Dumora est un général des Ifs autoritaire à souhait. Romain Dayez n’a que peu à chanter (et c’est dommage car il le fait fort bien, avec un timbre clair et bien projeté), mais il possède une vis comica incroyable, lui permettant de faire de Bagnolet un personnage complètement déjanté, faisant rire la salle à chacune de ses apparitions avec sa diction truffée de liaisons mal-t-à-propos et son jeu scénique encombré de gestes inattendus et désopilants. Philippe Estèphe, lui aussi très convaincant en Gaston (et dont la carrière, avec les récents Raimbaud, Brétigny ou Papageno, semble prendre un bel essor) délivre un chant fort élégant et remporte la palme de la diction la plus claire. Enfin, Violette Polchi (Marie-Blanche) et Anne-Aurore Cochet (Blanche-Marie), aux timbres étonnamment corsés pour les rôles (on est loin des incarnations discographiques de Claudine Collart et Christiane Harbell, ou Nadine Renaux et Liliane Berton !), incarnent des Michu fraîches, gentiment délurées mais non exemptes de tendresse. Leurs voix sont à la fois assez proches et suffisamment individualisées (un peu plus de rondeur dans celle d’Anne-Aurore Cochet, une projection légèrement plus péremptoire dans celle de Violette Polchi) pour se marier harmonieusement, notamment dans la prière à Saint-Nicolas du second acte.

Le public, sage comme souvent lorsqu’il redécouvre une œuvre méconnue, laisse éclater sa bonne humeur au rideau final et remercie l’ensemble de la troupe sous des applaudissements enthousiastes et mérités.

Une curiosité : Renée Fleming et Susan Graham chantent Les P’tites Michu de Messager (« Blanche-Marie et Marie-Blanche) et Barbe-Bleue d’Offenbach (duo Boulotte/Prince Saphir).

Les artistes

Marie-Blanche Violette Polchi
Blanche-Marie Anne-Aurore Cochet
Mademoiselle Herpin Ingrid Perruche
Gaston Philippe Estèphe
Général des Ifs Jean-Baptiste Dumora
Monsieur Michu Damien Bigourdan
Madame Michu Marie Lenormand
Aristide Artavazd Sargsyan
Bagnolet Romain Dayez 

Mise en scène Rémy Barché
Direction musicale Christophe Grapperon
Chœur de l’Opéra de Tours
Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire / Tours

Le programme

Opéra de Tours, 27 décembre 2019

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Violette PolchiAnne-Aurore CochetIngrid PerruchePhilippe EstèpheRomain Dayez
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

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