Il en aura parcouru du chemin, ce Chat du rabbin, depuis la parution du premier album de Joann Sfar, publié pour la première fois il y a maintenant plus de vingt ans ! Douze albums, deux adaptations théâtrales, un long-métrage d’animation, un feuilleton-radio, et un spectacle musical créé en 2022 au Théâtre de l’Œuvre – ayant depuis entamé un joli périple : après Paris, Saint-Omer, Abbeville, Auxerre, Condette, Dijon, Charleroi ont déjà accueilli le facétieux félin… avant Tourcoing où l’équipe des Frivolités parisiennes présentait le spectacle ce vendredi 19 janvier.
															Le premier album de la série conçue par Joann Sfar.
Dans son habile adaptation de l’œuvre de Joann Sfar, Pascal Neyron a recentré l’intrigue autour des liens unissant le chat à sa maîtresse Zlabya (tome 1), mais aussi autour des questionnements religieux et existentiels du rabbin, qui surgiront notamment lors de son voyage à Paris (tome 3). Le texte est fluide, présente une progression dramatique simple mais habile, permet d’agréables focus sur les pensées de tel ou tel personnages grâce aux lyrics d’Oldelaf. Le livret, surtout, préserve le subtil mélange de légèreté et de profondeur, d’impertinence et de sagesse qui assure depuis vingt ans le succès des œuvres de Sfar.
Le Chat du rabbin - teaser
Pascal Neyron règle également la mise en scène du spectacle. La scénographie conçue par Casilda Desazars est à la fois simple et efficace : les musiciens des Frivolités parisiennes sont présents sur le plateau, et occupent un dispositif qui permettra la projection de vidéos (signées Nathalie Cabrol) tout autant évocatrices que poétiques, faisant habilement voyager le spectateur d’Alger à Paris. Dans ce décor évoluent les quatre acteurs-chanteurs, campant leur rôle avec conviction et humour : bravo à Sinan Bertrand pour l’aisance avec laquelle il endosse les différents rôles qui lui échoient ; à Neïma Naouri pour sa Zlabya subtile vocalement et impliquée scéniquement ; à Jean-Michel Fournereau, qui campe comme il se doit un rabbin à la fois drôle et touchant lorsqu’il sent vaciller les convictions sur lesquelles son existence s’appuyait (« Si on peut être heureux sans respecter la Torah, pourquoi suivre des préceptes qui compliquent la vie ? »). Quant à Richard Delestre, il campe un chat tour à tour miaulant et feulant, mais aussi… parlant et chantant, le fait d’avoir avalé le perroquet de la maison lui ayant en effet conféré le don s’exprimer et de communiquer avec les humains. Ce dont il ne se prive pas, délivrant des leçons de sagesse (sur le libre-arbitre, le pouvoir de la parole, la liberté de croire ou de ne pas croire, d’adhérer aveuglément à un dogme ou de poser sur lui un regard critique, le vivre-ensemble,…) avec sans doute bien plus d’efficacité que ne le feraient de longs discours philosophiques !
Sur le livret de Pascal Neyron et Oldelaf, Mathhieu Michard a déposé une musique dont les références savantes (musiques arabo-andalouses[1], juives, jazz, chanson française du début du XXe siècle…) n’entravent en rien la spontanéité ni la fraîcheur. Le public, conquis, manifeste sans retenue son enthousiasme à la fin du spectacle, dont on espère que d’autres scènes encore pourront prochainement l’inviter.
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[1] Aux instruments « classiques » viennent s’ajouter l’oud et un ensemble de percussions traditionnelles.
Le Chat : Richard Delestre 
Le rabbin : Jean-Michel Fournereau 
Zlabya : Neïma Naouri 
Sinan Bertrand (multi-rôles)
Chef de chant : Nicolas Chesneau
Orchestre
Violon : Thibaut Maudry, Florian Perret 
Alto : Issey Nadaud 
Violoncelle : Alexis Derouin 
Contrebasse : Sylvain Courteix 
Flûte : Marie Laforge 
Hautbois / cor anglais : Coline Prouvost 
Clarinette : Mathieu Franot 
Basson : Benjamin El Arbi 
Oud : Yacir Rami 
Percussions traditionnelles, violon et chant : Rabah Hamrene 
Batterie/ Percussions : Sébastien Gisbert
Mise en scène et adaptation : Pascal Neyron 
Collaboratrice artistique : Elisabeth de Ereno 
Scénographie et accessoires : Casilda Desazars 
Création costumes : Sabine Schlemmer 
Réalisation costumes : Julia Brochier 
Maquillage et coiffure : Maurine Baldassari 
Lumières : Florent Jacob 
Ingénieur du son : Silouane Colmet-Dâage 
Création vidéo : Nathalie Cabrol 
Assistant vidéo : Jérémy Secco
Une production Les Frivolités Parisiennes 
Co-production La Clef des Chants
Le chat du rabbin
Spectacle musical de Matthieu Michard (musique), Pascal Neyron (texte), Oldelaf (lyrics), créé le 9 septembre 2022 au Théâtre de l’Œuvre (Paris).
Tourcoing, Théâtre Raymond Devos, représentation du vendredi 19 janvier 2024.

														
1 commentaire
Merci Stéphane pour ce compte-rendu. La longue tournée de ce spectacle et les applaudissements du public venu nombreux malgré le verglas et les routes compliquées témoignent du savoir-faire indéniable de nos Frivolités Parisiennes toujours bienvenue à Tourcoing !