Récital « Airs et ensembles d’opéra » de l’Académie de l’Opéra de Paris

Photos des chanteurs : © Vincent Lappartient / Studio J’adore ce que vous faites

Après avoir déjà donné plusieurs concerts depuis la rentrée à l’Amphi Bastille, l’Académie de l’Opéra de Paris offrait ce 14 décembre son premier récital dans le cadre ô combien prestigieux du Palais Garnier. Si la mélodie occupe une partie importante de la programmation confiée à ces jeunes artistes, il s’agissait cette fois exclusivement d’extraits d’opéra, sélection manifestement conçue pour satisfaire plusieurs critères : beaucoup d’opéra italien, mais avec une présence quasi égale du français (on a notamment entendu des extraits de Faust par la mezzo Seray Pinar, Dialogues des Carmélites par la soprano Teona Todua et le ténor Thomas Ricart ou encore Werther avec la Sophie de Boglárka Bindás) – sans oublier la musique du XXe siècle.

Le début du programme, consacré à Rossini, a un peu le défaut de retourner le couteau dans certaine plaie. L’ouverture de Guillaume Tell nous rappelle que le chef-d’œuvre du compositeur, commande de l’Opéra de Paris, n’y a plus été donné depuis vingt ans, la production de 2003 n’ayant jamais été reprise. Semiramide, dont on entend un air, est une autre œuvre que notre première scène nationale se dispense de monter depuis plus longtemps encore – les seules représentations remontent à 1981. Quant au célèbre « Giusto ciel » de Maometto II, il est un peu dommage que personne n’ait eu l’idée de le donner plutôt dans sa version française créée à l’Opéra de Paris en 1826 avant sa retraduction en italien sous le titre L’assedio di Corinto. Enfin, le répertoire français n’est pas ignoré pour autant, avec Faust, Werther ou, saison 22-23 oblige, Hamlet dont ce sera le grand retour. Il y a même quelques raretés : un air tiré de La Gazzetta de Rossini, et un fragment de Gloriana de Britten (par le ténor Laurence Kilsby), opéra jamais entendu dans la capitale, sauf erreur. « Questo è un nodo avviluppato » de Cenerentola offre une conclusion riante à cette soirée, aucun bis n’ayant apparemment été prévu, qui aurait permis de faire revenir en scène tous les chanteurs.

Marine Chagnon

Martina Russomanno

Yiorgo Ioannou

Parmi les douze interprètes, tous n’affichent pas la même aisance sur les planches. On retrouve ici plusieurs des participants du Couronnement de Poppée  donnée la saison dernière à Paris et en tournée : la mezzo Marine Chagnon, aux mimiques irrésistibles en Rosine du Barbier ou en Tisbe de Cenerentola ; l’exquise soprano Martina Russomanno, que l’on a hâte de réentendre ; le baryton Yiorgo Ioannou, et son admirable maîtrise du chant syllabique rossinien ; ou la basse espagnole Alejandro Baliñas Vieites, Sénèque impressionnant dans le Monteverdi, mais qui paraît ici en légère méforme dans l’air d’Assur. Parmi les huit nouveau-venus, Margarita Polonskaya campe une spirituelle Norina, mais il est dommage qu’elle n’ait pas mieux coordonné son jeu de scène avec son partenaire Andres Cascante : lorsque Malatesta lui demande plus ou moins de se transformer en grenouille à grande bouche, grimaces à l’appui, celle-ci ne fait rien de semblable alors qu’elle est censée se conformer à ses instructions. Et l’on retiendra au premier chef Adrien Mathonat, impressionnante basse dont on aurait cru la densité de timbre réservée aux chanteurs d’Europe de l’est mais qui fait merveille en Claudius de Hamlet.

Alejandro Baliñas Vieites

Margarita Polonskaya

Andres Cascante

Adrien Mathonat

Les artistes

Matina Russomano, Teona Todua, Margarita Polonskaya, Boglárka Bindás, sopranos
Martine Chagnon, Seray Pinar, mezzo-sopranos
Thomas Ricart, Laurence Kilsby, ténors
Andres Cascante, Yiorgo Ioannou,  baryton
Alajandr Baliñas Vieites, Adrien Mathonat, basses

Orchestre de l’Opéra national de Paris, dir. Nil Venditi

Le programme

Extraits du Siège de Corinthe, Guillaume Tell, Semiramide, Le Barbier de Séville, Dialogues des Carmélites, Faust, la Cenerentola, Hamlet, Gloriana, Don Pasquale, Werther, La Gazzetta.