La cheffe BEATRICE VENEZI contestée à Limoges : des risques de l’engagement politique quand on est artiste…

Choquées par le positionnement politique de la cheffe Beatrice VENEZI et l’idéologie extrêmiste qu’elle défend, plusieurs personnes ont manifesté devant l’Opéra de Limoges ou la cheffe dirigeait hier une représentation de La Sonnambula.

« S’engager » c’est, étymologiquement, se mettre en gage, c’est-à-dire prendre le risque de gagner… ou de perdre. Pour un artiste, le risque consiste tout simplement à perdre une partie de son public. Lorsqu’on s’engage pour une cause humaniste, les risques sont (a priori limités) : qui va vous tenir rigueur de vous être engagé contre la famine ? le harcèlement scolaire ? la guerre ? la misère ? le racisme ? l’homophobie ? les violences sexistes ? En revanche, s’engager en faveur d’un parti politique présente le risque de voir s’aliéner tout ceux qui, dans le public, ne pensent pas comme vous. La cheffe d’orchestre italienne Beatrice Venezi, qui dirige actuellement La Sonnambula à l’Opéra de Limoges, vient de l’apprendre à ses dépens.

Fille de Gabriele Venezi, un promoteur immobilier membre de l’exécutif national de l’organisation néo-fasciste Forza Nuova, Beatrice Venezi est engagée politiquement auprès de Giorgia Meloni, présidente du conseil italien. Elle a assisté, à Milan, en mai 2022, à la Convention du parti Fratelli d’Italia. Faut-il rappeler que ce parti se veut le successeur de la formation d’extrême droite d’inspiration néofasciste Mouvement social italien ? Les Fratelli d’Italia chantent en tout cas les louanges de la cheffe sur les réseaux sociaux et Beatrice Venezi est parailleurs entrée au ministère de la Culture du gouvernement Meloni en tant que conseillère en musique. Multipliant les déclarations en faveur des valeurs dites « patriarcales » et des stéréotypes sexistes, accusée de prises de positions anti LGBT, 

elle déclare volontiers dans les médias : « Dio, patria et famiglia sono i miei valori », et est très appréciée des sites catholiques intégristes italiens tels Provita & Famiglia. Elle a par ailleurs fait l’objet d’articles élogieux dans La Verità, un média dont Il Post déclare : « On pourrait dire que, d’un point de vue politique, La Verità occupe en Italie la place qu’occupe aux États-Unis Breitbart News, le site d’information cofondé par Steve Bannon, l’ancien conseiller et stratège de Donald Trump : sur presque tous les sujets, de la politique à la religion en passant par les modes de vie, La Verità adopte la position la plus à droite possible, et l’occupe de la manière la plus controversée qui soit[1] ».

Choqués par la venue de Beatrice Venezi à Limoges, plusieurs personnes ont manifesté devant l’Opéra hier, juste avant la représentation de La Somnambule. Certains spectateurs, médusés en apprenant les prises de position de la cheffe, ont préféré ne pas assister au spectacle. La direction de l’Opéra a quant à elle indiqué dans un communiqué que l’engagement avec Beatrice Venezi datait de février 2021, avant que les opinions de cette dernière ne soient connues, et a souligné que l’Opéra de Limoges respectait la liberté de conscience et d’opinion de son personnel, tant qu’elles restent « dans les limites légales » (source : https://france3-regions.francetvinfo.fr).

Devant l’importance suscitée par l’événement, certains rétorqueront que les qualités artistiques n’ont rien à voir avec les positionnements des musiciens, qu’il ne faut pas mélanger l’art et la politique. Certes. Mais ce conseil salutaire pourrait être adressé en premier lieu à Beatrice Venezi elle-même, très présente dans les médias en Italie, et très soucieuse de donner à l’idéologie qu’elle défend une grande visibilité. Dans ces conditions, difficile de s’étonner ou de se plaindre du possible rejet auquel on s’expose. Encore une fois, ce sont les risques de l’engagement

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[1] https://www.ilpost.it/2018/10/04/la-verita-panorama-2/