CD – L’intégrale des mélodies et duos de César Franck, par Tassis Christoyannis et Véronique Gens

Les artistes

Tassis Christoyannis, baryton
Véronique Gens, soprano
Jeff Cohen, piano
Enrico Graziani, violoncelle

Le programme

Intégrale des mélodies et duos de César Franck

1CD Palazzetto Bru Zane, mars 2022

Le bicentenaire de César Franck a le mérite de rappeler que ce compositeur, considéré comme l’un des rénovateurs les plus importants de la musique de chambre au XIXe siècle, ne s’est pas illustré que dans la seule musique instrumentale. À défaut du Valet de ferme (opéra-comique composé au début des années 1850 mais resté inédit) ou de Ghiselle (1889, drame lyrique dont seul le premier acte a été orchestré), nous découvrirons bientôt avec intérêt et curiosité l’opéra Hulda, qui dut attendre 1994 avant d’être joué intégralement (à Londres), et qui sera proposé par le Palazzetto Bru Zane à la Salle Philharmonique de Liège (quoi de plus normal pour un compositeur né à Liège ?) le 15 mai prochain, avant d’être repris par le Théâtre des Champs-Élysées le 1er juin.

https://www.youtube.com/watch?v=DAR6aklcSXw

Pour l’heure, un double CD vient de paraître, qui nous permet de patienter et d’approfondir notre connaissance de César Franck, compositeur de musique vocale : il s’agit de l’édition complète des mélodies et duos composés par Franck, du milieu des années 1840 jusqu’à la fin de sa vie (Franck meurt en 1890). Soit près de 50 années, au cours desquelles, nécessairement, l’art du musicien va subir des transformations et suivre une évolution qui le conduira de la simple romance de salon à certaines formes amples, telles les pièces patriotiques de l’après 70 (Paris et Patria), lesquelles s’apparentent plus au genre de la cantate qu’à celui de la mélodie ; ou encore de la simple forme strophique (L’Émir de Bengador, Le Sylphe, avec l’intervention d’un violoncelle) à des structures beaucoup plus libres et originales, comme dans l’étonnant Robin Gray, dont le texte, à dominante narrative, conditionne en quelque sorte la structure musicale, à la manière de certains lieder romantiques.

Si l’on connaît S’il est un charmant gazon (Felicity Lott grava jadis cette mélodie dans son album de Mélodies sur des poèmes de Victor Hugo – mais les chanteurs choisissent le plus souvent d’interpréter la version de Franz Liszt), et (peut-être ?) Le Vase brisé (retenu par Marie-Pierre Roy dans son album de mélodies sur des poèmes de Sully Prudhomme, récemment chroniqué dans Première Loge), la plupart de ces duos et mélodies seront des absolues découvertes pour le mélomane, d’autant plus appréciables qu’elles sont interprétées par trois des meilleurs spécialises du genre : au risque de nous répéter, nous ne pouvons, une fois encore, que louer l’exemplarité de l’accompagnement de Jeff Cohen, sobre et raffiné, la sobriété, l’humanité, la délicatesse du chant de Tassis Christoyannis, l’extrême élégance, la science des couleurs, l’émotion discrète qui émanent du chant de Véronique Gens. Il va sans dire que ces deux derniers interprètes font preuve de leurs habituelles qualités de diction, plus qu’indispensables dans ce répertoire.

Un CD à savourer… en attendant Hulda !

À noter : le livret comporte une présentation des mélodies extrêmement riche et précise, signée Jean-Philippe Navarre…