Coline Dutilleul, mezzo-soprano
Aline Zylberajch, pianoforte
Pernelle Marzorati, harpe
Au salon de Joséphine
Romances et airs d’opéras de l’époque du Premier Empire
1 CD Ramée (65’49), novembre 2025
Parmi tous les répertoires qu’il est bien difficile de ranimer aujourd’hui, il y a celui de la romance de salon. Outre l’image parfois négative qui leur est associée – sous-genre réservé à la pratique amateur et à un auditoire superficiel – ces compositions sont souvent de forme strophique, sur des textes assez mièvres. Ces préjugés sont heureusement battus en brèche par le disque Au salon de Joséphine, qui prouve que le répertoire défendu dans l’intimité de l’Impératrice n’est pas à dédaigner.
Après le disque consacré aux œuvres de la reine Hortense, paru il y a quelques mois chez Paraty, c’est une exploration un peu différente que propose le label Ramée avec Au salon de Joséphine, mais toujours avec la complicité du château de la Malmaison, et toujours avec Coline Dutilleul. De fait, la mezzo belge se révèle l’interprète idéale de ces œuvres qui exigent un juste milieu entre le naturel « sensible » qui sied au cadre restreint du salon et l’art nécessaire pour retenir l’attention de l’auditeur d’aujourd’hui, notamment à travers une ornementation pratiquée avec un goût parfait. Cet équilibre se manifeste d’emblée, mais Coline Dutilleul ne s’interdit pas d’utiliser une palette bien plus large, plus dramatique, puisque le programme inclut d’authentiques airs d’opéra, de Grétry, de Méhul ou de Paisiello, et même un extrait de La Vestale (on se demande seulement pourquoi la version en italien a ici été retenue : peut-être s’agissait-il d’une partition conservée au château). On retrouve ici Hortense de Beauharnais compositrice, comme sur l’autre disque mentionné plus haut, mais seule la belle « Complainte d’Héloïse au Paraclet » fait doublon. Aux côtés du célébrissime « Plaisir d’amour » de Martini, on découvre avec intérêt les œuvres de chanteurs comme Garat, aujourd’hui surtout connu pour son grasseyement, ou le castrat Crescentini, appelé en France par Napoléon, et de compositeurs tels que Plantade, dont le Requiem avait été révélé il y a quelques années, ou Louis-Emmanuel Jadin, frère d’Hyacinthe, et auteur d’une frappante « Mort de Werther ».
A cette voix ô combien idoine, il fallait apparier des instrumentistes tout aussi adéquats. Aline Zylberajch au pianoforte et Pernelle Marzorati à la harpe apportent un soutien délicat à la voix, et se font entendre en solo (ou, exceptionnellement, en duo) à intervalles réguliers, au rythme d’une plage instrumentale venant à chaque fois après deux mélodies chantées. On croise ainsi les noms de Steibelt et de Pleyel, ou des plus rares Krumpholz et Naderman.

