Les opéras français face à la crise économique : l’exemple de l’Opéra de Tours – entretien avec Laurent Campellone

Un article paru dans le quotidien régional La Nouvelle République le 10 janvier dernier a soulevé certaines interrogations concernant notamment la situation financière compliquée que l’Opéra de Tours, comme toutes les institutions culturelles, connait actuellement[1]. Au cours d’un entretien qu’il nous a accordé, le directeur de l’Opéra Laurent Campellone a bien voulu répondre à ces interrogations, concernant notamment la « mission d’inspection » destinée à « mieux ajuster la programmation » évoquée par le maire dans l’article de notre confrère de La Nouvelle République.

Laurent Campellone explique qu’il s’agit en fait d’une mission d’accompagnement, avec notamment un soutien logistique mis à la disposition de l’établissement.  Il a été convenu avec le maire de demander un appui supplémentaire de la part des équipes ministérielles, de façon à développer les activités de l’établissement. Une convention pluriannuelle d’objectifs doit être rédigée en 2023, qui redéfinira les missions de l’Opéra mais aussi de l’OSRC-T (Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire/Tours). Le « réajustement de la programmation » concerne moins le choix des titres (à titre d’exemple, La Caravane du Caire a eu un taux de remplissage de 97%), que des questions telles que le nombre de levers de rideaux, de coproductions, le fait que l’opéra reste ou non un établissement de production avec en son sein des ateliers de costumes de décors – ou soit un théâtre d’accueil. Les missions et les statuts de l’orchestre notamment doivent faire l’objet d’une réflexion particulière, l’orchestre étant l’un des deux derniers en France sont les musiciens sont payés au cachet. Si le statut de l’orchestre doit changer, l’aide apportée par le ministère sera cette fois-ci d’ordre juridique.

Concernant la fréquentation du théâtre, si, comme tous les établissements culturels, l’opéra de Tours n’a pas retrouvé le taux de fréquentation de l’avant Covid, plusieurs signes sont encourageants. Les spectateurs réservent peut-être moins leur place longtemps en amont, mais se décident plus au dernier moment ; on observe par ailleurs un net retour du public depuis le mois d’octobre, et la formule des abonnements qui avait été suspendue en raison de la pandémie va pouvoir être de nouveau proposée. Bien sûr, comme pour les autres théâtres, la situation financière reste compliquée avec l’inflation et l’augmentation très nette de certains coûts, la stagnation des subventions (elles n’ont quasiment pas augmenté à Tours depuis vingt ans en dépit de l’inflation). L’Opéra de Tours reste malgré tout fortement attaché à ce rôle essentiel consistant à assurer une mission de service public. Les signes encourageants évoqués plus haut, la mission d’accompagnement et l’aide apportée par le « fonds inflation » devraient à n’en pas douter l’aider à atteindre cet objectif.

Pour l’heure, la saison 2023 commencera avec deux titres  : Lucie de Lammermoor, version française de la Lucia de Donizetti et Deux hommes et une femme (toujours de Donizetti), donnés entre février et juin. À partir de septembre, l’Opéra de Tours reprendra le calendrier traditionnel des théâtres et opéras, avec une saison à cheval sur deux années civiles (2023-2024).

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[1] Voyez nos Brèves de janvier, où nous évoquons la suppression de spectacles par l’Opéra de Paris et l’Opéra du Rhin.