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HANSEL ET GRETEL SELON PIERRE-EMMANUEL ROUSSEAU : UN CONTE PLEIN D’ÉPICES !

par Stéphane Lelièvre 4 janvier 2021
par Stéphane Lelièvre 4 janvier 2021
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© Klara Beck / Opéra du Rhin

Une nouvelle production de Hänsel und Gretel à l'Opéra du Rhin, disponible en streaming

Les contes ont ceci de fascinant que, destinés a priori à un public d’enfants, ils mettent en scène les ressorts les plus noirs de l’âme, font jouer les craintes les plus profondément ancrées en l’homme, et regorgent d’épisodes plus terrifiants les uns que les autres (meurtres, anthropophagie, viols, mutilations, inceste,…). Hänsel et Gretel ne fait pas exception à la règle, qui évoque à la fois la maltraitance infantile, la famine ou le cannibalisme. L’étonnant étant que, transposé dans l’univers du merveilleux (malgré la présence d’éléments quasi réalistes, tels un chronotope très ancré socialement, notamment au début des contes : la noblesse – Cendrillon ; la misère paysanne – Hänsel et Gretel ou Le Petit Poucet), les enfants sont prêts à entendre des horreurs dont ils ne supporteraient pas un cinquième dans toute autre sorte de récit !

La force et l’intelligence de la vision proposée par Pierre-Emmanuel Rousseau (secondé par Pierre-Emile Lemieux-Venne pour des chorégraphies pleines d’inventivité et Gilles Gentner pour de très beaux éclairages) réside dans le fait d’avoir habilement préservé les différentes composantes du conte (en privilégier une aurait probablement affaibli son propos) : le réalisme, le merveilleux, l’inquiétante étrangeté, la magie sont bien là. La terreur aussi, présente dans le conte originel mais quelque peu affadie dans le livret d’Adelheid Wette. (Dans le conte de Grimm, les victimes de la sorcière ne sont pas changés en pains d’épices mais sont dévorés telles quelles, et la belle-mère est bien plus effrayante que Gertrud !). Au-delà d’une habile transposition (le bûcheron et sa femme affamés sont un couple de sans-abris, l’univers de la sorcière devient une sorte de parc d’attraction, objet de toutes les convoitises pour les deux enfants), la lecture proposée reste ainsi d’une extrême fidélité à l’esthétique de l’œuvre, à son genre, à son propos. Le spectacle, visuellement, est par ailleurs on ne peut plus différent des Comte Ory, Fées du Rhin ou Clémence de Titus récemment montés par Pierre-Emmanuel Rousseau. Nous tenons donc là un metteur en scène qui actualise les œuvres sans les violenter, et qui se renouvelle constamment, sans jamais s’enfermer dans un système: le fait est suffisamment rare pour être souligné !

Musicalement, le spectacle est également une réussite. Le mérite en revient avant tout à Marko Letonja, à la tête d’un excellent orchestre de Strasbourg, qui préserve la clarté et la continuité du discours musical sans en gommer pour autant la richesse ni la luxuriance (merveilleux interludes orchestraux…). Bravo également aux Petits Chanteurs de Strasbourg et à la Maîtrise de l’Opéra national du Rhin pour leurs lumineuses interventions ! La distribution s’avère extrêmement convaincante, vocalement et scéniquement. Markus Marquardt et Irmgard Vilsmaier forment un couple de parents dépassés par les événements et quasi déshumanisés par la misère plus vrais que nature. Hélène Carpentier se fait particulièrement remarquer dans le double rôle du Marchand de sable et de la Fée rosée (beauté du timbre, séduction de l’interprétation). Hänsel et Gretel (Anaïk Morel et Elisabeth Boudreault) sont on ne peut plus crédibles vocalement et  physiquement : les deux chanteuses, fort heureusement, ne minaudent pas ni ne blanchissent excessivement leur timbre ; elles font par ailleurs entendre deux voix aux couleurs bien différenciées, facilitant ainsi la caractérisation de leurs personnages respectifs. Quant à l’incarnation de Spencer Lang, elle est saisissante. Confié ici à un ténor (le metteur en scène respecte ici un souhait formulé par Eva Kleinitz avant sa disparition), le personnage de la sorcière devient absolument monstrueux : ni homme ni femme, tout à la fois beau et laid (il apparait tout d’abord en vamp portant robe moulante et perruque blonde, mais d’étranges taches noires sur son visage suscitent le malaise…), tout à la fois terrifiant et grotesque, il frappe d’autant plus les esprits que le ténor, vocalement, évite toute caricature, tout excès de cabotinage (il ne cède pas à la tentation, par exemple, d’acidifier son timbre comme un Mime de second ordre…).

Un spectacle beau et fort, dont on regrette de n’avoir pu le voir qu’en vidéo (même si la réalisation de François Roussillon est fort soignée !). Espérons qu’il puisse rapidement être proposé de nouveau sur une scène …

Regardez ce spectacle ici !

Les artistes

Hansel   Anaïk Morel
Gretel   Elisabeth Boudreault
Peter  Markus Marquardt
Gertrud  Irmgard Vilsmaier
La Sorcière  Spencer Lang
Le Marchand de sable, la Fée rosée  Helène Carpentier

Orchestre philharmonique de Strasbourg, Les Petits Chanteurs de Strasbourg – Maîtrise de l’Opéra national du Rhin, dir.  Marko Letonja

Mise en scène, décors, costumes   Pierre-Emmanuel Rousseau

 

 

 

Le programme

Hänsel und Gretel

Conte théâtral en trois tableaux de Engelbert Humperdinck, livret d’Adelheid Wette, créé au Hoftheater de Weimar le 23 décembre 1893

Opéra du Rhin, Strasbourg, décembre 2020. Film réalisé par François Roussillon

 

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Humperdinck
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Stéphane Lelièvre

Stéphane Lelièvre est maître de conférences en littérature comparée, responsable de l’équipe « Littérature et Musique » du Centre de Recherche en Littérature Comparée de la Faculté des Lettres de Sorbonne-Université. Il a publié plusieurs ouvrages et articles dans des revues comparatistes ou musicologiques et collabore fréquemment avec divers opéras pour la rédaction de programmes de salle (Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Opéra national du Rhin,...) Il est co-fondateur et rédacteur en chef de Première Loge.

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