ELDAR ALIEV (1971-2020), de la Scala à la rue…

C’est un destin tragique et immensément triste que celui  d’Eldar Aliev, basse talentueuse originaire d’Azerbaïdjan, qui vient de nous quitter, le 4 août dernier, à peine âgé de 49 ans…

Le chanteur avait interprété avec talent et succès plusieurs rôles de basse importants (Le Grand Inquisiteur, Sarastro, Banco, Don Giovanni, Philippe II, Timur, Attila,…), sur les plus grandes scènes du monde, dont la Scala (il y chanta Astolfo dans Lucrezia Borgia en 2002 aux côtés de Mariella Devia, Daniella Barcellona, Marcelo Alvarez et Michele Pertusi), mais aussi à Rome, Florence, Bologne, Pesaro, Madrid, Munich, 

Amsterdam ou Mexico. Paris se souvient de ses incarnations de Raimondo dans la Lucia de Serban (2000), Banco dans le Macbeth de Lloyd (2002) ou encore Sparafucile dans le Rigoletto de Savary (2001), et l’on avait en ces occasions apprécié sa voix saine, sa rigueur stylistique, et surtout sa grande sobriété, autant de qualités dont cet extrait du Requiem de Verdi donne un bel exemple :

Depuis une quinzaine d’années, on ne l’entendait plus… On pouvait imaginer que des problèmes vocaux l’avaient contraint à mettre un terme à sa carrière de chanteur, même si ses dernières apparitions n’avaient fait entendre aucune altération du matériau vocal…

La réalité est tout autre : Eldar Aliev vivait depuis 15 ans en tant que sans domicile fixe, dans une rue de Milan, d’abord dépourvu de tout abri, puis dans une caravane qu’on lui avait prêtée  lorsqu’il a commencé à avoir quelques problèmes de santé… Problèmes qui lui valaient la visite régulière de services médicaux, lesquels ont découvert son corps sans vie mardi 11 août. Le plus étonnant est que ce mode de vie semble résulter d’un choix conscient et réfléchi, le chanteur ayant apparemment décidé, après ces années de succès si prometteuses, de devenir quasi invisible en se coupant définitivement du monde…

Selon son souhait, son corps, grâce à l’Ambassade de son pays, sera rapatrié et inhumé en Azerbaïdjan.

Pour entendre Eldar Aliev et faire vivre sa mémoire, on peut notamment réécouter ses enregistrements de Moïse et Pharaon (intégrale parue en 1999, à l’occasion de représentations données à Pesaro, Rossini Opera Festival) ou de Parisina d’Este de Donizetti (Dynamic, 1999).

Donizetti, Parisina d’Este

Eldar Aliev chante Leuthold dans Guillaume Tell à Pesaro en 1995.